Retraite : Rachat de trimestres ou préparation individuelle ?

Comment préparer au mieux sa retraite ? En rachetant des trimestres ou en investissant à titre individuel ? Cet article compare le PER, l'assurance vie, les SCPI et les rachats de trimestre et de points
Couple heureux à la retraite.

Dans un précédent article nous avions expliqué comment se calculaient les rachats de trimestres de retraite et de point AGIRC/ARRCO pour les salariés (http://www.acacias-patrimoine.fr/2021/09/30/faut-il-racheter-des-trimestres-de-retraite-et-des-points-agirc-arrco/)

Dans cet article nous allons comparer ces rachats avec d’autres dispositifs d’épargne comme le PER, l’assurance vie et des SCPI.

Résumé de l’article précédent

Pour rappel nous avions étudié trois personnes différentes. Toutes ayant effectuées des études supérieures et prenant leur retraite dans les mêmes conditions.

Dans nos exemples nous avons pris comme hypothèses :

  • Que tous les trois avaient acquis 12 000 points AGIRC/ARRCO au moment de leur départ à la retraite.
  • Qu’il leur manquerait à chacun 12 trimestres pour partir à la retraite à 62 ans.
  • Qu’ils feraient un rachat de 12 trimestres au barèmes « taux + durée » de la sécurité sociale (voir l’article ci dessus mentionné pour l’explication de ce barème)
  • Qu’ils décidaient de racheter les points correspondant à ces mêmes périodes à l’AGIRC/ARRCO soit 3 x 140 = 420 points
  • Qu’ils avaient un Salaire Annuel Moyen (SAM) estimé sur les 25 meilleures années de leur carrière au moment du départ à 37 200€. (Pour rappel le salaire de chaque année est plafonné au PASS de l’année où il a été acquis. Il est revalorisé par des coefficients fournis par la CNAV qui ne permettent pas de dépasser en 2021 un SAM de 37 200€)

Premier cas : Le rachat est effectué à l’âge de 28 ans. Par hypothèse le Salaire annuel moyen brut revalorisé (SAM) sur les 3 dernières années avant le rachat est de 28 000€ brut. Mr est dans la tranche marginale d’imposition (TMI) de 11% pour une fraction de son salaire estimée à 3 000€. Au vu de sa date de naissance (1973), il lui faut 172 Trimestres pour obtenir le taux plein.

Second cas : Rachat à l’âge de 40 ans . SAM sur les 3 dernières années 41 000€ brut. TMI 30% pour    4 500€. Il lui faut 172 Trimestre pour obtenir le taux plein.

Troisième cas : Rachat à l’âge de 55 ans, SAM sur les 3 dernières années : 55 000€ brut. TMI 30% pour 16 000€. Il lui faut 169 Trimestre pour obtenir le taux plein.

Nous avions obtenu les résultats suivants :

Cas1 Cas 2Cas 3
Cout de rachat des trimestres20 492€54 218€70 656€
Cout de rachat des points AGIRC/ARCCO12 228€12 815€13 723€
Cout Global32 720€67 033€84 379€
Gain Fiscal1 980€12 505€25 312€
Cout net de fiscalité30 740€54 528€59 067€
Gain annuel à la retraite grâce au rachat de trimestres seul6 489€ brut 6 489€ brut 6 489€ brut
Gain annuel à la retraite grâce au rachat de points seul305€ brut pendant 3 ans
puis 1 831€ brut
305€ brut pendant 3 ans
puis 1 831€ brut
305€ brut pendant 3 ans
puis 1 831€ brut
Gain annuel global brut à la retraite6 794€ brut pendant 3 ans puis
8 320€ brut par an
6 794€ brut pendant 3 ans puis
8 320€ brut par an
6 794€ brut pendant 3 ans puis
8 320€ brut par an
Gain global net de fiscalité à la retraite4 395.72€ net fiscal pendant 3 ans
Puis 5 863.08€ net ensuite
4 395.72€ net fiscal pendant 3 ans
Puis 5 863.08€ net ensuite
4 395.72€ net fiscal pendant 3 ans
Puis 5 863.08€ net ensuite
Temps mis à la retraite pour amortir en net le rachat de trimestres6 ans10 ans10 ans et 10 mois

Nous en avions conclu :

  • que même si ce n’était souvent pas très intéressant d’un point de vue purement fiscal de racheter des trimestres en début de carrière (car généralement dans des tranches basses à ce moment de la vie professionnelle), cela était néanmoins très profitable  au niveau de la pension de retraite et s’amortissait en autant moins de temps que le rachat était effectué tôt.
  • Qu’à contrario, on pouvait racheter très tard ses points AGIRC/ARRCO car le prix d’acquisition évoluait faiblement en fonction de l’âge de rachat et qu’il fallait une dizaine d’année après la retraite pour amortir le prix du rachat.

Et enfin que 2 risques planaient sur ces rachats:

  1. Le risque d’avoir payé pour rien en cas de décès avant la retraite ou avant la période d’amortissement après le départ à la retraite (hormis dans certains cas le bénéfice éventuel à une réversion pour le conjoint survivant s’il ne s’est pas remarié).
  2. Le risque de réformes et de changement de mode de calcul des pensions retraites entre le moment du rachat et le moment du départ à la retraite.

Dans les paragraphes suivant nous allons supposer que ces mêmes personnes font le même effort net de fiscalité à 28, 40 et 55 ans que dans l’exemple précédent en investissant soit sur une assurance vie, soit dans un Plan Epargne retraite (PER), soit en investissant dans des Société Civiles de Placements Immobiliers (SCPI) (communément appelées la pierre papier). Puis nous étudierons les conséquences au moment de leur retraite.

Première simulation :  versement sur une assurance vie

Dans cette partie nous considérons donc que la première personne place à l’âge de 28 ans 30 740€ sur une assurance vie. Elle laisse ensuite travailler cette somme pendant 34 ans soit jusqu’à l’âge de ses 62 ans. Puis qu’elle effectue des retraits mensuels pour avoir un complément de revenus de 366.31e/mois net de tous frais et fiscalité pendant 3 ans puis de 488.59€/mois net ensuite (montant correspondant aux gain obtenus en net en cas de rachat de trimestres et de points du tableau ci dessus afin que l’on puisse comparer les dispositifs entre eux) .

Dans le second cas, ce sont 54 528€ qui sont placés à 40 ans pendant 22 ans

Et enfin dans le troisième cas ce sont 59 067€ qui sont placés à 55 ans et pendant 7 ans.

Pour ces 3 cas, on suppose que les frais d’entrée pour l’assurance vie sont de 2% et que le rendement net de frais est de 3% par an.

Dans notre exemple, nous supposons que les versements sont réalisés en 2021 (donc après le 27/09/2017 qui est une date particulière pour la fiscalité des assurances vie) et les primes versées sont inférieures à 150 000€

La fiscalité des rachats est donc dans nos exemples de 30% sur la part de plus-value pour les contrats de moins de 8 ans (la première année de retraite pour l’investissement réalisé à 55 ans) et de 7.5% sur la part de plus-value après un abattement de 4 600€ plus 17.2% de CSG/CRDS sur la totalité de la plus-value pour les contrats ouverts depuis plus de 8 ans.

Les simulations indiquent que les rachats peuvent être effectués:

  • Dans le cas 1 : pendant 16.4 ans après la retraite
  • Dans le cas 2 : Pendant 22.3 ans après la retraite
  • Dans le cas 3 : Pendant 15 ans après la retraite

Passée cette date, les sommes sur le contrat d’assurance vie sont complètement consommées et le contrat est clôturé

CONCLUSION 1 :

On s’aperçoit donc que le contrat d’assurance vie permet d’assurer un complément de revenu équivalent aux rachats de trimestres et de points pendant une durée assez longue après le départ en retraite, mais pas de manière viagère comme le permettent les rachats de trimestres et de points.

Faut-il pour autant privilégier systématiquement le rachat de trimestre et de points par rapport à l’assurance vie ?

Non bien sûr.

L’assurance vie présente en effet plusieurs avantages par rapport aux rachats de trimestres.

  1. En cas de décès avant l’âge de la retraite (voir même l’âge de la retraite plus les durées indiquées ci-dessus), les bénéficiaires que vous aurez désignés toucheront les sommes figurant sur votre assurance vie au moment de votre décès et ce en plus en grande partie hors succession (abattement de 152 500€ par bénéficiaire avant taxation aux droits de succession) alors que les sommes consacrées aux rachats de trimestres et de points seront perdues
  2. En cas de besoins de trésorerie au cours de votre vie, vous pouvez faire des rachats (ou même des avances) à partir de votre contrat d’assurance vie et ce à tout moment.
  3. Avec l’assurance vie vous pouvez moduler comme vous le souhaitez les compléments de revenus afin par exemple soit de profiter davantage de votre retraite pour faire des voyages dans les premières années, soit au contraire de ne rien ou peu toucher au début et privilégier la transmission ou l’utilisation en fin de vie pour payer éventuellement une maison de retraite. Ce qui n’est pas possible avec les rachats qui distribuent linéairement les pensions après la retraite

En résumé :

Si vous souhaitez plutôt la sécurité et un complément de revenu constant jusqu’à potentiellement un âge très avancé (au-delà de l’espérance de vie moyenne des Français en général) privilégiez le rachat de trimestres et de points, si vous optez plutôt pour la liberté et la transmission aux personnes de votre choix privilégiez alors l’assurance vie.

Seconde Simulation :  versement sur un Plan d’épargne Retraite (PER)

Le PER est un outil créé par le législateur en Octobre 2019 pour inciter les Français à préparer leur retraite en remplacement de l’ancien PERP. Il permet d’avoir un gain fiscal lié à une déduction sur revenu imposable des primes qui y sont versées.

Le gain est donc d’autant plus important que l’on est dans une tranche marginale élevée.

Les sommes sont bloquées jusqu’à la retraite sauf en cas d’acquisition de sa résidence principale et quelques autres cas pas très sympathiques (Décès du conjoint ou d’un de ses enfants, Invalidité de catégorie 2 ou 3, Surendettement, liquidation judiciaire, fin de droits au chômage)

ll est possible de sortir à partir de sa retraite  soit en capital (selon l’échelonnement de son choix), soit en rachats programmés soit en rente viagère soit encore en panachant ses solutions.

Toujours dans un but de comparaison avec le rachat de trimestres et de points, nous étudierons dans cet exemple un prélèvement mensuel programmé net de tous frais et fiscalité de 366.31€/mois pendant 3 ans puis de 488.59€.

Les sorties en rachat programmés sont taxées d’une part à l’impôt sur le revenu sur la part correspondant au capital et d’autre part au prélèvement forfaitaire unique à 30% sur la part correspondant aux plus-values. Comme nous avons supposé dans notre exemple que le taux d’impôt sur les revenus était de 30%, cela revient à taxer la totalité des prélèvements à 30%

Les simulations indiquent que les rachats peuvent être effectués:

  • Dans le cas 1 : pendant 10.8 ans après la retraite
  • Dans le cas 2 : Pendant 16.75 ans après la retraite
  • Dans le cas 3 : Pendant 17.5 ans après la retraite

CONCLUSION 2:

Dans les cas 1 et 2 le PER est moins performant que l’assurance vie. Il est légèrement plus performant dans le 3e cas grâce au gain fiscal important (16 000€ dans notre exemple dans la tranche à 30%)

Le PER semble plus intéressant que l’assurance vie lorsque l’on a une part importante de ses revenus qui sont taxés dans les tranches à 30% ou supérieur. Il sera encore meilleur si on passe à la retraite dans une tranche inférieure à celle où l’on était au moment des versements (par exemple tranche à 41% en activité et tranche à 30% à la retraite)

Comme pour l’assurance vie, en cas de décès les sommes restantes sur le PER sont transmissibles aux bénéficiaires désignés dans votre contrat mais avec une particularité en défaveur du PER.

En effet, si vous décédez après 70, les sommes restant sur le PER rentrent dans la succession après un abattement unique de 30 500€  tous bénéficiaire confondu alors que pour l’assurance vie, l’abattement est de 152 500€ par bénéficiaire (toutes les primes ayant été dans nos exemples versées avant les 70 ans de l’assuré).

De plus contrairement à l’assurance vie il n’est pas possible (sauf pour les quelques cas cités plus haut) de pouvoir faire des rachats avant d’avoir fait valoir ses droits à la retraite.

Enfin par rapport au rachat de trimestres et de points, le PER permet de mieux optimiser les versements en optimisant leur étalement dans la durée pour profiter au maximum de la tranche la plus haute dans laquelle vous êtes imposée. Et comme l’assurance vie ; il donne plus de liberté dans le choix dans l’utilisation de fonds au moment de la retrait. Mais est moins performant que cette dernière en termes de transmission.

En résumé:

Si vous privilégiez une rente jusqu’à la fin de vos jours allant au-delà de l’espérance moyenne de vie des Français, le rachat de trimestres et de points est à privilégier.

Pour les personnes dans des tranches très élevées (partie importante des revenus dans la tranche à 30% ou tranche à 41% et 45%) voulant plus de liberté, le PER est une solution plus intéressante que l’assurance vie, pour les autres cas l’assurance vie est souvent plus intéressante en termes de durée et de transmission que le PER.

Troisième simulation :  versement sur des SCPI

Dans ce dernier cas, nous supposons que l’investisseur place son argent dans des SCPI rapportant en moyenne 4.9% brut par an. Afin de limiter la fiscalité liée au revenus fonciers, il achète des parts en passant par une SCI à l’impôt sur les sociétés.

Les SCPI sont des sociétés civiles pouvant faire appel à l’épargne publique. Dans notre exemple nous passons par des SCPI distribuant des revenus fonciers issus de bureaux, de commerces, d’Ehpad, de crèches, d’entrepôts, etc…. Il existe d’autres types de SCPI (fiscale, de plus-value, …. ) que nous n’aborderons pas ici.

La SCI subit elle l’impôts sur les sociétés et des frais bancaires de 10€/mois dans notre exemple.

Note : Il est également possible de préparer sa succession en donnant assez tôt, la nue-propriété des parts de la SCI.

Pendant les premières années de sa retraite, l’investisseur peut prélever des sommes sans fiscalité grâce au remboursement de son compte courant d’associé créé au moment de l’apport des fonds puis il est soumis au prélèvement forfaire à 30% sur les dividendes qu’il se verse.

Les simulations indiquent que les rachats peuvent alors être effectués:

  • Dans le cas 1 : pendant 18 ans après la retraite
  • Dans le cas 2 : Pendant 21.5 ans après la retraite
  • Dans le cas 3 : Pendant 11.9 ans après la retraite

Conclusion 3 :

Les SCPI sont donc plus performantes que l’assurance vie et le PER dans le cas 1, entre l’assurance vie et le PER dans le cas 2 et moins bien que les deux dans le cas 3.

La solution SCI + SCPI présente également l’avantage par rapport au PER et au rachat de trimestres d’être plus souple en cas de besoin d’argent ponctuel avant la retraite.

Le passage par une SCI permet également d’envisager l’acquisition et la transmission d’autres bien immobiliers

Conclusion générale

Comme on a pu le voir dans les simulations précédentes il n’y a pas une solution unique qui soit meilleure que toutes les autres.

Chaque solution présente des avantages et des inconvénients ainsi que des performances dépendant de la situation de chacun.

Le rachat de trimestres et de points semble toutefois être à privilégier pour les personnes qui souhaitent s’assurer un revenu pérenne quelques soit leur durée de vie et qui n’ont pas un objectif principal de transmission à leurs proches ou qui ont d’autres moyens d’y parvenir.

Les autres solutions sont à privilégier pour ceux qui veulent également préparer leur succession et souhaitent plus de liberté quant à l’utilisation de leur argent ; à tout moment pour l’assurance vie et les SCPI, après leur départ en retraite uniquement pour le PER.

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