SFDR

Que penser de la finance responsable ?

Que penser de la finance responsable ?

Le 23 Mai 2023, la répression des fraudes (DGCCRF) publiait un rapport sur une enquête menée en 2021 et 2022 sur les pratiques commerciales des sociétés qui mettent en avant des critères de durabilité, de responsabilité et de respect de l’environnement pour elle-même ou pour leur produits. L’enquête ne concernaient pas que les produits financiers, elle ciblait plus largement les étiquettes en grande distribution, les sites internet institutionnels des entreprises, les produits cosmétiques, les textiles, les meubles, les articles de sports, etc….

Sur 1 100 établissements contrôlés, 25% étaient en infraction. La DGCCRF a ainsi dressé 141 avertissements, 114 injonctions et 18 procès-verbaux pénaux ou administratifs.

Bien que le bilan publié ne précise pas la proportion d’infraction par typologie d’activité on peut néanmoins espérer que le monde de la finance soit pour cette fois l’un des meilleurs élèves car ce domaine est particulièrement contrôlé et que de nombreuses règles ou label sont mis en place.

Parmi ceux-ci, vous trouverez toutes une série de sigles ou de labels censés aider les investisseur dans leur choix d’investissement : ESG, RSE, ISR, Finansol , GreenFin,  Taxonomie Européenne, etc….

Mais que signifient-ils et que valent-ils réellement ?

C’est ce que nous allons essayer d’éclaircir dans cet article.

Les critères ESG

Les critères ESG sont des éléments d’analyse extra-financière concernant la prise en compte d’impact environnemental, sociétal et de gouvernance d’une entreprise.

  • Pour le « E » d’environnement on va chercher à connaitre l’impact de l’entreprise en termes d’émission de carbone, de protection de la biodiversité, de la consommation d’eau ou d’électricité, le recyclage des déchets, par exemple,
  • Pour le « S » de sociétal on s’intéresse à l’impact de la politique de l’entreprise sur des thèmes comme l’éthique, les actions de mécénat, l’égalité des salaires hommes-femmes, la politique de non-discrimination, la promotion d’un emploi décent dans l’entreprise et chez les sous-traitants, la participation des salariés aux bénéfices de l’entreprise, la qualité du dialogue social, etc…
  • Enfin pour le « G » de gouvernance, il faut vérifier l’existence ou l’absence de code de déontologie et de bonne conduite, la politique de l’entreprise en termes de transparence et de lutte contre la corruption, la transparence sur la rémunération des dirigeants, le ratio homme/femme dans les organes de direction,…

Depuis la loi « Énergie et Climat » du 8 novembre 2019, les sociétés de gestion de portefeuille doivent obligatoirement indiquer aux investisseurs :

  • Leur politique sur la prise en compte dans leur stratégie d’investissement des critères ESG et des moyens mis en œuvre pour contribuer à la transition énergétique et écologique
  • Les critères et les méthodologies utilisées ainsi que la façon dont ils sont appliqués
  • Les informations sur les risques associés au changement climatique ainsi que sur les risques liés à la biodiversité

Cependant, pour avoir lu plusieurs déclarations des sociétés de gestion sur leur méthodologie d’évaluation, on y trouve des grand principes, des beaux discours mais peu de concret. Elles indiquent parfois envoyer des questionnaires aux entreprisses cibles mais rien sur la manières donc elles vérifient la pertinences des réponses reçues ( qui demeurent donc du simple déclaratifs) . Dans d’autres cas, elles se reposent sur des agences de notation dont les résultats diffèrent très sensiblement les unes des autres.

Autre problème la note ESG globale peut être bonne, car l’entreprise est performante sur le S et le G des critères ESG mais l’activité elle-même être contraire au développement durable. On pourra ainsi trouver des industries minières ou pétrolière avec une assez bonne note ESG.

Il y a également des disparités liées au pays de la société cible ou de l’agence de notation. Par exemple des pays ayant une forte activité pétrolière attribuent généralement une pondération plus forte aux S et G des critères qu’à la partie environnementale. Ce qui explique des différences notables pour une même entreprise en fonction de l’agence de notation.

Pour donner quelques éléments de réflexion, voici le classement de quelques sociétés très connues, donné en Mai 2023 par une des agences de notation (données disponibles sur www.issgovernance.com/esg)

  • Classées en B : Kering (entreprise de luxe regroupant entre autres Gucci et  St Laurent) , SANOFI (laboratoire pharmaceutique) , STMicroelectronics (fabricant de composant électronique)
  • Classées en B- : Total Energy, Repsol (compagnie pétrolière Espagnole) , Veolia environnement , l’Oréal, Wipro Limited (Société de service informatique)
  • Classées en C+ : BAYER (ex monsantos), Air France KLM, Air Liquide, BNP Paris Bas, AXA
  • Classéées en C : Airbus , Moderna 
  • Classées en C- : Stellantis (ex Peugeot) , Exxon Mobil (compagnie pétrolière américaine), Meta (Anciennement Facebook), OVH (datacenters Français),

On peut s’étonner que le luxe bénéficie d’une des meilleures notations en termes de développement durable (B ou B-) et que des entreprises pétrolières soient également en haut de tableau.

Note : Il existe également maintenant un CAC 40 ESG regroupant 40  sociétés parmi les 100 plus grandes capitalisations boursières Française ayant  une coloration ESG.

Le sigle ESG n’est donc ni une norme, ni un label. Il fait donc juste référence à la prise en compte d’éléments extra-financiers pour noter l’engagement d’un fond un d’une entreprise envers l’environnement, son impact sociétal et sa gouvernance chacun étant libre de sa propre méthode de notation

RSE et DPEF

Le RSE est le Rapport Sociétal et Environnemental de l’Entreprise.  Il tend à être complété voir remplacé par la déclaration de performance extra-financière (DPEF). C’est un rapport officiel publié par les entreprises (souvent au sein du Rapport Annuel) qui indique l’impact de ses activités sur l’environnement et son impact sociétal.

Il est maintenant obligatoire pour les grandes entreprises (la loi Grenelle II du 12/07/2020 le rend obligatoire pour les entreprises cotées et celles ayant plus de 500 salariés ou 40M€ de chiffre d’affaires et la directive européenne sur le « reporting » extra financier a étendu cette obligations aux sociétés non cotées de plus de 500 salariés et 100M€ de CA).

Ce rapport doit indiquer les actions, les résultats et les plans d’amélioration des critères ESG de l’entreprise L’article 225-102*-1 du code du commerce précise les éléments qui doivent à minima y figurer. On y retrouve :

  • Les informations relatives aux conséquences sur le changement climatique de l’activité de la société et de l’usage des biens et services qu’elle produit, avec en particulier :
    • Les informations sur les postes d’émissions directes et indirectes de gaz à effet de serre liées aux activités de transport amont et aval de l’activité
    • Un plan d’action visant à réduire ces émissions, notamment par le recours aux modes ferroviaire et fluvial ainsi qu’aux biocarburants dont le bilan énergétique et carbone est vertueux et à l’électromobilité.
    • Ses engagements sociétaux en faveur du développement durable, de l’économie circulaire, de la lutte contre le gaspillage alimentaire, de la lutte contre la précarité alimentaire, du respect du bien-être animal et d’une alimentation responsable, équitable et durable,
    • Les accords collectifs conclus dans l’entreprise et leurs impacts sur la performance économique de l’entreprise ainsi que sur les conditions de travail des salariés,
    • Les actions visant à lutter contre les discriminations et promouvoir les diversités,
    • Les actions visant à promouvoir la pratique d’activités physiques et sportives,
    • Les mesures prises en faveur des personnes handicapées.

Les entreprises qui ont l’obligation de publier ce rapport doivent également se soumettre à la vérification des données publiées par un organisme indépendant.

Mais ceci signifie en corolaire que toutes les entreprise n’atteignant pas ces critères de nombre de salariés ou de chiffres d’affaires peuvent publier des chiffres sans que ces derniers ne soient contrôlés.

Là encore, il ne s’agit malheureusement pas d’un label permettant facilement à l’investisseur de se positionner.

Mais il s’agit cependant d’un pas dans la bonne direction. C’est un élément qui permet :

  • Aux agences de notation et aux sociétés de portefeuille d’avoir des données validées par des organismes indépendants pour les grands groupes (mais par pour les autres pour l’instant)
  • et pour les investisseurs, qui en ont le temps et l’envie, de se forger par eux même une opinion sur l’engament de l’entreprise dans laquelle ils souhaitent investir en termes de développement durable , de responsabilité sociétale et sur sa gouvernance.


ISR

ISR signifie « Investissement Socialement Responsable ». Les placements « ISR » cherchent à concilier la performance financière et une bonne performance ESG.

Le label ISR a été mis en place en 2016 en France par le ministère de l’économie et des finances dans le but de permettre aux épargnants, ainsi qu’aux investisseurs professionnels, de distinguer les fonds d’investissement mettant en œuvre une méthodologie robuste d’investissement socialement responsable (ISR), aboutissant à des résultats mesurables et concrets.

Il s’applique à des fonds (OPCVM) et depuis 2021 à des FIA (par exemple les OPCI, SCPI)

Parmi les principales stratégies d’investissement socialement responsable, on retrouve (source AMF) :

  • L’approche « best-in-class », consistant à sélectionner les meilleures entreprises de chaque secteur sans en exclure aucun,
  • L’exclusion, consistant à exclure de l’univers d’investissement les entreprises ne répondant pas à des critères socio-environnementaux minimaux. Il peut s’agir d’exclusions sectorielles (alcool, tabac, armement, OGM, nucléaire, etc.) ou bien d’exclusions normatives (non-respect ou non-ratification de traités et conventions internationaux), mais c’est à chaque fond de définir son périmètre d’exclusion ;
  • L’engagement actionnarial, consistant à influencer les entreprises en utilisant les droits d’actionnaire, afin de les pousser à améliorer leurs pratiques ESG,
  • L’approche thématique consistant à investir dans des entreprises présentes dans les secteurs d’activité liés au développement durable (changement climatique, énergies renouvelables, eau, etc.),
  • L’ impact investing », consistant à investir dans des entreprises, souvent dans le non coté, qui cherchent à générer un impact social ou environnemental mesurable.

On peut également trouver

  • L’approche « Best in universe » sélectionnant les entreprises les plus performantes sur les critères extra-financiers, tous secteurs confondus. Elle comporte donc des biais sectoriels : certains secteurs comme le recyclage ou les énergies renouvelables par exemple seront surreprésentés par rapport à d’autres secteurs d’activité comme la grande consommation ou le transport aérien.
  •  L’approche « Best-effort » contrairement aux précédentes, s’appuie sur une notation relative à l’évolution des pratiques des entreprises. Elle consiste à sélectionner les sociétés démontrant une amélioration ou de bonnes perspectives de leurs pratiques et de leurs performance ESG dans le temps. Un fonds adoptant une stratégie Best-effort pourra par exemple investir dans les titres d’entreprises du secteur des transports qui cherchent à améliorer leurs empreintes carbone, ou encore du secteur de l’industrie qui développent des programmes de réinsertion professionnelle.

Un même fonds peut regrouper plusieurs de ces stratégies d’investissement.

A ce jour (Juin 2023), 1174 fonds sont labellisée ISR

Le problème du label ISR est , que s’il implique la prise en compte de critères ESG , il n’inclut par contre aucune vérification par les sociétés de gestion de l’accomplissement d’objectifs d’investissement durable des sociétés cibles, ni la prise en compte des indicateurs de « Principle Adverse Impact » c’est-à-dire concernant l’activité de l’entreprise ayant un  impact négatifs sur le développement durable ou l’éthique (par exemple activité pétrolière ou production d’armes).

Le second problème de ce label concerne l’approche « Best Effort ». En effet, cette approche permet de sélectionner des entreprises qui n’ont rien de durable ni de socialement responsable. On pourrait par exemple sélectionner des chaines de fastfood, ou des entreprise gérant des datacenters (grands consommateurs d’eau pour le refroidissement et d’énergie) parce qu’elles déclarent s’engager dans des voies d’amélioration.

Dans des fonds labellisés ISR, j’ai ainsi pu en trouver qui investissaient dans des entreprises comme Ferrari, Repsol (pétrolière), Porsche, Chrysler, Luftansa ,Sodexo,…dont le cœur de métier ne va pas dans le sens du développement durable.

Finansol

Le label Finansol a été créé en 1997 par l’association FAIR pour distinguer les produits d’épargne solidaire des autres produits d’épargne auprès du grand public. Il concerne donc uniquement les produits d’épargne (il ne labellise donc jamais une association, une entreprise ou un établissement financier dans son ensemble).

Ce label est attribué par un organisme indépendant qui vérifie également chaque année que le label attribué une année précédente peut être maintenu (par exemple en 2022 , 18 labellisation ont été accordées mais 9 ont été retirées)

Les produits d’épargnes doivent cibler des investissements dans des activités à forte utilité sociale et/ou environnementale.et en particularité dans les secteurs suivants :

  • Emploi et création d’entreprises :
    • Insertion par l’activité économique,
    • Création d’entreprises par des personnes en situation de précarité,
    • Maintien d’emplois dans des zones rurales prioritaires…
  • Logement social :
    • Réhabilitation et construction de logements à destination de personnes en difficulté.
  • Activités écologiques :
    • Développement d’activités respectueuses de l’environnement (agriculture biologique, énergies renouvelables…)
  • Entrepreneuriat dans les pays en développement :
    • Microcrédit,
    • Commerce équitable…

Il existe à ce jour un peu plus de 150 produits labelisé Finansol (contre 1174 ayant le label ISR)

Qu’apporte le label Finansol par rapport au label ISR ?

Comme vu précédemment, le label ISR labelise des fonds qui sélectionnent leur investissement cible via des critères ESG qui leurs sont propres.

 Le label Finansol repose sur un degré d’engagement plus fort puisque les activités financées sont choisies en fonction de leur utilité effective en matière de lutte contre l’exclusion, de cohésion sociale ou de développement durable.

GreenFin

Le label Greenfin (anciennement label « TEEC » pour « Transition énergétique et écologique pour le climat ») a été lancé fin 2015 par le Ministère de la Transition Ecologique et Solidaire au moment de la COP 21.

Il est destiné à garantir aux investisseurs que les produits financiers auxquels il est attribué contribuent effectivement au financement de la transition énergétique et écologique.

Il peut être attribués à des OPCVM et des FIA (fonds de dettes privées, OPCI, SCPI)

Le label est attribué par l’AFNOR Certification qui vérifie que le cahier des charges défini par l’état pour l’obtention de ce label est bien respecté.(Cf https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/Label_TEEC_labellisation_nouveau_r%C3%A9f%C3%A9rentiel.pdf%20.pdf pour la version de septembre 2022 de ce cahier des charges)

Il est accordé pour une durée d’un an, renouvelable, après vérification que le fond est bien toujours respectueux des exigences du label.

Il y a 4 critères à respecter pour pouvoir être labelisé

  1. Critère 1 : Les entreprises cibles du fond doivent avoir une des 8 activités rentrant dans le cadre de la transition énergétique. La liste de ces activités et le détail de chaque sous-activité a été défini dans le cahier des charges mentionné ci-dessus.
    • Chacune des sociétés cibles doit réaliser au minimum 50% de son activité dans les secteurs ci-dessous et le fond doit détenir à minima 75% de telles sociétés.
    • Les huit secteurs d’activités sont définis dans le tableau suivant : 
1) Énergie  
▪ Énergie solaire ▪ Énergie éolienne ▪ Bioénergie ▪ Énergie hydraulique ▪ Énergie géothermique ▪ Autres énergies renouvelables ▪ Distribution et gestion de l’énergie ▪ Stockage de l’énergie ▪ Capture du carbone ▪ Services
2) Batiments  
▪ Bâtiments verts ▪ Efficacité énergétique ▪ Systèmes de capture de l’énergie ▪ Services  
3) Économie circulaire  
▪ Technologies et produits ▪ Services ▪ Valorisation énergétique des déchets ▪ Valorisation énergétique des combustibles existants ▪ Gestion des déchets  
4) Industrie  
▪ Produits d’efficacité énergétique ▪ Systèmes et processus d’efficacité énergétique ▪ Cogénération, tri génération, etc. ▪ Récupération de chaleur ▪ Réduction des GES non liés à la production d’énergie ▪ Réduction de la pollution ▪ Processus industriels éco-efficients ▪ Services ▪ Agro-alimentaire bio  
5) Transport  
▪ Système de fret et transport ferroviaire ▪ Système de transport ferroviaire urbain ▪ Véhicules électriques ▪ Véhicules hybrides ▪ Véhicules à carburant alternatif ▪ Transit rapide bus ▪ Transport maritime ▪ Transport à vélo ▪ Biocarburants ▪ Biocarburant pour l’aviation ▪ Logistique de transport  
6) Technologies de l’information et de la communication  
▪ Centre de données fonctionnant aux énergies renouvelables ▪ Infrastructures bas carbone ▪ Produits et technologies fonctionnant sous smart grid ▪ Technologies de substitution  
7) Agriculture & forêt  
▪ Agriculture biologique ▪ Agriculture durable ▪ Activités forestières moins émettrices de carbone et liées à la séquestration du carbone ▪ Agriculture à basse émission de GES, séquestrant le carbone et résiliente au climat  
8) Adaptation  
▪ Adaptation à l’eau (recyclage, amélioration des infrastructures contre la montée des eaux,..) ▪ Infrastructures (protection contre dilatation, sous l’effet de la chaleur, des ponts et des voies ferrées ; protection contre les fortes chutes de pluies ;…)  
 
  • Critère 2 : Exclusions de certaines activités.
    • Une société cible doit être exclue dès qu’elle réalise plus de 5% de son activité (chiffre d’affaires) dans l’un des secteurs ci-dessous :
      • Les activités de la chaîne de valeur des combustibles fossiles listées ci-dessous :
        • L’exploration, extraction, raffinage de combustibles fossiles solides, liquides et gazeux.
        • La production de produits dérivés de combustibles fossiles solides, liquides et gazeux.
        • Le transport/distribution et stockage de combustibles fossiles solides et liquides
        • La production d’énergie sous forme d’électricité et/ou de chaleur, de chauffage et de refroidissement à partir de combustibles fossiles, liquides et gazeux
        • La fourniture de combustibles fossiles solides et liquides
      • L’ensemble de la filière nucléaire, c’est-à-dire les activités suivantes : extraction de l’uranium, concentration, raffinage, conversion et enrichissement de l’uranium, fabrication d’assemblages de combustibles nucléaires, construction et exploitation de réacteurs nucléaires, traitement des combustibles nucléaires usés, démantèlement nucléaire et gestion des déchets radioactifs
    • Pour d’autres activités, l’exclusion n’est réalisée qu’à partir de 30% du chiffres d’affaires. Cela concerne :
      • Le transport, la distribution et le stockage de combustibles fossiles gazeux
      • Les services de fourniture de combustibles fossiles gazeux
      • Les centres de stockage et d’enfouissement sans capture des gaz à effet de serre
      • L’incinération sans récupération d’énergie
      • L’efficience énergétique pour les sources d’énergie non renouvelables et les économies d’énergie liées à l’optimisation de l’extraction, du transport et de la production d’électricité à partir de combustibles fossiles
      • L’exploitation forestière, sauf si elle gérée de manière durable au sens indiquée dans l’annexe 1, et l’agriculture sur tourbière
      • La production, transport et la distribution/vente d’équipements et services réalisés auprès/à destination de clients des secteurs strictement exclus (tels que définis ci-dessus)
    • Ainsi une société réalisant 90% de son chiffre d’affaires dans les énergies renouvelable (critère 1) et 10% dans la production d’électricité à partir d’énergie fossiles serait exclue du label GreenFin (règle des 5% du critère 2)

  • Critère 3 : Prise en compte des « controverses » ESG.
    • C’est peut-être le critère le moins efficace et le plus sujet à caution de ce label. En effet il n’implique pas un contrôle à priori de la qualité ESG d’une entreprise mais de son exclusion si elle venait à être impliquée dans un incident liés à des facteurs ESG ( Par exemple Allégation de corruption,  de pollution, de prix excessifs des médicaments d’une entreprise pharmaceutique, de greenwashing, …)
    • Cela passe souvent par l’analyse des articles de presse. Ainsi une entreprise qui maitrise parfaitement sa communication, ou étouffe les affaires par des chèques avant que l’incident ne devienne public restera « GreenFin Compatible » alors qu’une autre qui subit une campagne organisée de dénigrement pourra se retrouvée exclue à tort.
  • Critère 4 : L’impact positif sur la transition énergétique et écologique.
    • Le fonds labellisé doit avoir mis en place un mécanisme de mesure de la contribution effective de ses investissements à la transition énergétique et écologique.Cela passe par le définition et le suivi d’indicateurs dans au moins un des quatre domaines suivants
      • Changement climatique (Exemple d’indicateur :  le bilan d’émission de Gaz à effet de serre des entreprises dans lequel le fond investit)Gestion de l’eau (Exemple d’indicateurs : Consommation d’eau totale, Volume des eaux réutilisées)Préservation des ressources naturelles : (Exemple d’indicateurs : Consommations totale de ressources naturelles jugées critiques, Part des énergies renouvelables dans le mix énergétique, parts de recyclage de matières premières,..)Préservation de la biodiversité : : (Exemple d’indicateurs : surface de sols réhabilités°
      Le fond doit suivre ces indicateurs (dans au moins 1 des 4 domaines) sur 3 années glissantes et indiquer si les améliorations mesurées sont conformes aux objectifs du fond.
    • Cependant en l’état actuel du cahier des charges, il ne semble pas que la non-atteinte des objectifs soit un éléments faisant perdre la labellisation au fond. On lui demande juste d’avoir des indicateurs et de les suivre dans le temps et éventuellement les comparer à des benchmarks s’ils existent.

A ce jour une centaine de fonds sont labellisé GreenFin

La double labellisation ISR et Greenfin  commence effectivement a cibler des fonds à la fois engagé sur la partie sociétale et gouvernance d’une part et sur les aspects environnement et développement durable d’autre part, même si l’on a vu qu’il restait encore quelques trous dans la raquette.

SFDR

Le 27 novembre 2019, le parlement Européen adoptait le règlement UE 2019/2088 concernant la publication d’informations en matière de durabilité dans le secteur des services financiers dit règlement SFDR ( pour (Sustainable Finance Disclosure Regulation). Il vise notamment à combler un vide dans la réglementation européenne concernant d’une part la publication par les fonds d’information sur :

  • L’intégration des risques en matière de durabilité (c’est-à-dire de la prise en compte de l’impact qu’un évènement ou ’une situation dans les domaines ESG  pourraient avoir sur la valeur de l’investissement)
  • La prise en compte des incidences négatives en matière de durabilité
  • Les objectifs d’investissement durable
  • La promotion des caractéristiques environnementales ou sociale

et d’autre part la prise en compte, par les conseillers financiers, de la sensibilité des investisseurs à ces informations dans leur processus de décision d’investissement. Ainsi depuis le 1Janvier 2023, chaque conseiller doit interroger son client sur sa sensibilité aux investissement ESG et doit pouvoir prouver en cas de contrôle qu’il a bien réaliser ce questionnaire.

Le règlement SFDR,  défini en particulier au point 17 de son article 2, ce qu’est un investissement durable :

  • Un investissement durable est:
    • un investissement dans une activité économique qui contribue à un objectif environnemental, mesuré par exemple au moyen d’indicateurs clés en matière d’utilisation efficace des ressources concernant l’utilisation d’énergie, d’énergies renouvelables, de matières premières, d’eau et de terres, en matière de production de déchets et d’émissions de gaz à effet de serre ou en matière d’effets sur la biodiversité et l’économie circulaire,
    • OU un investissement dans une activité économique qui contribue à un objectif social, en particulier un investissement qui contribue à la lutte contre les inégalités ou qui favorise la cohésion sociale, l’intégration sociale et les relations de travail,
    • OU
    •  un investissement dans le capital humain ou des communautés économiquement ou socialement défavorisées,
    • ET  pour autant que ces investissements ne causent de préjudice important à aucun de ces objectifs et que les sociétés dans lesquels les investissements sont réalisés appliquent des pratiques de bonne gouvernance, en particulier en ce qui concerne des structures de gestion saines, les relations avec le personnel, la rémunération du personnel compétent et le respect des obligations fiscales

On le voit il y a beaucoup de « Ou » dans cette définition. On peut donc supposer qu’une entreprise performante dans la lutte contre les inégalités puisse ainsi se permettre d’avoir une activité quelconque non orienté développement durable (à condition quand même de ne pas avoir un impact négatif sur l’environnement) et se targuer d’avoir quand même une activité durable.

Heureusement l’article 4 du règlement SFDR, oblige également les entreprises, soit à communiquer sur les incidences négatives de leur activité concernant les « facteurs de durabilité» ( c’est-à-dire se rapportant aux activité ayant un impact sur les questions environnementales, sociales et de personnel, le respect des droits de l’homme et la lutte contre la corruption et les actes de corruption) soit à clairement afficher qu’elles ne s’en préoccupe pas le moins du monde. ( On peut par exemple trouvez parfois la mention : « Ce fond n’intègre aucun critères Environnemental, Sociétal ou de Gouvernance », mais tous ne respectent pas encore cette obligation).

On va ainsi trouver 3 catégories de fonds.

  • Les fonds dit article 6. Ceux-ci se limitent a expliquer en quoi il prenne (ou pas) en compte les « Risques en matière de durabilité ». ATTENTION, il ne s’agit pas ici de prendre en compte l’impact des entreprises sur les « facteurs de durabilité » mais plutôt (cf point 22 de l’article 2 du règlement) d’expliquer comment le fond prend en compte l’impact qu’un événement ou une situation dans le domaine environnemental, social ou de la gouvernance, qui, s’il survient, pourrait avoir une incidence négative importante, sur la valeur de l’investissement. Un fond investissement dans l’extraction pétrolière peut donc tout à fait se targuer d’être conforme à l’article 6 du règlement SFDR si tant est qu’il a expliquer qu’une marée pétrolière pourrait faire baisser significativement le court du fond, voir même juste dire clairement qu’il ne s’en préoccupe pas le moins du monde !!!!
  • Les fonds dits article 8 :  Ce sont des fonds qui mettent en avant leur impact Environnemental et/ou Sociétal (à condition que les sociétés dans lesquels ils investissent appliquent toujours des pratiques de bonne gouvernance). Ces fond se doivent de communiquer les règles de sélections des sociétés cibles en termes de critères ESG. Mais  aucun niveau minimum en termes de facteur de durabilité n’est exigé.  
  • Les fonds dits article 9 : Ce sont des fonds article 8 qui en plus soit définissent un indice de référence permettant de les » benchmarker » soit qui doivent se fixer un objectif d’amélioration mesurable et indiquer les moyens qu’ils mettent en place pour l’atteindre. Mais de nouveau, aucun niveau minimum en termes de facteur de durabilité n’est exigé. Cependant comme nous le verrons ci-dessous, le règlement « Taxonomie » oblige les fonds article 9 à préciser dans qu’elle activité environnementale de la Taxonomie Européenne ils sélectionnent leur entreprises cibles

Le règlement SFDR demande donc essentiellement aux acteurs financiers de publier des informations relatives à leurs allégations et pratiques en matière de durabilité mais ne définit aucun minima d’engagement ni aucune typologie d’activité cible ou à exclure

C’est pour cela qu’il existe un second règlement européen dit « Taxonomie » (cf ci-dessous) et que  l’AMF a publié en Février 2023 des propositions visant à fixer des minima (en terme d’engagement environnemental mais pas sociétal) et d’exclure certaines activités (celles des combustibles fossiles notamment) . Il ne s’agit cependant que de propositions à destination de l’Union Européenne.

Mais cette dernière a adressé une fin de non-recevoir le 14 avril de cette même année en indiquant laisser au marché financier le soin de s’auto réguler.

Pour éviter le greenwashing (ou écoblanchiment, en français), il revient donc à l’investisseur ou à son conseiller financier d’analyser les documents d’informations clef ou les rapports annuels pour vérifier le réel engagement du fond dans l’environnement, la société sans pouvoir malheureusement se référer aux article 8 ou 9 SFDR. On en revient donc à ce qui devait se faire avant ce règlement.

La montagne a donc accouché d’une souris !!!

Taxonomie Européenne

Le 18 juin 2020, donc à peine 7 mois après le règlement ci-dessus, l’union européenne publiait le règlement (UE 2020/852) visant à favoriser les investissements durables et modifiant le règlement (UE) 2019/2088 (le fameux SFDR) mais sans pour autant l’annuler ou le remplacer.

Ce règlement établit les critères permettant de déterminer si une activité économique est considérée comme durable sur le plan environnemental. On peut donc se demander pourquoi dans sa décision d’avril 2023, la commission Européenne refuse d’appliquer cette taxonomie aux fonds article 8 et 9.

Il complète le règlement SFDR sur les aspects environnementaux MAIS pas sur les aspects sociétaux et de gouvernance.

Est donc considéré comme un investissement environnementalement durable, un investissement qui à la fois se fait dans au moins un des domaines suivants et ne cause de préjudice important à aucun autre d’entre eux :

  • L’atténuation du changement climatique (c’est-à-dire en contribuant de manière substantielle à stabiliser les concentrations de gaz à effet de serre dans l’atmosphère soit directement, soit en innovant, soit en créent des puits de carbone);
  • L’adaptation au changement climatique (c’est-à-dire soit réduisent sensiblement le risque d’incidences négatives sur climat actuel de certaines activités économiques, soit contribuent de manière substantielle à réduire l’impact du changement climatique sur les populations, la nature ou les biens)
  • L’utilisation durable et la protection des ressources aquatiques et marines (c.a.d en contribuant soit à assurer le bon état des masses d’eau, y compris les masses d’eau de surface et les masses d’eaux souterraines ou marines, soit à prévenir la détérioration de ces masses d’eau qui sont déjà en bon état)
  • La transition vers une économie circulaire (c.a.d en réduisant la consommation de matières premières primaires ou en augmentant l’utilisation de sous-produits et de matières premières secondaires, ou en augmentant la durabilité, la réparabilité, l’évolutivité ou la réutilisabilité des produits, ou encore en réduisant sensiblement la teneur en substances dangereuses ou en réduisant la production de déchets)
  • La prévention et la réduction de la pollution (c.a.d en prévenant ou en réduisant les émissions de polluants dans l’air, l’eau ou le sol, autres que les gaz à effet de serre, ou en améliorant les niveaux de qualité de l’air, de l’eau ou des sols ou en réduisant ou éliminant l’utilisation de substances chimiques ayant un impact négatif sur la santé humaine et l’environnement ou en nettoyant les dépôts sauvages de déchets et autres formes de pollution);
  • La protection et la restauration de la biodiversité et des écosystèmes (c.a.d : En contribuant à protéger, conserver ou restaurer la biodiversité et à assurer le bon état des écosystèmes ou à protéger les écosystèmes qui sont déjà en bon état, en mettant en œuvre des pratiques agricole sou de gestion des forêts durable

Ce règlement oblige les fonds qui se prévalent de l’article 9 SFDR, à préciser à laquelle, ou auxquelles des activité énumérées ci-dessus ils contribuent et à hauteur de quel pourcentage de leur investissement global.

En conclusion, la taxonomie ne concerne que les activité environnementales d’une part et ne définit aucun domaine d’exclusion d’autre part. Un fond pourra toujours être SFDR 9 pour des aspects sociétaux et non environnementalement durable, 

Conclusion

Comme nous venons de le constater, il existe à ce jour de nombreux règlements ou labels français ou Européens. Mais aucun ne garantit à l’investisseur qu’il va placer son argent dans un fond qui s’engage à avoir un impact réellement positif sur le changement climatique ou l’amélioration de la prise en compte de l’impact sociétal d’une entreprise (Sauf Finansol pour cet aspect) ou de la qualité de sa gouvernance.

Le règlement européen SFDR, souvent présenté comme la panacée avec son article 9, mis en avant par de nombreuses sociétés de gestion, est en fait une machine à écoblanchiment puisqu’aucun domaine d’exclusion n’existe ni aucun objectif minimum à attendre n’a été défini !!!

Le label Finansol, apparait comme un label exigeant mais ne concerne que l’impact sociétal sans donner réellement d’indication sur l’engagement en termes de durabilité environnementale.

Seule la combinaisons de plusieurs label (par Exemple ISR+ Greenfin, ou ISR + article 9) peut permettre à l’investisseur de se repérer plus facilement.

Notons toutefois les engagements de certaines sociétés de gestion qui vont au-delà des règlements et qui par exemple s’engagent dans le fonds SFRD article 9 à exclure des domaines d’activité qu’ils désignent nommément.

D’autres au contraire, en reste au verbiage et contournement des règlement !!!

Prenons par exemple la politique d’une société de gestion très connue sur la place qui pour sa politique de suivi des fonds SFDR article 9 indique :

  • Lorsque nous estimons qu’une entreprise sous-performe, que ses structures de gouvernance ou de direction ne répondent pas aux normes que nous avons définies (NDLR : reste donc à connaitre ce qu’ils ont définis comme norme)  ou que nous avons d’autres préoccupations concernant, par exemple, la stratégie de l’entreprise ou les questions environnementales ou sociales  (…) nous mettons en place une procédure d’escalade consistant à
    • discuter avec les représentants de l’entreprise,
    • puis nous  plaçons l’entreprise sous surveillance
    • puis nous  pouvons (NDLR : ce n’est donc pas systématique)  aussi être amenés à voter contre la direction lors des assemblées générales de l’entreprise.
    • Puis nous pouvons aussi envisager de soutenir des résolutions d’actionnaires déposées à l’initiative de tiers (NDLR : c’est-à-dire en creux, qu’elle ne prendra même pas la peine de déposer elle-même ces résolutions)
    • Et en fin de compte, si les différentes voies d’escalade sont épuisées et que nous constatons des progrès insuffisants dans le temps, nous pouvons décider de réduire ou de vendre nos positions (NDLR : mais là encore ce n’est pas une obligation)

Autant dire qu’il reste encore beaucoup de chemin à parcourir…..

Publié par Pierre-Yves GENET dans Non classé, 0 commentaire