Juridique

Articles concernant l’application des lois ou des solutions patrimoniales générales (donation, sociétés, régime matrimoniales, etc…)

La protection du cadre de vie des séniors

La protection du cadre de vie des séniors

Il est important d’anticiper la vulnérabilité qui pourra nous atteindre lorsque l’on avance en âge. 

Si nous attendons, le conjoint, le partenaire, le concubin survivant ou les héritiers devront alors passer par le juge pour gérer notre patrimoine, et tout ce qui a été mis en place pour que nous ou celui des deux qui survivra ayons des revenus supplémentaires; sera très probablement gelé par le juge des contentieux de la protection (ex-juge des tutelles). Ce dernier sécurisera, dans la plupart des cas, l’ensemble du patrimoine et limitera les possibilités de gestion des actifs.

Il est également important de permettre au conjoint survivant de conserver son lieu d’habitation quelques soit la composition de la famille et les relations entre ses membres.

C’est l’ensemble des ces points que nous allons aborder dans cet article.

1  Attachement aux résidences principales et secondaires

Le maintien au domicile est une attente très générale.

En effet, 75% des séniors souhaitent se maintenir dans leur logement ainsi que dans leur environnement immédiat (voisins, commerces, médecins, etc…) car ils y ont leurs habitudes.

Il est nécessaire de se poser et de faire un point sur ses objectifs et sur ses possibilités réelles. En effet certains souhaitent rester dans le même logement, d’autres acquérir un logement plus petit (62%) à proximité de leur logement actuel, d’autres envisagent la location voire la colocation, ou plus rarement un passage en résidence sénior à proximité mais sans avoir réellement envisagé les coûts de ces solutions.

Les questions à se poser sont :

  • Est-ce que mon habitat se prête à mon avancée en âge
    • Existence de marches ou d’étages,Adaptation des installations sanitaires (baignoire, douche avec marche, possibilité d’utiliser un fauteuil roulant, etc…)
    • Si le logement est en milieu rural ; existe-t-il des difficultés de transports pour se rendre dans les commerces, ou chez le médecin,
  • Est-ce que j’ai les moyens d’effectuer les travaux nécessaires pour adapter mon logement actuel,
  • Est-ce que j’ai les moyens de financer une résidence pour séniors,
  • Est-ce qu’il a, à proximité, des membres de ma famille pouvant venir m’aider en cas de besoin ?
  • Quelle est la proximité des relations sociales (amis, associations, club,…) ?
  • Quel est le coût du maintien à domicile :
    • Travaux (les locaux sont-ils adaptés à la personne âgée mais également à recevoir une personne devant aider le sénior : par exemple une chambre supplémentaire pour la garde de nuit)
    • Montant des charges fixes (énergie, assurances, taxes, charges de copropriété…)
    • Coût des transports
    • Coût des aides à domicile (Une garde de nuit coûte entre 150 à 200e la nuit, et l’accompagnement de jour de 12€à 14/h pour une personne en perte légère d’autonomie, 15 à 16/h pour une personne en situation de dépendance lourde et de 20 à 30de l’heure pour une personne en de dépendance totale)
    • Quels sont les revenus du couple mais également dans le futur du survivant (aura-t-il droit à une pension de réversion, devra-t-elle être partagée avec des ex époux(ses) ?)
    • Le coût d’entretien du logement sera-t-il supportable par le seul survivant et ensuite par les héritiers ?
  • Si le coût est trop important
    • La cession est-elle possible (existe-il déjà un démembrement)
      • Si démembrement, en cas de vente, me restera-t-il assez pour me reloger dignement, a-t-il été prévu une clause de remploi ou de quasi-usufruit sur le prix de vente ?
      • Les enfants nus-propriétaires :
        •  Accepteront-ils de céder le bien ?
        • De réinvestir avec les seniors dans un lieu qui leur convienne ?
    • Quel est ou sera l’état du marché au moment où l’état de vulnérabilité surviendra ?
  • Est-il réellement opportun de me maintenir dans mon logement
    • La maison prévue initialement pour une grande famille, n’est-elle pas trop grande pour une seule personne ?
    • La maison n’est-elle pas trop éloignée
      • de mes proches qui sont partis vivre ailleurs
      • de toutes les commodités
    • La conservation de la résidence secondaire est-elle légitime (oui pour des regroupements familiaux par exemple).
    • Si oui, l’indivision future est-elle envisageable ?

La partie de l’audit concernant l’adaptation du cadre de vie au grand âge peut être réalisée par un ergothérapeute. Certaines mairies ou conseils généraux offrent ce service gratuitement, sinon compter environ 300 pour cette intervention. Les retours d’expérience montrent qu’une première chute suivie d’une période d’immobilisation et de rééducation est souvent le facteur déclenchant de la mise en établissement surtout si la personne est seule ; avec malheureusement souvent un non-retour au domicile. Il faut donc éviter les tapis, les baignoires, les petites marches, …).

Une fois cette analyse, réalisée, il faut soit initier les mesures qui seront nécessaires (apport en société, donation, cession, etc…) soit rédiger avec un professionnel un mandat de protection future définissant les modalités de maintien au domicile et d’aménagement éventuel du cadre de vie.

La loi du 7 mars 2007  (entrée en vigueur le 01/01/2009) a prévu la protection du domicile de la personne vulnérable

L’article 425 du code civil définit le majeur protégé comme ayant des capacités mentales ou corporelles altérées au point d’empêcher l’expression de la volonté. Ce n’est pas le médecin de famille qui peut statuer sur cet état mais un médecin inscrit sur les listes auprès du tribunal.

L’article 426 du même code, envisage plus spécifiquement la protection du logement. Plus globalement, il définit le « cadre de vie » comme étant le logement, les effets personnels, les meubles, la résidence principale ou secondaire. Il indique ensuite que ce cadre de vie doit être conservé à disposition de la personne protégée aussi longtemps qu’il est possible.

Il précise que si le cadre de vie doit être quitté que ce soit par une vente du logement ou par la conclusion ou résiliation d’un bail, alors cela nécessite l’autorisation du juge ou du conseil de famille s’il a été constitué et que même dans ce cas, la décision du juge doit être motivée par un avis médical.

De plus si ce départ à pour but la mise en établissement spécialisée de la personne protégée, l’avis ne doit pas émaner d’un médecin dépendant de l’établissement de destination.

Dans tous les cas, les souvenirs, les objets à caractère personnel, ceux indispensables aux personnes handicapées ou destinés aux soins des personnes malades sont gardés à la disposition de l’intéressé.

Ces articles s’appliquent à tous les régimes de protection (conventionnel (mandat de protection future), mixte (habilitation familiale), ou juridique (curatelle, tutelle))

2 Introduction aux mesures de protection

Note :Se référer à notre article « La protection des personnes vulnérables » pour une présentation plus complète de nombreux dispositifs de protection qu’ils soient conventionnels, judiciaires, mixtes ou matrimoniaux

Le juge des contentieux de la protection est une autorité judiciaire chargée de décider des mesures de protection à mettre en œuvre pour la protection des majeurs incapables ou en situation de vulnérabilité.

Il est compétent pour

  • Examiner les situations individuelles,
  • Évaluer en se basant sur l’avis de médecins experts inscrits sur la liste du tribunal d’instance du lieu de résidence habituelle de la personne à protéger
  • Prononcer la mise en place des mesures de tutelle, curatelle, sauvegarde de justice et habilitation familiale

Il a donc vocation à protéger la personne vulnérable et aura souvent tendance à figer et sécuriser son patrimoine en arbitrant les placements sur des fonds sans risque, en bloquant les cessions, les donations et les apports de biens immobilier en SCI ou SARL de famille ; empêchant ainsi la mise en place de stratégies permettant à la fois de protéger le patrimoine du sénior et son cadre de vie tout en préparant sa transmission à ses enfants.

Avant d’entrer dans la description de ces dispositifs de protection, indiquons brièvement les types d’actes qui peuvent être réalisés par une personne.

On parle d’actes de disposition pour ceux qui engagent le patrimoine de la personne protégée, pour le présent ou l’avenir, par une modification importante de son contenu, une dépréciation significative de sa valeur en capital ou une altération durable des prérogatives de son titulaire. Il s’agira par exemple de la réalisation d’emprunt, l’achat ou la vente d’un bien immobilier, la souscription à une assurance vie, ….

On parle d’actes d’administration, lorsqu’il s’agit de gérer son patrimoine enen conservant sa valeur, en le faisant fructifier et en maintenant ses droits (par exemple la réalisation de travaux d’entretien de son domicile ou arbitrer des titres dans un portefeuille de type compte titre, pea, assurance ou contrat de capitalisation)

Les actes conservatoires sont ceux qui permettent de sauvegarder le patrimoine ou de soustraire un bien à un péril imminent ou à une dépréciation inévitable sans compromettre aucune prérogative du propriétaire. La pose d’une hypothèque est par essence un acte de disposition, mais s’il s’agit de protéger le domicile du seniors fasse au remboursement immédiat d’une créance, il pourra alors s’agir d’un acte conservatoire.

Enfin les actes strictement personnels sont ceux qui concernent la déclaration de naissance d’un enfant, sa reconnaissance, les actes de l’autorité parentale relatifs à la personne d’un enfant, la déclaration du choix ou du changement du nom d’un enfant et le consentement donné à sa propre adoption ou à celle de son enfant. Ces actes ne peuvent jamais donner lieu à assistance ou représentation de la personne protégée par un tuteur ou un curateur

La nuance est parfois étroite.

Par exemple un arbitrage entre deux fonds d’une assurance vie est généralement considéré comme un acte d’administration. Cependant, s’il porte sur une somme importante et si le fond destinataire de l’arbitrage présente un risque élevé, cet acte devient un acte de disposition car il peut conduire à une diminution significative du patrimoine.

A l’inverse la vente de titres détenus en direct (c’est-à-dire en dehors d’un compte titre ou d’un PEA) par la personne protégée est un acte de disposition, sauf si le montant de l’opération est faible par rapport au reste du patrimoine de la personne qui permettrait alors de le considérer comme un acte d’administration.

Aussi, le législateur a dans un décret du 22 décembre 2008 (n° 2008-1484 ) cf : https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000020017088,  définit une liste non exhaustive d’actes de disposition et d’administration en précisant ceux qui devront toujours être considérés comme des acte de disposition ou d’administration et ceux dont la nature dépendra des circonstances d’espèce

3 Les moyens de conservation du logement en pleine propriété

Le senior peut vouloir conserver la pleine propriété de son logement et le transmettre également en pleine propriété au survivant.

On trouve souvent cette situation dans des familles recomposées avec une mésentente entre les enfants du premier lit et le nouveau conjoint.

L’objectif est alors de conserver toute latitude pour vendre ou louer le bien et d’éviter toute indivision entre le survivant et les enfants de son conjoint, partenaire de PACS ou concubin prédécédé.

Ici encore, une anticipation tant juridique qu’économique est nécessaire. Juridique afin de préparer la transmission selon les souhaits des séniors ; économique car le survivant devra avoir les moyens financiers de ses volontés. Il pourrait en effet y avoir des soultes à verser aux héritiers.

Nous étudierons ci-après quelques moyen juridiques permettant de préparer la transmission en pleine propriété au survivant.

Rappel : Si on ne prépare rien et qu’il y a un partage judiciaire car les héritiers ne parviennent pas à se mettre d’accord, le choix des lots (hors droits préférentiels défini aux art 831 à 834 du code civil) se fait par tirage au sort.

3.1 Le legs par testament

Il est possible via un testament de léguer sa résidence principale ou secondaire en laissant le choix au survivant de choisir le mode de détention. On parle alors de legs alternatif.

Par exemple : « je veux que mon conjoint puisse jouir sa vie durant de la maison située à …. constituant actuellement notre résidence secondaire. Cette jouissance pourra s’exercer par le choix de la pleine propriété, de l’usufruit , du droit d’usage et d’habitation ou d’un prêt d’usage (commodat) »

Cette solution est envisageable pour les couples mariés et les partenaires de PACS puisqu’ils sont exonérés de droits de succession entre eux.

Elle est à proscrire pour les concubins car ils sont, eux, soumis à des droit au taux de 60 %, après un abattement de seulement 1 594 €.

Rappel  :

La résidence principale est protégée pour les couples mariés, pendant un an uniquement. C’est un droit matrimonial dont le conjoint ne peut jamais être privé. Ce droit d’un an existe également pour le partenaire de PACS survivant (art 515-6 al 3 du code civil) mais pas pour le concubin survivant.

Il existe également un droit viager au logement mais uniquement pour les couples mariés cette fois. Le droit viager n’est pas d’ordre public. Le survivant peut en être privé par un testament authentique (764 cc). De plus ce n’est pas un droit automatique comme le droit temporaire d’un an. C’est un droit testamentaire, et le survivant doit en exprimer le choix dans les 12 mois de l’ouverture de la succession. (cf paragraphe 4.2)

Attention avant de rédiger un tel testament, il faut vérifier que l’on en a bien les droits nécessaires sur le bien. Pour cela il est plus prudent de vérifier les titres de propriété afin de s’assurer de qui possède effectivement le bien (possibilité de réemploi de fond propres, construction sur terrain d’autrui, indivision, détention en propre, démembrement, etc…) et si le bien vient d’une donation vérifier s’il n’y a pas un droit de retour en cas de prédécès du donataire.

Second point de vigilance en présence d’héritiers réservataires, il faut vérifier que le bien ainsi transmis ne dépasse pas la quotité disponible. Si tel était le cas, une renonciation anticipée à l’action en retranchement pourrait être envisagée, mais dans les familles où règne une mésentente cela sera difficilement possible, ou une soulte leur sera due.

Note ; on pourrait aussi envisager d’une donation de biens présents entre époux mais cela présente deux désavantages. D’une part au niveau fiscal, la donation de biens présents entre époux est taxée au-delà d’un montant de 80 724€ alors que le legs ne l’est pas. Et d’autre part une donation, sauf ingratitude, n’est pas annulable ce qui pourrait être problématique en cas de divorce, alors qu’un testament peut lui toujours être résilié. Le cas de la donation au dernier vivant sera présenté au paragraphe 4.1.4

Le legs peut également être complété par plusieurs dispositifs que nous allons évoquer ci-dessous.

3.1.1  Le Changement de régime de pacs

Cette solution peut être intéressante lorsque les deux partenaires ont des revenus significativement différents et que l’un va financer une grande partie du bien.

Depuis 2006, les PACS sont par défaut soumis au régime de séparation de bien. Ainsi, si celui qui décède en premier est celui qui a financé la majeure partie du bien, alors la transmission par legs au survivant va certainement dépasser la quotité disponible.

Il est donc intéressant dans ce cas, avant l’acquisition du logement, d’opter pour le régime de l’indivision. Le changement de régime du PACS n’est pas un changement de régime matrimonial. Le mode de possession des biens déjà acquis n’est pas modifié, seuls les biens futurs seront concernés

L’art 515-5-1 prévoit alors que les biens acquis sont réputés indivis par moitié, sans recours de l’un des partenaires contre l’autre au titre d’une contribution inégale même si l’un en a financé 95%.

Il faut ici, privilégier une acquisition via un emprunt.

En effet l’art 515-2 du code civil limite la portée de cette solution lors de l’utilisation de fonds propres à l’un des partenaires (la part acquise à l’aide de fonds propres reste la propriété exclusive de celui qui l’a financée si une déclaration de réemploi a été faite dans l’acte d’acquisition ou s’il est créée une créance de restitution entre les partenaire).

Si le bien a déjà été acquis avant le changement de régime du PACS, alors l’apport en société pourra être envisagé (cf §4.4)

3.1.2  L’Attribution préférentielle du LOGEMENT

Le testament peut également prévoir une clause d’attribution préférentielle permettant de donner un bien particulier en priorité au survivant (ce n’est pas un préciput car il y a charge de verser une soulte si on dépasse la quotité disponible (QD)).

Pour les couples mariés, l’art 831-2 du code civil donne, au conjoint survivant, le droit d’attribution préférentiel du logement du couple au jour du décès ainsi que du mobilier le garnissant, et du véhicule du défunt dès lors que ce véhicule lui est nécessaire pour les besoins de la vie courante.

Pour les partenaires de PACS, , l’article 515-6 prévoit également cette même attribution préférentielle mais uniquement si le partenaire prédécédé l’a expressément prévu par testament.

 Les concubins n’y ont pas droit.

Le testament doit prévoir une attribution préférentielle du cadre de vie plus le legs. En effet s’il mentionne uniquement l’attribution préférentielle, celle ci ne s’imputera pas sur la quotité disponible et la soulte à verser aux héritiers par le survivant en sera d’autant plus importante.

Note : Lorsque le bien est détenu en indivision, plutôt que de faire un transfert à titre gratuit, on peut prévoir une convention d’indivision prévoyant une faculté d’acquisition par le survivant de la quote-part du de cujus. Cela permet d’éviter toute indivision avec les héritiers. Encore faut-il que le survivant en ait les moyens. La convention doit être notariée (art 1873-13 cc). C’est une option et le prix sera déterminé au moment de l’acquisition.

3.2 La tontine (clause d’accroissement)

La tontine (ou clause d’accroissement) est une clause incluse dans un contrat d’acquisition à plusieurs qui prévoit qu’en cas de décès d’un des cotitulaires, la part du défunt revient automatiquement aux autres cotitulaires survivants, et ce, sans qu’elle fasse partie de sa succession.

Depuis 1980, l’administration fiscale (art 754 du CGI) considère que le bien est réputé transmis à titre gratuit à chacun des bénéficiaires de l’accroissement dès lors que le bien a une valeur dépassant 76 000 € et qu’il n’est pas la résidence principale commune des deux coacquéreurs. Ainsi s’il s’agit de concubins, le survivant sera soumis à des droits de mutation à hauteur de 60 %.

Cette technique sera donc réservée aux couples mariés et aux partenaires de PACS.

Elle a cependant perdu de son intérêt fiscal depuis la loi TEPA avec l’exonération de droits de succession pour le conjoint ou le partenaire de PACS survivant.

Elle conserve pourtant un intérêt civil pour les cas où règne la mésentente familiale car elle permet le cas échéant de « contourner » les règles de la réserve héréditaire et évite les requalifications du contrat en libéralités donnant un maximum de protection au conjoint survivant en lui accordant la possession exclusive du bien en pleine propriété.

Si le bien a déjà été acquis, il faut alors apporter le bien à une société (SCI par exemple) et reporter la tontine sur les parts de la société.

Il faut toutefois prendre quelques précautions :

  • Il faut qu’il y ait une inconnue sur qui va mourir en premier. Il faut donc des conjoints d’âges similaires, sans que l’un ait des problèmes de santé connus réduisant son espérance de vie par rapport à l’autre. Les héritiers ne peuvent agir contre la tontine que si l’aléa n’est pas respecté
  • L’acquisition doit être réalisée dans des proportions équivalentes (max 55/45) ou prenant en compte l’écart d’espérance de vie des co-contractants.
  • Si les deux conditions ci-dessus ne sont pas respectées, il y aura possibilité pour les héritiers de requalifier la clause en donation déguisée qui sera alors rapportable à la succession et réductible au titre de l’article 843 du code civil.
  • Le recours à la technique de la tontine devra s’accompagner d’une vérification, d’une part, de la possibilité de mise en œuvre dans un contexte international et, d’autre part, de la fiscalité applicable.

Pour plus de détail sur le pacte tontinier, se référer à notre article dédié sur https://www.linkedin.com/pulse/connaissez-vous-la-tontine-pierre-yves-genet/?trackingId=%2FGzkLLbeQRShwdhxCETBfw%3D%3D

Attention la tontine peut également être un piège en cas de divorce. Il faut pour y renoncer, l’unanimité des cotitulaires.

3.3 Les avantages matrimoniaux (pour les COUPLES mariés UNIQUEMENT)

Il s’agit ici d’aménager le régime matrimonial des époux afin de favoriser le conjoint survivant par rapport aux autres héritiers, sur un bien qui serait un propre à l’un des époux ou des biens communs. D’ailleurs l’avantage matrimonial ne peut porter que sur des biens communs. Si le bien appartient en propre à l’un des époux, ou si les époux sont mariés sous un régime séparatiste, il faudra donc tout d’abord rendre le bien commun.

L’aménagement passe obligatoirement par un acte devant notaire qui décidera s’il est nécessaire ou non de liquider l’ancien régime (et donc du coût de l’opération). Depuis le 25/03/2019, le changement de régime peut être réaliser à tout moment (n’y a plus de délais de 2 ans entre 2 aménagements ou depuis le mariage) et il n’y a plus judiciarisation systématique des aménagements. C’est à dire plus d’homologation systématique de l’acte par un juge aux affaires familiales en présence d’enfants mineurs, sauf si le notaire juge que le changement leur est préjudiciable.

Les enfants majeurs sont informés par recommandé avec accusé de réception et les tiers par annonces légales (durée d’opposition de 3 mois à la plus tardives des deux dates (enfants ou tiers))

En présence uniquement d’enfants communs, il n’y aucune restrictions aux aménagements. Les enfants ne sont donc, dans ce cas, plus protégés car le survivant aura tous les droits et donc celui de tout dépenser. Ils n’auront donc aucune réserve au premier décès.

En présence d’enfant d’un autre lit, il existe une action en retranchement permettant à ces enfants de protéger leur réserve héréditaire (art 1527 du code civil alinéa 2). Cette action en retranchement n’est ouverte qu’aux enfants d’un autre lit, mais si elle est déclenchée, elle profite aussi aux enfants communs.

Il est possible s’il y a une bonne entente familiale de s’en protéger en faisant signer, devant notaire, à ces héritiers, une renonciation anticipée à l’action en retranchement (RAAR).

Enfin, toujours s’il y a des enfants d’une précédente union, il est également possible d’envisager une adoption de l’enfant du conjoint s’il existe plus de 10 ans entre l’enfant du conjoint et l’adoptant (sauf cas très particuliers nécessitant l’autorisation du tribunal)  pour permettre tous les aménagements matrimoniaux.

  • L’adoption sera simple si l’enfant est majeur.
  • Elle est dite plénière si l’enfant est mineur.
  • Dans les deux cas l’adopté est héritier réservataire de ses parents (mais dans le cas de l’adoption simple, son droit de représentation en cas de prédécès de l’adoptant peut lui être retiré par ses grands-parents de la ligne adoptive).
  • Au niveau des droits de succession, l’adopté « pleinier » a droit sans condition aux abattements en ligne directe. L’adopté « simple » doit lui avoir la capacité de démontrer   qu’il a reçu des soins non interrompus par l’adoptant pendant 5 ans durant sa minorité ou 10 ans pendant sa minorité et sa majorité pour bénéficier de cet abattement

Attention également au fait qu’en cas de divorce le lien d’adoption perdure avec les obligations alimentaires qui en découlent.

NOTE : Le notaire ne peut refuser d’instrumenter l’aménagement que si

  • Il est impliqué (cas d’un acte de sa famille)
  • Si l’acte est contraire aux bonnes mœurs
  • S’il n’a pas le prix de l’acte en comptabilité
  • S’il estime qu’il y a dol ou que le consentement de l’une des parties est vicié

Le client peut donc obliger le notaire à instrumenter un aménagement même si ce dernier le juge non opportun. Le notaire se protégera en indiquant dans l’acte toutes les conséquences de cet aménagement. Nous allons maintenant étudier les aménagements possibles.

3.3.1  Le préciput

Le préciput est une clause insérée dans le contrat de mariage prévoyant que le survivant des époux, ou l’un d’eux s’il survit, sera autorisé à prélever sur la communauté, avant tout partage, soit une certaine somme, soit certains biens en nature (art 1515 du code civil).

L’article 1516, précise que le préciput ne doit pas être regardé comme une donation. Il est donc non réductible et non rapportable en présence uniquement d’enfants communs.

Le préciput est une option, une faculté mais en aucun cas une obligation.

Le prélèvement étant fait avant la liquidation du régime matrimonial, il n’en est pas tenu compte dans l’établissement de la masse commune et donc dans la masse successorale du défunt. Le bien peut donc être transmis en pleine propriété au conjoint survivant sans entacher la quotité disponible en présence uniquement d’enfants communs.

 S’il y a des enfants d’un autre lit, ils auront une possibilité d’action en retranchement si leur réserve est attaquée.

Le préciput peut être en pleine propriété ou en démembrement. Il peut être commun ou unilatéral (il n’y a qu’un des deux conjoints qui peut bénéficier du préciput)

On peut aussi prévoir un prélèvement avec indemnité dans le cas d’une famille recomposée

Le préciput est une clause de prélèvement avant partage mais il arrive que les services de l’enregistrement prennent, à tort nous semble-t-il, les frais de partage à 2.5% . Plusieurs jurisprudences de 2023 ont donné raison aux contribuables en exigeant le remboursement des 2.5% mais cette jurisprudence n’est pas encore reprise au BOFIP. Pour les conseillers : penser à rédiger un avis de conseil donné si le client ne veut pas payer les 2.5%.

En cas de divorce, l’art 265 al 2 du code civile prévoit que « Le divorce emporte révocation de plein droit des avantages matrimoniaux qui ne prennent effet qu’à la dissolution du régime matrimonial ou au décès de l’un des époux et des dispositions à cause de mort, accordés par un époux envers son conjoint par contrat de mariage ou pendant l’union, sauf volonté contraire de l’époux qui les a consentis. »

3.3.2  L’ameublissement des lieux de vie

L’ameublissement consiste à rendre commun un immeuble indivis ou qui appartenait en propre à un seul des époux.

La clause d’ameublissement peut être accompagnée de la clause dite « alsacienne » permettant un retour au propriétaire initial en cas de divorce.

3.3.2.1 La communauté universelle

C’est l’artillerie lourde.

Il s’agit ici, en effet, d’étendre la masse commune en faisant rentrer TOUS les biens des époux dans la communauté universelle (1526 cc). Il est nécessaire de prévoir également une clause de préciput sur certains biens ou d’attribution intégrale afin de transmettre le ou les biens au survivant.

Cela à un cout pour les biens immobiliers :

  • La taxe de publicité foncière soit 0.715% sur 50% de la valeur du bien
  • Plus 0.1% de sécurité immobilière sur 100% de la valeur du bien

Il est prudent de prévoir une clause de reprise des apports en cas de divorce (art 265cc al 3). Sans cette clause il y aura partage du bien propre apporté car « Le divorce est sans incidence sur les avantages matrimoniaux qui prennent effet au cours du mariage et sur les donations de biens présents quelle que soit leur forme. »

3.3.2.2     La société d’acquêts (régimes séparatistes)

Dans un régime séparatif, pour ameublir un bien, il sera nécessaire de créer d’abord une société d’acquêts (Cass civ 20/11/2017 n°16-29056) et y apporter le ou les biens qui étaient propres à l’un des époux ou en indivision et également de prévoir un préciput sur ce bien.

Cet apport à un coût :

  •  Si bien indivisaire :
    • si achat à quotité équivalente par les deux indivisaire (50/50) => droit fixe de 125€ car on ne change pas la proportion de détention du bien + 0.1% de sécurité immobilière sur la totalité
    • si autre répartition : 0.715% sur la moitié de la différence + 0.1% sur la totalité
  • Si bien propre :
    • 0.715% sur la totalité + 0.1% sur 100%

Note : Il ne faut pas mettre l’adresse du bien dans le contrat ou alors prévoir une subrogation en cas de changement du domicile.

4 Les alternatives à la pleine propriété 

4.1 Le démembrement du cadre de vie

Il est possible pour le senior de ne conserver que l’usufruit du bien et de transmettre ou non un usufruit successif à son conjoint.

Plusieurs intérêts :

  • L’usufruitier conserve le droit d’utiliser et de louer le bien
  • Le nu-propriétaire, supposé ici héritier, paye moins de droits puisque ceux-ci ne sont calculés que sur la seule valeur de la nue-propriété, déterminée selon l’âge du donateur, conformément à l’art 669 du CGI.
  • Les charges d’entretien et de réparation et la taxe foncière sont normalement à la charge de l’usufruitier et les gros travaux à charge du nu propriétaires selon les articles 605 et 606 du code civil.
  • Mais ces deux articles ne sont pas d’ordre public, on peut donc y déroger conventionnellement. Il faut cependant faire attention au fait que dans le temps les enfants puissent devenir plus riches et que les parents voient leurs revenus baisser. Il est ainsi possible d’anticiper la vulnérabilité du donataire en prévoyant que ce dernier sera en charge de tous les travaux jusqu’à ses 70 ans par exemple, puis de diminuer sa participation régulièrement en fonction de son âge ou de son état de santé (en prévoyant par exemple des taux de prise en charge en fonction de sa qualification GIR). (Note : Le GIR (groupe iso-ressources) correspond au niveau de perte d’autonomie d’une personne âgée. Il est calculé à partir de l’évaluation effectuée à l’aide de la grille AGGIR. Il existe six GIR : le GIR 1 est le niveau de perte d’autonomie le plus fort et le GIR 6 le plus faible.)
  • L’usufruitier peut dans la donation se réserver également le droit, passé un certain âge ou sous d’autres conditions objectives, de demander que son usufruit soit converti en rente selon une convention entre les parties. (Attention ce n’est pas l’application de l’article 759 du CC qui permet la conversion sur demande du conjoints possédant l’usufruit ou d’une des héritiers nus propriétaires et qui est d’ordre public et ne peut pas être refusé par celui qui transmet l’usufruit. Ce n’est pas non plus le 761 du CC qui permet la conversion de l’usufruit du conjoint en capital, cette fois, avec accord entre le conjoints et les héritiers)

Il faut faire attention au fait que si l’usufruitier n’est pas en mesure de remplir ses obligations, le nu-propriétaire peut demander au juge de supprimer le démembrement (l’inverse n’est pas prévu par la loi) et ainsi de priver l’usufruitier de rester dans son cadre de vie (art 618 du cc)

Le démembrement peut avoir lieu par une donation de biens présents au cours du mariage (ce qui est irrévocable), par testament ou par une donation entre époux qui nécessite d’aménager le régime matrimonial. Ces deux dernières solutions étant révocables.

Le legs ou la donation de biens présents peuvent intervenir entre époux, entre partenaire de PACS ou entre concubin (attentions aux droits de transmission à 60% dans ce dernier cas)

NOTE : Pour les PACS, il est important de vérifier l’acte de naissance des seniors afin de connaitre la date du pacs, le régimes choisi et les éventuels changements de régimes. En cas de changement de régime, il n’y a pas d’effet rétroactif, il faut donc connaitre les dates d’acquisition des biens pour connaitre leur mode réel de détention.

  • Avant 2006 : présomption de l’indivision des acquêts. Même si l’un des pacsés achète seul un bien et ne fait pas de clause de remploi de fond propre, il y a présomption de possession à 2 du bien.
  • A partir de janvier 2006 : présomption de séparation mais possibilité d’opté pour le régime d’indivision.

Il existe différentes variantes à ce démembrement.

Le donateur peut se réserver soit l’usufruit, soit le droit d’usage et d’habitation soit même un usufruit temporaire suivi d’un droit d’habitation avec ou sans usufruit successif.

Si le conjoint survivant bénéficiant de l’usufruit successif est très jeune par rapport au donateur, les héritiers nus-propriétaires peuvent demander, dans les deux ans du décès du premier usufruitier, le remboursement du trop-perçu lors de la donation ou de la première succession (car l’usufruit en second sera plus long que le premier sur lequel a été basé les droits de transmission à titre gratuit).

4.1.1     Cas de la vente de la nue-propriété a un tiers ou vente à prix ajusté

Pour conserver son cadre de vie, un sénior peut décider, non pas de transmettre à titre gratuit la nue-propriété mais de vendre son bien à un tiers en conservant un usufruit viager ou temporaire calé sur l’espérance de vie. Ce sera souvent un institutionnel qui réalisera l’achat.

Cette solution se pose comme une alternative à la vente en viager, avec une ambition : écarter les réticences des candidats au viager, liées aux effets désagréables d’un décès prématuré pour le vendeur. Elle a été fort bien décrite dans « Le prix de vente Ajusté, Jean Aulagnier, 11/07/2023 »

Pour prévenir le cas où l’usufruitier survivrait bien au-delà de son espérance de vie théorique, il faut prévoir dans l’acte de cession, un droit d’usage et d’habitation à la fin de l’usufruit temporaire.

Etape 1 : vente de la nue-propriété avec une clause dans l’acte indiquant le versement d’un complément de prix aux héritiers en cas de décès prématuré du vendeur correspondant à la valeur de l’usufruit temporaire non consommé. La convention prévoit alors un usufruit temporaire suivi d’un droit d’usage et d’habitation. La durée de l’usufruit temporaire conservé par le vendeur est prévue contractuellement et correspond à une durée d’occupation théorique, fixée en fonction de l’âge du vendeur. et basée généralement sur la durée de vie probable calculée à partir des tables de mortalité de l’INSEE. Cette durée d’usage permet de calculer le prix de vente de la nue-propriété en déduisant de la valeur vénale du bien la valeur de l’usufruit temporaire, évaluée en valeur économique en appliquant la méthode d’actualisation des flux de loyers nets sur la durée de l’usufruit. Le vendeur senior perçoit, ainsi, immédiatement un capital. A la fin de l’usufruit temporaire, la continuité d’occupation est garantie à vie au vendeur grâce à la conservation d’un droit d’usage et d’habitation à vie, consécutif à l’usufruit temporaire réservé. Quoi qu’il arrive, le vendeur est ainsi assuré de rester chez lui jusqu’à la fin de sa vie sachant que les droits réservés (usufruit temporaire suivi d’un droit d’usage et d’habitation à vie) peuvent l’être au profit des deux membres du couple lorsqu’il s’agit de seniors mariés ou pacsés

Etape 2 : souscription par le vendeur d’un contrat d’assurance vie au bénéfice de l’acheteur pour le cas où le vendeur serait encore en vie à la fin de l’usufruit temporaire afin de dédommager l’acheteur par le versement d’une rente tant que le vendeur occupe les locaux au-delà de la durée de l’usufruit temporaire.

Etape 3 : La convention prévoit qu’à tout moment le vendeur peut décider de ne plus occuper le bien et de renoncer à son droit d’usage et d’habitation L’acheteur récupère alors le logement et en informe l’assureur. La rente est alors versée au vendeur jusqu’à son décès.

Etape 4 : Si la durée d’occupation du bien par le vendeur est inférieure à la durée de l’usufruit temporaire pour cause de décès prématuré, il est stipulé une compensation financière revenant aux héritiers du vendeur. L’acquéreur nu-propriétaire verse un complément de prix aux héritiers du vendeur en contrepartie du fait de devenir plein propriétaire du bien plus tôt que prévu. Le montant de ce complément est précisé dans l’acte notarié, décroissant d’année en année. Ce complément de prix permet de protéger le patrimoine familial du vendeur et l’acquéreur n’est pas pris au dépourvu puisqu’il sait dès l’origine ce qu’il aura, le cas échéant, à payer s’il devenait plein propriétaire plus tôt que prévu. Il pourra pour ce faire mobiliser un financement bancaire (puisqu’il sera plein propriétaire), revendre le bien (il bénéficie de temps pour cela) ou mobiliser ses fonds propres. De son côté, la succession bénéficie des garanties précisées dans l’acte notarié, quant au fait que l’acquéreur honorera son engagement de verser le complément de prix convenu

Toute la difficulté de ce montage réside dans la juste estimation du montant que doit placer le vendeur sur le contrat d’assurance-vie, afin d’assurer une rente acceptable à l’acheteur en cas de très longue vie et au complément de prix à payer en cas de décès prématuré.

4.1.2     Cession à titre onéreux de la nue-propriété aux héritiers

Il n’y a plus cette fois ni donation, ni legs mais les enfants décident d’acheter la nue-propriété.

L’intérêt de cette solution est de contourner le barème d’évaluation de la nue-propriété et de l’usufruit prévu à l’article 669 du CGI car on peut utiliser cette fois une évaluation économique de la nue-propriété.

Présomption fiscale : Il faut faire attention à l’article 751 du CGI qui prévoit une présomption d’appartenance à la succession de l’usufruit si l’héritier est le nu-propriétaire => Pour cela il faut justifier dans l’acte la réalité du paiement de la nue-propriété car la présomption prévue à l’art. 751 est une présomption simple qui peut être contrer par la preuve contraire.

A noter également que cette présomption ne joue pas si le cédant s’est réservé le droit d’usage et non l’usufruit ou si le droit a été acquis par une société civile (ou si la nue-propriété est issue d’une donation régulière faite plus de 3 mois avant le décès, mais ce n’est pas le cas traité ici).

Présomption civile : Attention, la présomption de l’article 918 du code civil est plus embêtante car elle est irréfragable (c’est-à-dire que l’on ne peut pas apporter la preuve contraire). Cet article prévoit que si l’un des héritiers en ligne direct est nu-propriétaire, alors au moment de la succession il y a un présomption irréfragable qu’il y a eu donation hors part successorale. On devrait donc rapporter la valeur du bien en pleine propriété et si cela dépasse la quotité disponible, le nu-propriétaire devra une soulte aux autres héritiers. Pour éviter cette présomption, il faut faire intervenir au moment de l’acquisition (attention : ce n’est pas possible au moment de la succession ni par un acte qui serait fait entre l’achat et la succession), les frères et sœurs pour qu’ils renoncent de manière anticipée à l’application du 918 (ce qui est généralement le cas lors d’une donation-partage, le 918 ne trouvant principalement à s’appliquer que lorsqu’un seul des héritiers en ligne direct est gratifié). Le 918 ne s’applique pas non plus si on interpose une SCI ou si le parent se réserve un droit d’usage et d’habitations et non un usufruit. C’est une présomption irréfragable, si cela n’est pas prévu dans l’acte d’achat cette présomption sera obligatoirement appliquée par le notaire même si les frères et sœurs n’en demandent pas l’application.

4.1.3     Cas d’exonération de plus value

La résidence principale est exonérée de plus-value.

Mais que se passe-t-il si la vente a lieu après que la personne est partie en établissement de soins ?

L’art. 150 U du CGI ( au II.1 ter) exonère sous conditions, le bien qui a constitué la résidence principale de son propriétaire avant son entrée dans un établissement social ou médico-social.

Condition 1 : Le bien doit avoir constitué la résidence habituelle et effective de la personne. Il doit être détenu soit en direct par la personne soit par une société transparente dont il est associé. Dans ce dernier cas, l’exonération porte sur la fraction de l’immeuble occupé à titre de résidence principale par l’associé et la quote-part revenant à cet associé.

Condition 2 : Pour ouvrir droit au bénéfice de l’exonération, l’ancienne résidence principale du cédant ne doit avoir fait l’objet d’aucune occupation depuis que le bien a cessé de constituer sa résidence principale. Par suite, le logement doit rester inoccupé : il ne doit être ni loué ni mis à la disposition gratuite d’un tiers, y compris pour une courte période.

L’exonération n’est pas remise en cause lorsque les membres du foyer fiscal du cédant (conjoint ou personnes à charge) ou son concubin, qui résidaient dans le logement au jour de son départ, ont continué à occuper le logement alors même que le cédant n’y réside plus.

Condition 3 : L’occupation du logement à quelque titre que ce soit, par toute autre personne, entraîne la remise en cause de l’exonération.

Condition 4 : Pour bénéficier de l’exonération, le cédant doit être domicilié fiscalement en France et résider dans un établissement destiné à accueillir des personnes âgées ou handicapées (EHPAD, foyers de vie,  foyers d’accueil médicalisé, maisons d’accueil spécialisées.

Condition 5 : La personne ne doit pas être redevable de l’IFI au titre de l’avant dernière année précédent la vente (il peut l’être avant ou après mais pas en N-2)

Condition 6 : Le revenu fiscal de référence de la personne ne doit pas dépasser, au titre de l’année N-2, le plafond défini au II de l’article 1417 du CGI (en 2024 :  29 288e pour la première part majorée de 6 843 pour la première demi-part supplémentaire et de 5 387€ pour les suivantes. Pour la Martinique, la Réunion, et la Guadeloupe ces montants sont portés respectivement à 35 395€, 7 508 et 7 159€ pour la 2e demi part et 5 387e pour les suivantes, Pour la Guyane et Mayotte les montant €sont fixés à 38 790, 7508e pour les 2 premières demi-parts, 6 392 pour la 3e et 5 387 pour les suivantes)

Condition 7 : La cession doit intervenir dans un délai inférieur à deux ans suivant l’entrée dans cet établissement

Rappel : Il est aussi possible d’obtenir une exonération pour la vente d’un autre bien que la résidence principale aux conditions que

  • La somme soit réemployée dans les 2 ans pour la construction ou l’acquisition d’une nouvelle résidence principale
  • Que la personne n’ai pas été propriétaire directement ou indirectement d’un autre logement qui lui aurait servi de résidence principale dans les 4 années précédant la cession
  • Cette exonération ne peut être obtenue qu’une fois dans sa vie
  • Voir BOI-RFPI-PVI-10-40-30 pour plus de détails

4.1.4 Le cantonnement

Le cantonnement permet au conjoint survivant ou au légataire de limiter le bénéfice de la transmission à une partie des biens auxquels il pourrait prétendre. Le reste étant alors transmis aux autres héritiers.

Le cantonnement est possible soit pour les couples mariés par une donation entre époux conformément à l’article 1094-1 du code civil soit par un testament (par une clause du type « Je lègue à ……, mon appartement situé à ………. En pleine propriété ainsi que les meubles qui le garnissent. …. Pourra éventuellement cantonner cette libéralité au seul usufruit voir au seul droit d’usage ou même en limiter l’étendue dans le temps. Dans le cas de l’exercice de ce cantonnement, les droits non retenus reviendront à …… »).

En fait, seule la dévolution légale ne permet pas le cantonnement.

Pour rappel, la donation entre époux ou encore donation au dernier vivant, prévue à l’art 1094-1 du code civile, permet au survivant de choisir (sauf mention contraire dans la donation ou dans un testament) soit la totalité de la masse successorale en usufruit, soit de la quotité disponible, soit de ¼ en pleine propriété plus les trois autres quarts en usufruits soit d’une liberté de cantonner son émolument.

Attention pour les donations entre époux enregistrées avant 2006, la donation entre époux ne permettait pas le cantonnement. Si le senior veut en profiter, il faut en refaire une nouvelle.

4.2 Droit sur le logement du conjoint survivant

Il s’agit ici de rappeler les droits du conjoint et dans une certaine limite du partenaire de PACS sur le domicile commun.

Droit temporaire d’une année après le décès (art. 763 du CC)

  • Ce droit est d’ordre public. On ne peut donc pas en priver le survivant
    • Pour y avoir droit, le survivant doit vivre avec le défunt au moment de son décès
    • Il porte sur le logement ainsi que sur le mobilier, compris dans la succession, qui le garnit, que ce logement soit la propriété exclusive du défunt, ou qu’il soit détenu en communauté ou en indivision où qu’il s’agisse d’une location ou d’une jouissance à titre gratuit d’une indivision.
    • Ce droit s’exerce gratuitement => S’il y a loyer, ou indemnité d’occupation et/ou des charges de copropriété c’est la succession qui doit payer pendant l’année (c’est un passif de succession).
    • Ce droit est aussi applicable pour le partenaire de PACS survivant (art 515-6 al 3) mais n’est pas dans ce cas d’ordre public (le défunt peut l’en priver par un testament même olographe)
  • Au-delà de cette année, on passe pour les couples mariés au droit viager d’habitation Art 764 cc (attention, les Pacsés n’en bénéficient pas).
    • Le défunt peut refuser ce droit au conjoint survivant
    • L’option du droit viager peut être intéressant pour le conjoint survivant s’il n’y a pas eu de donation entre époux et s’il y a un enfant d’un autre lit qui ne lui aurait permis de n’avoir qu’un quart en PP avec les risques liés à l’indivision.
    • Le conjoint survivant doit en faire la demande dans les 12 mois suivant l’ouverture de la succession
    • Ce droit d’usage et d’habitation est valorisé à 60% de la part en usufruit (ex si survivant à 75 ans au moment du décès, usufruit de 30% donc droit viager égal à 18%)
    • Art. 765 cc : le droit viager s’impute sur les droits du survivant mais si le droit viager dépasse ce droit, le survivant n’est pas tenu à récompense aux autres héritiers.
    • ATTENTION : Le droit d’usage et d’habitation ne permet habituellement pas la mise en location du bien mais pour le conjoint le dernier alinéa de l’article 764 du code civile stipule que  « Par dérogation aux articles 631 et 634, lorsque la situation du conjoint fait que le logement grevé du droit d’habitation n’est plus adapté à ses besoins, le conjoint ou son représentant peut le louer à usage autre que commercial ou agricole afin de dégager les ressources nécessaires à de nouvelles conditions d’hébergement. » => De ce fait, le conjoint survivant pourra mettre le logement en location pour partir par exemple en EHPAD ou en résidence sénior. C’est le conjoint lui-même qui juge que le logement n’est plus adapté (par exemple difficile d’accès, trop vaste, trop excentré, ne permettant pas l’accueil d’un garde malade, etc…)

4.3 Le commodat

C’est un contrat, prévu à l’article 1875 du code civil, par lequel l’une des parties livre une chose à l’autre pour s’en servir à la charge de le rendre après s’en être servi.

Ce prêt est essentiellement gratuit et engage les héritiers du prêteur comme de l’emprunteur sur la durée convenue (sauf convention contraire prévue au 2e alinéa de l’article 1879 du cc) en cas de décès de l’emprunteur.

C’est donc un moyen de garantir la disposition du lieu de vie au concubin survivant qui pourra ainsi demeurer dans les lieux « prêtés » pour une durée choisie (par exemple jusqu’à son décès), sans droits de mutation ni opposition possible des éventuels autres héritiers. (la cour de Cassation a d’ailleurs statué le 1/10/2017 (n°16-21419) sur le cas d’héritiers attaquant un commodat en prétendant qu’il s’agissait en fait d’une donation indirecte. Elle les a déboutés en rappelant que le commodat n’étant qu’un droit d’usage et d’habitation, il n’entrainait donc aucun transfert de droits patrimoniaux, de fruits ou de revenus de sorte qu’il n’en résultait aucun appauvrissement pour le prêteur, et qu’il ne pouvait donc en aucun cas s’agir d’une donation).

NOTE : Attention toutefois, le prêteur peut lui décider que la valeur des loyers non versés par l’emprunteur (plutôt dans le cas d’un commodat mis en place du vivant du préteur et non après son décès) soit rapportable lors de sa succession. Ainsi la Cour de cassation dans son arrêt du 19 mars 2014 (n° 13-14.139) a décidé que si le prêteur avait expressément manifesté une intention libérale (dans un testament par exemple) de constituer un avantage pour l’un des héritiers en mettant en place le commodat, alors l’emprunteur devra rapporter à la succession une somme correspondant à l’avantage indirect consenti (dans ce cas d’espèce , le testament, même révoqué avant le décès , a constitué un élément de preuve déterminant de l’intention libérale)

L’emprunteur doit veiller à conserver la chose prêtée qu’il devra rendre dans le même état au terme convenu.

Le prêteur puis ses héritiers restent propriétaires du bien. Ils restent donc tenus des gros travaux et restent redevables de l’IFI sur le bien prêté.

L’emprunteur est tenu des dépenses d’assurance et d’entretien. Toutefois si, pour user de la chose, il engage des dépenses, il ne peut pas la répéter (art 1886). Voir cependant https://www.actu-juridique.fr/civil/exclusion-de-la-repetition-des-depenses-ordinaires-engagees-par-lemprunteur-dans-le-contrat-de-pret-a-usage/ sur ce point (Cass. 1re civ., 13 juill. 2016, no 15-10474,)

ATTENTION : Le prêt à usage n’est pas considéré comme un contrat de location, Il rentre donc dans le cadre du point II de l’article 15 du CGI qui prévoit que les mises à disposition à titre gratuit d’immeuble n’ouvrent pas droit à impôt, mais en retour que le propriétaire ne peut pas déduire le coût des gros travaux qu’il pourrait engager (sauf cas exceptionnel des monuments historiques)

4.4 La détention sociétaire

Il s’agit ici d’acquérir un logement via une société ou d’y apporter un bien immobilier déjà détenu par le ou les seniors.

Cette solution peut s’adresser aussi bien aux couples mariés, qu’aux partenaires de PACS et aux concubins et permet également de traiter les stratégies présentées aux paragraphes précédents lorsque de bien est déjà détenu par les séniors avant la mise en place des solutions proposées.

Le but est principalement d’éviter les règles de gestion des biens indivis et de pouvoir commencer à transmettre tout en gardant le pouvoir sur les biens dans leur gestion et la capacité pour les séniors de les vendre et d’en racheter d’autres.

Les statuts de sociétés comme les SCI permettent en effet beaucoup de latitudes sur les pouvoirs des gérants.

  • Notamment en les partageant entre les 2 époux, partenaires ou concubins.  
  • De même le dernier alinéa de l’article 1844 prévoit un exercice conventionnel du droit de vote entre l’usufruitier et le nu-propriétaire ce qui permet de donner des droits élargis aux usufruitiers (les seules limitations étant que les nus-propriétaires puissent toujours participer aux assemblées même si on peut les priver totalement de droits de vote à l’exception des décisions pour lesquelles les statuts ou la loi imposent l’unanimité des associés car c’est le nu-propriétaire qui est l’associé)

Note sur la notion d’unanimité des associés :

  • L’article 1852 du code civil prévoit que dans une société civile, « Les décisions qui excèdent les pouvoirs reconnus aux gérants sont prises selon les dispositions statutaires ou, en l’absence de telles dispositions, à l’unanimité des associés. »
  • La cour de cassation (cass civ du 03/01/2022 n° 20-17.428) a rappelé que ce texte ne réduisait pas seulement l’ « unanimité à celle des associés présents ou représentés à une assemblée générale, mais visait la totalité des associés de la société » *
  • Les statuts devront donc être « bavards » afin soit de donner un maximum de pouvoir aux gérants (ce qui n’est pas toujours souhaitable) soit définir les règles d’adoption des décisions ne figurant pas par exemple dans l’objet social. Par exemple en renvoyant à une assemblée extraordinaire définissant elle-même une règle de majorité aux seuls présents ou à un quorum plus faible que l’unanimité des associés.
  • Ceci est d’autant plus vrai, qu’avec une personne vulnérable parmi les associés, le refus du juge de permettre la cession d’un actif immobilisé (acte de disposition) pourrait bloquer l’opération même avec une minorité de voix si la règle de l’unanimité des associés trouvait à s’appliquer faute d’avoir prévu le cas dans les statuts.

Les époux gérants pourront seuls céder tout ou partie des biens et droits possédés par la société, à la double condition que :

  • Le pouvoir d’arbitrage et de cession de ces biens figurent clairement dans l’objet social (gérer par exemple ne suffit pas pour les cessions, l’objet doit bien comprendre les mots « céder », « échanger », et « acquérir »)
  • Que les statuts ne stipulent pas de limites à l’exercice de ces droits.

La société permet également d’anticiper la vulnérabilité éventuelle de l’un ou des deux époux, partenaires ou concubins :

  • Si l’un des associés gérants devient incapable, il ne peut plus rester gérant mais le second associé gérant peut continuer à gérer et faire ce qui est prévu à l’objet social sans avoir à passer par le juge.
  • Il n’est pas possible de nommer des gérants successifs dans les statuts (mêmes si certains greffes l’acceptent parfois), mais ceux-ci peuvent prévoir qu’en cas d’incapacité des deux gérants, une assemblée générale soit provoquée pour l’élection d’un ou plusieurs gérants en remplacement, même si ces derniers étaient initialement nommés à vie.
  • Pour la mise en place d’un mandat de protection future en cas de vulnérabilité du gérant voir l’article: https://revuefiduciaire.grouperf.com/article/3759/hb/20180604101520576.html. Pour rappel le mandataire ne peut en aucun cas représenter le gérant dans ses fonctions statutaires mais il peut le représenter s’il est associé ou usufruitier dans ses droits de vote.

En plus des intérêts civils présentés ci-dessus, l’interposition d’une société présente également un intérêt fiscal si le bien est acquis à l’aide d’un emprunt. En effet, en temps normal, la donation d’un bien avec charge (l’emprunt dans notre cas) n’est pas déductible du montant transmis sur lequel s’applique les droits et abattements (sauf cas particuliers). Alors que dans le cas d’une société, on va déduire le passif de la valeur des parts (ce qui sera intéressant pour la transmission des parts que ce soit en pleine propriété ou en nue-propriété).

4.4.1 Le démembrement combiné à la société civile :

Le démembrement des parts, ne peut pas être fait ab initio sauf à faire remploi de sommes ou de biens apportés, dont on peut prouver le démembrement antérieur.

Pour les partenaires de PACS et les concubins, on peut également prévoir un démembrement croisé permettant au survivant d’être plein propriétaire sur une partie des parts et usufruitier sur l’autre partie.

Le démembrement croisé se fait une fois le bien acquis par la société à l’aide d’un emprunt ou avant son apport s’il est apporté sans être grevé d’un passif.

Pour ce faire, on réalise un échange des usufruits des parts appartenant à chacun des séniors, en appliquant de la répartition prévue à l’article 669 du CGI car il y a génération de droits d’enregistrement.

Notes :

  • L’échange (Art 1702 du code civil) , est une double vente simultanée taxée à 5%
  • L’échange étant à titre onéreux, on ne risque aucune atteinte à la réserve, ni requalification.

Attention : s’il n’y a que le cadre de vie dans la SCI, cette dernière n’aura pas de revenus. Il faudra donc gérer un compte courant d’associés (CCA) qui sera taxable lors de la succession (il faut donc prévoir que le CCA ne soit pas immédiatement exigible après la succession pour que le survivant ne soit pas obliger de vendre le bien pour le rembourser) .

5 Les séniors locataires

Il nous reste à étudier ici le cas où le senior n’est pas propriétaire, mais locataire de sa résidence principale.

Pour les baux conclus à compter du 27/03/2014, le propriétaire ne peut pas s’opposer au renouvellement du bail si le locataire à plus de 65 ans et dispose de ressources inférieures au plafond d’attribution d’un logement conventionné sauf si le propriétaire veut se réserver ce bien pour son usage personnel avec toutefois quelques limitations énumérées plus loin dans ce paragraphe.

Cette mesure est également applicable lorsque le locataire a, à sa charge, une personne de plus de soixante-cinq ans vivant habituellement dans le logement et remplissant la condition de ressources précitée et que le montant cumulé des ressources annuelles de l’ensemble des personnes vivant au foyer est inférieur à ce même plafond.

L’époux du titulaire du bail peut exiger de rester dans les locaux (art 1751 cc) jusqu’au terme des 3 ans du bail, même si son nom n’est pas mentionné dans le bail. La cotitularité pour l’époux survivant est automatique. Le partenaire de PACS a également ce droit mais il doit lui en informer le propriétaire.

Le plafond 2024 de ressources, en vigueur pour l’attribution des logements locatifs conventionnés, est consultable sur https://www.service-public.fr/particuliers/actualites/A16296 (il est en 2024, pour une personne seule compris entre 26 491€ en région et 33 857€ à Paris, et pour un couple compris entre 35 378€ en région et 50 603€ à Paris)

Si le propriétaire veut reprendre le bien pour son usage personnel, il doit reloger le locataire sauf si le bailleur est lui-même un senior de plus de 65 ans OU s’il a un revenu inférieur au plafond mentionné précédemment.

Le relogement doit se faire dans un logement correspondant aux besoins et aux possibilités du senior et être à proximité du logement actuel. La proximité est définie par l’art 13 bis de la loi 48-1360 du 01/09/1948 (modifiée par la loi du mars 2009) comme se trouvant :

  • Dans le même arrondissement ou les arrondissements limitrophes ou les communes limitrophes de l’arrondissement où se trouve le local, objet de la reprise, si celui-ci est situé dans une commune divisée en arrondissements ;
  • Dans le même canton ou dans les cantons limitrophes de ce canton inclus dans la même commune ou dans les communes limitrophes de ce canton si la commune est divisée en cantons ;
  • Dans les autres cas sur le territoire de la même commune ou d’une commune limitrophe, sans pouvoir être éloigné de plus de 5 km

L’usage personnel est limité à 3 cas :

  • Reprise du logement pour y habiter, pour y loger son conjoint, partenaire de pacs ou ascendants et descendants,
  • Pour vendre le bien libre d’habitation,
  • Pour un motif légitime est sérieux et ce uniquement à l’échéance du bail (six mois avant)

S’il y a résiliation pour vente, la résiliation vaut offre de vente au senior et ce dernier bénéficie d’un droit de préemption.

Enfin, un locataire sénior peut demander un départ avec un préavis de seulement un mois (même hors zone tendu) pour aller en résidence médicalisée

Publié par Pierre-Yves GENET dans Juridique, Séniors et personnes vulnérables, 0 commentaire
Les séniors : Statistiques et rappels sur les aides sociales

Les séniors : Statistiques et rappels sur les aides sociales

Cet article est une introduction à une série d’articles traitant de la gestion et de la transmission du patrimoine des séniors, de la protection de leur cadre de vie et des mesures de protection pouvant être mises en place.

Il commence par rappeler quelques éléments statistiques importants puis rappelle les principales aides qui peuvent être attribuées soit en raison de l’âge soit de l’autonomie tout en soulignant la prohibition d’ingénierie sociale sur l’obtention ou l’optimisation de ces aides.

1 Quelques statistiques sur le grand age

On constate qu’en moyenne les éléments marquants de la vie se produisent aux âges suivants : :

  • 53 ans départ du dernier enfant du foyer
  • 55 ans premiers petit enfant
  • 58 ans début de la fin de vie sociale
  • 62 ans début de la retraite
  • 63 ans décès de premier des parents
  • 73 ans premier incident de santé
  • 82 ans préparation de la dépendance (amélioration du foyer)
  • 85 ans premières démarches vers la maison de retraite (dont certain pour avoir une vie sociale plus que pour des vraies raisons de santé)

On distingue plusieurs notions d’âges

  • L’âge social c’est l’âge que les autres vous donnent.
  • L’âge cognitif : c’est l’âge que l’on a l’impression d’avoir.
    • Quand on est jeune on a l’impression d’être un peu plus vieux que l’âge que l’on a réellement (en général on se donne entre 1 et 1.5 an de plus que son âge entre 15 et 20 ans)
    • Puis la tendance s’inverse. Vers 30 ans on se donne 1.5 ans de moins, vers 40 ans 7 ans de moins , vers 60 ans on a l’impression de n’avoir que 48 ans , entre 65 et 79 ans, 16 ans de moins puis on se fait rattraper par les problèmes de santé et à partir de 80 ans on a l’impression de n’avoir que 8 ans de moins que son âge réel.
  • L’âge chronologique. C’est notre âge réel :
    • 55/60 ans : changement de comportement d’achat60/65 ans : seuil d’accès à certaines prestations70/75 ans : pour les pro de la santé, c’est en général l’âge des premiers gros soucis de santé
    • 75/80 ans : on commence à ressentir le risque d’une relative dépendance

Plus on avance en âge, plus notre reste à vivre augmente

Ainsi, à 60 ans un homme peut espérer vivre plus de 23 ans et une femme près de 28 ans. A 80 ans, il reste, statistiquement, à un homme presque 9 ans de vie  et à une femme plus de 11 ans.

L’espérance de vie augmente de 5.5h par jour de vie (ou encore de 3 mois par an).

Il y a également une progression de l’espérance de vie en fonction de son année de naissance. Ainsi un bébé qui naissait en 2010 avait une espérance de vie de 77.5 ans si c’était un garçon et de 84.4 ans s’il s’agissait d’une fille. Alors qu’en 2020 les espérances de vie étaient déjà respectivement de 79.3 et 85.7 ans et que les projections indiquent 83.8 ans et 89 ans pour des naissances en 2050.

Cependant ce n’est pas toujours une vie en bonne santé.

La dépendance concerne :

  • 10% des personnes de plus de 75 ans
  • 35% des personnes de plus de 85 ans
  • 90% des personnes de plus de 90 ans

Elle est définie comme étant le besoin d’une aide pour réaliser un ou plusieurs des 4 actes essentiels de la vie quotidienne :

  • Se laver et s’habiller
  • Préparer les repas et se nourrir
  • Changer seul de position (Couché, assis, debout)
  • Se d placer

Les maladies d’Alzheimer et apparentées (Parkinson, Pick, Levy,…) touchent

  • 13% des hommes et 20% des femmes à 85 ans
  • 22% des hommes et 30% des femmes à 90 ans.

Un couple a une espérance de vie supérieure à un célibataire. Exemple : à 70 ans : espérance de vie d’un homme seul est de 15.8 ans, et pour une femme de 19.5 ans, alors que pour le couple elle est de 22.3 ans (c’est une information importante à utiliser lorsque l’on fait une évaluation économique de l’usufruit lorsque l’on met den place le démembrement d’un bien)

La durée de vie moyenne en situation de dépendance est relativement faible

  • 3.7 ans pour les hommes
  • 4.7 ans pour les femmes
  • A 80 ans, le risque de décès d’une personne dépendante est 4 fois supérieure à celle d’une personne autonome.

Le rapport 2023 de l’AMF sur les populations vieillissantes indique que

  • En 2020 , 9% de la population a plus de 75 ans. Ce sera 15% en 2040.
  • Les personnes de plus de 50 ans détiennent plus de 75% du patrimoine net des Français alors qu’ils représentent environ 35% de la population
  • Les plus de 70 ans détiennent eux plus de 19% alors qu’ils ne représentent que 9.5% de cette population
  • L’étude indique que  « Cette concentration du patrimoine chez les personnes les plus âgées s’explique non seulement par l’accumulation des revenus du travail, qui augmente au fil de la carrière, mais surtout par l’augmentation des transmissions patrimoniales, qui interviennent majoritairement aux alentours de 60 ans . En plus de concentrer une part importante du patrimoine, les catégories les plus âgées de la population se distinguent par une proportion plus importante de patrimoine financier dans leur patrimoine global»
  • Elle montre également que l’appétence ou l’aversion au risque est plus lié à la proportion de détention d’actifs financier qu’à l’âge. Ainsi, elle indique : » c’est avant tout le niveau de patrimoine qui détermine la propension à prendre des risques sur les marchés financiers. À titre d’exemple, l’investissement dans des actifs risqués dépend en premier lieu du patrimoine financier : 76 % des ménages appartenant aux 1% les plus dotés en patrimoine financier détiennent des actions en direct (contre 10% de l’ensemble des ménages, et 38% pour les 10% les mieux dotés en patrimoine financier) »

En 2020, le patrimoine moyen des seniors de 60 à 69 ans s’élevait à 361 000€ net dont 72% d’immobilier et 28% de patrimoine financier.

Pour garantir une rente annuelle de 30ke

  • En 1954 pour une femme de 68 ans dont l’espérance de vie était de 10 ans, il suffisait d’un capital de 230ke (taux technique à 5%)
  • En 2020, l’espérance de vie a doublée, le taux technique est à 1%, le capital à aliéner est de 490 000€

43% des encours des assurances-vies sont détenus par des personnes de 65 ans et plus (représentant actuellement 21% environ de la population majeure)

Les deux inquiétudes principales des séniors sont

  • Pourrais-je conserver et demeurer dans mon cadre de vie familier ?
  • Disposerais-je de suffisamment de ressources, facilement mobilisables, pour faire face aux dépenses de la vie et aux éventuelles adaptations nécessaires de mon domicile ?

En moyenne les dépenses de santé sont de 3 000 par an pour l’ensemble de la population française. Elles se montent à 6 000e pour les plus de 60 ans et 8 000par an au-delà de 75 ans. On peut se poser la question de la capacité de la collectivité à continuer à prendre en charge ce niveau de dépense avec l’accroissement de la proportion de personnes vieillissantes et en corolaire une augmentation possible du reste à charge par chaque individu ou sa famille.

2 LA TYPOLOGIE DES SENIORS

Il existe plusieurs classifications. Nous en présentons les principales ci-dessous.

2.1       Classification selon le mode de vie : Les couples et les personnes seules

  • Avec souvent un objectif de protéger le conjoint survivant pour les couples
  • La gestion de la solitude (souvent féminine, les femmes survivent souvent à leur époux ou partenaire

2.2      Classification selon l’age

  • Les « jeunes » séniors de 55 à 65 ans, généralement très actifs. Préoccupation : le plaisir, on a les moyens enfin de profiter de la vie
  • Les nouveaux retraités de 65 ans à 75 ans : adaptation à une nouvelle vie. Préoccupation : La liberté. On peut enfin voyager, organiser sa vie sans contraintes, mais aussi la fin de la socialisation liée à l’environnement professionnel. Il faut se réinventer une vie sociale.
  • Les grands séniors : de 75 ans à 85 ans : période dite de zone grise. Préoccupation : Sa santé. On ne bénéficie souvent pas encore de mesures de protection mais on commence à voir apparaitre des altérations cognitives (pertes de mémoire, diminution de l’attention, plus facilement influençable,…)
  • Les séniors vulnérables : + de 85 ans . Préoccupation : La dépendance et la fin de vie. L’appétence au risque décroit fortement, on limite nos efforts et on cherche la simplicité dans tout y compris dans la gestion de son patrimoine.

2.3      Classification selon l’état de santé

  • Actifs
  • Vulnérables
  • Protégés

2.4      selon le niveau d’autonomie : La grille AGIR pour » Autonomie Gérontologique Iso Ressources » (décret 2008-821)

  • Le GIR 1 C’est le e degré de dépendance le plus élevé. Il comprend des personnes confinées au lit ou au fauteuil, ayant perdu leur activité mentale, corporelle, locomotrice et sociale, qui nécessitent une présence indispensable et continue d’intervenants.
  • Le GIR 2 :  les personnes qui sont confinées au lit ou au fauteuil tout en gardant des fonctions mentales non totalement altérées (les « grabataires lucides ») et qui nécessitent une prise en charge pour la plupart des activités de la vie courante, une surveillance permanente et des actions d’aides répétitives de jour comme de nuit OU les personnes dont les fonctions mentales sont altérées mais qui ont conservé leurs capacités locomotrices (les « déments perturbateurs ») ainsi que certaines activités corporelles que, souvent, elles n’effectuent que stimulées. La conservation des activités locomotrices induit une surveillance permanente, des interventions liées aux troubles du comportement et des aides ponctuelles mais fréquentes pour les activités corporelles
  • Le GIR 3 : Les personnes ayant conservé des fonctions mentales satisfaisantes et des fonctions locomotrices partielles, mais qui nécessitent quotidiennement et plusieurs fois par jour des aides pour les activités corporelles. Elles n’assurent pas majoritairement leur hygiène de l’élimination tant fécale qu’urinaire
  • GIR 4 : Les personnes n’assumant pas seules leurs transferts mais qui, une fois levées, peuvent se déplacer à l’intérieur du logement, et qui doivent être aidées ou stimulées pour la toilette et l’habillage, la plupart s’alimentent seules OU les personnes qui n’ont pas de problèmes locomoteurs mais qu’il faut aider pour les activités corporelles, y compris les repas
  • GIR 5 : Les personnes assurant seules les transferts et le déplacement à l’intérieur du logement, qui s’alimentent et s’habillent seules. Elles peuvent nécessiter une aide ponctuelle pour la toilette et les activités domestiques.
  • GIR 6 : C’est le niveau d’autonomie le plus élevé. Il s’agit des personnes pouvant effectuer seules tous les actes essentiels de la vie quotidienne, ainsi que toutes les activités domestiques et sociales.

3  Rappel concernant les aides sociales

De nombreuses aides sont disponibles pour les séniors. Certaines seront remboursables en cas de retour à meilleure fortune ou sur succession, d’autres uniquement si certaines condition sont remplies , d’autres enfin ne seront jamais remboursable.

Nous allons les présenter sommairement dans les paragraphes suivants.

Attention toutefois, le CGP ne doit pas aller trop loin dans ses conseils pour la perception ou non de ces aides. Il doit se limiter à tenir compte de l’impact de ses préconisations sur les aides existantes et à un devoir d’information général. En effet l’ingénierie en matière d’aide sociale est strictement prohibée et réservée aux assistantes sociales

  • Art L262-51 du CASF : « Le fait d’offrir ou de faire offrir ses services à une personne en qualité d’intermédiaire et moyennant rémunération, en vue de lui faire obtenir le revenu de solidarité active, est puni des peines prévues par l’article L. 853-1 du code de la construction et de l’habitation » . Mais ce dernier article n’existe pas !!!. Il doit s’agir de l’art 852-3 du même code mais le texte n’ayant pas été corrigé depuis 2019 ce n’est pas sûr. Il s’agirait dans ce cas d’une amende de 4 500€
  • Art L815-15 du code de la sécurité sociale : Est puni d’une amende de 3 750 euros le fait d’offrir, moyennant rémunération, ses services à autrui en vue de lui permettre d’obtenir le bénéfice de l’allocation de solidarité aux personnes âgées »
  • L377-2 du code de la sécurité sociale : « Sera puni d’une amende de 3 750 euros et, en cas de récidive dans le délai d’un an, d’une amende de 7 500 euros, tout intermédiaire convaincu d’avoir offert ou fait offrir ses services moyennant émoluments convenus à l’avance à un assuré social en vue de lui faire obtenir le bénéfice des prestations qui peuvent lui être dues »
  • L244-13 du code de la sécurité sociale : « Tout intermédiaire convaincu d’avoir offert ses services […] en vue d’obtenir, au profit de quiconque, le bénéfice d’une remise, même partielle, sur les sommes réclamées par les organismes de sécurité sociale […] sera puni d’une amende de 1 500 euros  et, en cas de récidive, d’un emprisonnement de six mois et d’une amende de 3 750 euros »

3.1      L’allocation de Solidarité aux personnes âgées (ASPA)

Elle est versée sous conditions de ressource (percevoir moins de 1 052.02€ brut/mois en 2024 pour un célibataire et 1 571.16 pour un couple) et d’âge.

Il faut, en effet, pour la percevoir, avoir dans le cas général, au moins 65 ans ou avoir un taux d’incapacité de travail permanente d’au moins 50% ou percevoir une retraite anticipée pour handicap

Dans ces derniers cas, la date de perception dépend de l’année de naissance

  • 60 ans si né avant le 01/07/1951
  • 60 ans + 4 mois si né entre le 01/07/1951 et le 31/12/1951
  • 60 ans et 9 mois si né en 1952
  • 61 ans et 2 mois si né en 1953
  • 61 ans et 7 mois si né en 1954
  • 62 ans si né en 1955 ou après

Les revenus pris en compte sont pour la condition de ressource sont :

  • Les revenus pro moins 2 650.37/ an si la moyenne des 3 derniers salaires est utilisée pour la détermination du plafond de revenu ou moins 10 601.5€ si c’est la moyenne des 12 derniers mois qui est utilisée
  • Les pensions (retraite, alimentaire, invalidité)
  • Les revenus de son patrimoine (estimé à 3% de la valeur vénale de ses biens) sauf pour la résidence principale qui n’est pas prise en compte

Ne sont pas pris en compte les autres aides perçues (AAH, APL, ALS, APA, PCH, distinction honorifique.

Pour un couple, le montant versé est en 2024 de :1 012.02€/mois si les revenus du couple sont inférieurs à 559€/mois, ou la différence entre 1 571.16€  et les revenus du couple si supérieurs à ce montant. Si les revenus sont supérieurs à 1 571.16€ l’aide n’est pas versée. Pour un célibataire l’aide est de 1 012.02€/mois moins ses revenus mensuels.

Les sommes versées pour l’ASPA sont récupérées sur la succession de la personne qui l’a reçu, uniquement si l’actif net de la succession est supérieur à

  •  105 300€ en métropole si le décès est intervenu après le 01/01/2024 (ou 100 000e s’il est intervenu avant cette date),
  • 150 000€.pour une personne résident dans les DOM.

3.2      L’allocation Adulte Handicapé (AAH)

Pour l’obtenir il faut avoir un taux d’incapacité déterminé par la CDAPH (Commission des droits pour l’autonomie des personnes handicapées) d’au moins 80% ou comprise entre 50 et 79% si la personne rencontre des difficultés importantes d’accès à un emploi qui ne peuvent pas être compensées par des mesures d’aménagement (du poste de travail par exemple) et durable (c’est-à-dire pendant plus d’un an)

Il faut avoir au moins 20 ans pour la percevoir.

Elle est attribuée à vie si le taux d’invalidité est supérieur ou égal à 80%, ou  par période de 3 à 5 ans si le taux d’invalidité est compris entre 50 et 79%.

ce dernier cas l’aide s’arrête à l’âge légal de la retraite (64 ans en général actuellement) et, est remplacé par ASPA ,qui comme on l’a vu précédemment, est récupérable.

Elle est soumise à condition de ressource, percevoir moins de 12 193e/an pour un célibataire et 22 069€ pour un couple.

Le montant perçu est de 1 016.05€ moins les autres revenus et pension.

Le CGP cherchant à protéger une personne handicapée, devra faire attention, que les revenus générés ne viennent pas juste effacer l’AHH que cette personne aurait perçu au tire de l’AAH. Cette aide n’est pas récupérable

3.3      L’allocation Social à l’Hébergement (ASH)

L’ASH sert à payer tout ou partie des frais d’hébergement que facture l’établissement (Ehpad : la résidence autonomie, ou l’unité de soins de longue durée) ou l’accueil familial à la personne âgée.

L’ASH paie la différence entre le montant des frais d’hébergement et ce que peut payer la personne âgée, voire ce que peuvent payer ses obligés alimentaires (enfants, gendres, belles-filles)

Pour la percevoir il faut :

  • Avoir plus de 65 ans (ou plus de 60 ans si la personne a été reconnue inapte au travail),
  • Avoir des revenus inférieurs aux frais d’hébergement facturés.
    • Sont également pris en compte
      • Les revenus du conjoint, du partenaire ou du concubin
      • Les revenus du patrimoine frugifère
      • Les ressources du patrimoine non frugifère à hauteur de
        • 50% de la valeur locative des immeubles bâtis
        • 80% de la valeur locative des terrains
        • 3% du montant des capitaux
      • Les contributions des obligés alimentaires

Le montant versé dépend de chaque département

L’aide est récupérable :

  • Sur retour à bonne fortune de la personne (par exemple si elle reçoit un héritage, ou un gain au jeu, …)
  • Sur les donations faites par cette même personne dans les 10 ans qui ont précédé la demande d’ASH et après celle-ci
  • Sur l’actif net de sa succession.

Note : Si la personne âgée est également handicapée, alors il n’y a ni recours aux obligés alimentaires, ni remboursement sur la succession des proches (conjoints, enfants, personnes ayant assuré la charge de l’allocataire) mais le remboursement reste ouvert sur les actifs transmis à d’autres personnes.

3.4      L’allocation personnalisée d’Autonomie (APA)

L’APA sert à payer (en totalité ou en partie) les dépenses nécessaires pour permettre de rester à son domicile.

Pour la percevoir, il faut :

  • Avoir au moins 60 ans
  • Être dans une situation de perte d’autonomie (entre Gir 1 et Gir 4). Le montant versé dépend du niveau d’invalidité.
Gir 1Au maximum 1 955,60 € par mois
Gir 2Au maximum 1 581,44 € par mois
Gir 3Au maximum 1 143,09 € par mois
Gir 4Au maximum 762,87 € par mois
  • A ce maximum est déduit un reste à charge qui dépend des ressources de l’allocataire.
    • Ces ressources sont déterminées à partir :
      • Des revenus figurant sur le dernier avis d’imposition et également ceux soumis au prélèvement forfaitaires libératoire (y compris ceux du conjoint, partenaire de PACS ou concubin notoire)
      • des ressources du patrimoine non frugifère à hauteur de
        • 50% de la valeur locative des immeubles bâtis sauf la résidence principale
        • 80% de la valeur locative des terrains
        • 3% du montant des capitaux
  • Rester à son domicile ou celui d’un proche, d’un accueillant familiale ou en résidence autonomie.

Elle n’est pas cumulable avec certaines autres aides.

L’aide n’est récupérable qu’en cas de retour à meilleure fortune de l’allocataire.

3.5      L’Aide personnalisée au Logement (APL)

Elle est accessible aussi bien pour la personne âgée qui reste à son domicile (si elle est locataire) que si elle réside en EHPAD

L’APL est attribuée pour l’ensemble des personnes qui composent le foyer mais pour un seul logement (la résidence principale) Il n’y a pas de condition d’âge et uniquement des conditions de ressources et de loyer maximal.

Cf https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/Brochure-bareme-2024-APL.pdf pour le détail des règle de calcul de l’APL qui dépendent des ressources, de la composition du foyer, du montant des loyers et des charges.

Elle n’est pas remboursable

3.6     La prestation de compensation du Handicape(PCH)

Elle est accordée en cas de difficulté absolue de réaliser au moins une activité du quotidien ou grave d’en réaliser au moins deux.

Elle doit être demandée avant les 60 ans de la personne.

Elle est attribuée sans condition de ressources, toutefois ces dernières sont prises en compte pour le taux de prise en charge des dépenses couvertes par la PCH.

Elle permet de couvrir

  •  L’intervention d’un aidant,
  •  L’aide technique destinée à l’achat ou la location d’un matériel pour compenser la situation de handicap
  • L’aménagement du logement par la prise en charge d’une partie des travaux du logement de l’allocataire pour compenser sa situation de handicap
  • L’aménagement du véhicule et les surcoûts liés aux trajets
  • Des dépenses exceptionnelles liées au handicap et non prises en compte par un des autres éléments de la PCH. Il peut s’agir, par exemple, de frais de réparations d’un lit médicalisé ou d’un fauteuil roulant
  • Une aide animalière comme l’acquisition et à l’entretien, par exemple, d’un chien d’aveugle. Dans ce cas, l’animal doit avoir été éduqué par des éducateurs qualifiés.

Elle n’est pas remboursable

3.7      La couverture santé

Pour les séniors les plus démunis, il est possible d’obtenir la Complémentaire santé solidaire (CSS) ex CMU

Elle permet

  • L’affiliation automatique au régime générale de la sécurité sociale et donc l’accès aux soins
  • L’accès aux professionnels conventionnés du secteur 1  et supprime les dépassements d’honoraires pour les professionnels conventionnés du secteur 2(remboursement à 100%)
  • La prise en charge du ticket modérateur, du forfait hospitalier, de certains soins dentaires, des soins de lunetterie et les prothèses

Conditions d’affiliation :

  • Être à l’ASPA (Allocation de Solidarité aux personnes âgées)
  • ou percevoir moins de 10 166e de revenus pour une personne seule ou 15 249e/an pour un couple. Sont compris dans les revenus les pensions retraites, les revenus fonciers, les revenus de capitaux mobiliers mais aussi les gains aux jeux.

3.8      Autres aides

Il existe encore d’autres aides

  • L’aide sociale pour l’aide à Domicile :
    • Elle permet aux personnes ayant des difficultés pour réaliser certaines taches ménagères d’employer une personne à son domicile (ménage, repas, toilette, linge,…) à conditions d’avoir des ressources inférieures au montant de l’ASPA (soit 1 012€/mois en 2024 pour une personne seule et 1 571 pour un couple) et d’avoir plus de 65 ans (60 ans en cas d’inaptitude au travail)
    • Elle est récupérable sur la succession si l’actif successoral est supérieur à 46 000€ ou en cas de retour à meilleure fortune ou sur les donations faites dans les 10 années ayant précédées la demande ou après celle-ci)
  • L’aide sociale pour les repas
    • Elle permet à la personne âgée de se faire porter des repas à domicile si elle n’est plus en état de se les préparer elle-même (avec une attestation médicale le certifiant) à conditions d’avoir des ressources inférieures au montant de l’ASPA (soit 1 012€/mois en 2024 pour une personne seule et 1 571 pour un couple) et d’avoir plus de 65 ans (60 ans en cas d’inaptitude au travail)
    • Elle est récupérable dans les même conditions que la précédente
  • Ma prim’Adapt
    • Cette aide regroupe depuis l e01/01/2024, l’ensemble des aides destinées à l’adaptation des logements pour les personnes âgées ou celles en situation de handicap.
    • Il faut pour l’obtenir
      • Être âgé de plus de 70 ans ou avoir entre 60 et 69 ans est être en GIR de 1 à 6, ou être en situation de handicap (en étant soit bénéficiaire de la PCH soit en ayant un taux de handicape supérieur à 50%)
    • Cette prime n’est pas récupérable
  • Il est aussi possible de solliciter les fonds d’actions sociales des caisses de retraite versant des pensions au sénior pour financer par exemple du matériel para médical. Les études sont alors réalisées au cas par cas. La caisse d’assurance maladie et les mutuelles peuvent également exceptionnellement fournir une aide sur demande tres circonstanciée.

3.9      Le remboursement des aides sociales

Cela concerne entre autres les aides versées aux personnes âgées placées dans un établissement pour les frais d’hébergement et d’entretien, essentiellement l’ASPA

Le département peut activer la demande de remboursement

  • D’une partie des aides au titre de l’aide alimentaire prévu l’article 205 (depuis avril 2024, sont dispensé de fournir cette aide :  les petits enfants de la personnes ayant reçu l’aide ainsi que les enfants qui ont été retirés pendant au moins 36 mois  de leur milieu familial avant leur 18 ans par décision de justice et pour le parent condamné, les enfants dont ce parent a été condamné comme auteur ou complice d’un crime ou d’une agression sexuelle sur l’autre parent)
  • Sur la succession du bénéficiaire de l’aide,
  • Par le donataire sur les sommes qu’il a reçu par donation de la personne ayant reçu les aides, lorsque la donation est intervenue postérieurement à la demande d’aide sociale ou dans les dix ans qui ont précédé cette demande (1° de l’art 132-8 du code de l’action social et des familles)
  • Auprès du ou des légataires du testament de cette même personne
    • Le légataire universel ou le légataire à titre universel sont assimilés aux héritiers et sont tenus aux dettes de la succession
    •  le légataire particulier, celui qui reçoit un bien déterminé  n’est pas tenu de payer les dettes de la succession. Le recours à son encontre est exercé jusqu’à concurrence de la valeur du ou des biens légués au jour de l’ouverture de la succession.
  • Enfin et à titre subsidiaire auprès du bénéficiaire d’un contrat d’assurance-vie souscrit par le bénéficiaire de l’aide sociale, à concurrence de la fraction des primes versées après l’âge de soixante-dix ans. Quand la récupération concerne plusieurs bénéficiaires, celle-ci s’effectue au prorata des sommes versées à chacun de ceux-ci (4° du même article).

Ne sont pas concerné par ces remboursements l’APA et les frais d’hébergement et d’entretien des personnes handicapées dans des établissements spécialisées

Pour garantir les recours prévus ci-dessus, le représentant de l’état ou le président du conseil départemental peut poser une hypothèque légale sur les biens immobiliers détenus par le bénéficiaire de l’aide.

De plus si le bénéficiaire est titulaire de créance (par exemple il était nu-propriétaire d’un quasi-usufruit, ou a consentit un prêt familial, etc..) alors l’état ou le département pourront percevoir ces créances dans la limite des prestations allouées.

L’action en recouvrement est prescrite par cinq ans après le décès de l’allocataire.

Il peut aussi y avoir un recours contre une société civile mais cela nécessite une autorisation délivrée par le conseil d’état. Il n’est donc dans la pratique jamais fait

Enfin il y a répétition de l’indu c’est-à-dire le remboursement d’un trop versé ou des aides versées après le décès de l’allocataire. En cas d’erreur, la prescription est de 2 ans à compter du paiement et 5 ans en cas de fraude et dans ce dernier cas s’ajoutent 10% de pénalité

En synthèse

 : Ne sont pas récupérables :

  • La prestation de compensation du handicap (PCH) ;
    • Le revenu de solidarité active (RSA) ;
    • L’allocation personnalisée d’autonomie (APA). 
    • L’allocation aux Adultes Handicapés (AAH)
    • L’alide personnalisée au logement (APL)
    • L’allocation compensatrice pour tierce personne (ACFP)
    • L’aide-ménagère quand elle est versée les caisses de retraite
  • Sont récupérables selon différentes modalités
    • L’aide sociale à l’Hébergement (ASH)
    • L’allocation de Solidarité aux Personnes Agées (ASPA)
    • Les aides sociales à domicile versées par le département (portage de repas, aide-ménagère…

3.9.1      La notion de retour à meilleure fortune

Celle-ci doit avoir lieu du vivant du bénéficiaire et correspondre à un évènements nouveau : (la vente d’un appartement n’est pas un retour à meilleure fortune car le bien appartenait déjà au bénéficiaire)

Elle doit correspondre à une amélioration de la situation en capital ou en revenu de manière significative

  • Exemple : héritage, mariage avec une riche épouse, gain loto, perception d’une assurance vie

3.10      Rester en dessous des seuils

Comme nous avons pu le constater précédemment, dans certains cas les aides étaient conditionnées à soit à des ressources globales englobant des revenus fictifs du patrimoine soit à des revenus effectivement perçus.

Dans le second cas, le CGP devra conseiller à son client des solutions qui n’auront pas comme unique résultat de remplacer les aides perçues par un revenu issu de son patrimoine.

Pour cela il existe plusieurs pistes :

  • On peut trouver des contrats à bénéfices différés (par exemple chez ODDO et Generali). Dans ces contrats, la participation aux bénéfices n’est pas immédiatement distribuée et est conservée par l’assureur dans un compartiment indépendant et indisponible pour l’assuré. Pendant 8 ans les rachats sont faits sur le capital et ne sont donc ni sujet à fiscalité, ni considéré comme des revenus. Les intérêts ne deviennent taxables, qu’après la huitième année. Mais là encore, il est possible de « différer » pour une période supplémentaire la participation aux bénéfices du contrat sans ouvrir un nouveau contrat.
  • Les livrets A, les LDDS, LEP (livret jeune si la personne vulnérable est jeune) sont envisageables
  • Attention pour la location meublée, on regarde les revenus avant amortissements donc ça ne marche pas (cf code de la sécu et de l’action sociale)
  • Il est également envisageable d’utiliser des structures sociétaires permettant pendant un temps de faire des remboursements de compte courant d’associés dans une société à l’IS avant d’avoir à prélever des dividendes..

En solution de dernier recours, si la personne a des participations dans une société, elle peut décider de distribuer massivement les dividendes sur une année seulement, en perdant les aides, cette année-là, mais en ayant des revenus forts cette même année et en retrouvant les aides les années suivantes

Publié par Pierre-Yves GENET dans Juridique, Séniors et personnes vulnérables, 0 commentaire
Introduction au Droit International Privé (DIP)

Introduction au Droit International Privé (DIP)

Commençons par quelques exemple pour présenter la matière….

Cas joueur de foot Anglais

Cas  1 : Imaginez un joueur de foot Anglais ayant signé dans un grand club de la côte d’Azur dans les année 2000. Il tombe amoureux d’une jeune Française qu’il épouse en l’emmenant convoler en justes noces dans son jet privé en Angleterre. Éperdument amoureux, les deux amoureux décident de ne pas faire de contrat de mariage.

Le temps passe, vieillissant, il finit sa carrière en retournant jouer dans un club anglais. Les 2 époux s’installent dans la vile anglaise du club. Hélas, loin de ses amis et du soleil de la méditerranée, son épouse, après quelques années seulement en Angleterre, s’étiole, s’ennuie et demande le divorce. Elle engage la procédure en France. L’époux a acquis seul la quasi-totalité du patrimoine familial. Il pense donc que comme il se sont marié en Angleterre et que la loi Anglaise sur les mariages peut être assimilée à une séparation de bien, il est seul propriétaire de l’ensemble de ce qu’il a acquis et que madame n’aura droit à presque rien. C’est d’ailleurs ce que lui indique son avocat Anglais qui ignore les circonstances de son mariage. Malheureusement en l’absence de choix de loi applicable, le système juridique Français considère dans ce cas, que c’est la convention de La Haye de 1978 sur les régimes matrimoniaux qui s’applique et que donc c’est la loi de l’état de première résidence des époux qui prévaudra, donc dans notre cas, la loi Française. Les époux sont donc considérés comme étant mariés sous un régime de communauté de biens réduite aux acquêts et non de séparation. Madame a donc droit à la moitié de tout ce que Mr à acheter pendant le mariage (savoir si la communauté doit une récompense à Mr est encore une autre question que nous n’aborderons pas ici)

Weeding Chapel Las Vegas

Cas 2 : Une jeune Française de 18 ans tombe amoureuse d’un jeune algérien de 18 ans. A l’occasion d’un voyage à Las Vegas la même année, en 2015, les deux jeunes tourtereaux se marient pour le fun à la Wedding Chapel de Las Vegas où officie un sosie d’Elvis Presley. Malheureusement, six mois après les deux jeunes se séparent sans plus penser à ce coup de folie qu’ils pensent être juste du folklore. Puis la vie avançant, la jeune demoiselle retombe amoureuse et désire, en 2022, se remarier. Elle raconte son histoire au notaire qui doit s’occuper de son contrat de mariage. A son grand désarroi le notaire lui indique qu’elle ne peut pas se marier à moins que…. En effet l’article 202-2 indique que les mariages sont reconnus en France s’ils sont valides dans la forme d’après la loi du lieu de célébration.

Or il s’avère que les mariages dans la wedding chapel sont valides dans état du Nevada. Le mariage devrait être donc être reconnu en France. Certes, les jeunes mariés n’ont pas fait publier leur mariage ni en France, ni en Algérie. Il n’a donc pas été inscrit en marge de leur état civil mais il produit tout de même ses effets entre les deux époux. C’est-à-dire qu’il oblige les époux à une communauté de vie, d’assistance et surtout interdit un remariage car la polygamie est interdite en France. Voilà donc notre jeune fille bien embêtée. Heureusement, son notaire sort de sa besace, l’article 202-1 du code civil qui indique que pour être reconnu valable en France, un mariage doit aussi respecter des conditions de fond qui concernent l’âge, le sexe et le consentement des époux. Cet article indique, entre autres, que pour se marier il faut que la loi personnelle de chacun des époux le permette. Si cela va de soit pour la jeune demoiselle, il s’avère que la loi Algérienne fixe la majorité civile à 19 ans et interdit tout mariage avant cette majorité. Le mariage n’est donc pas valide en France sur le fond et ne sera pas reconnu en France puis que le jeune Algérien n’avait que 18 ans au moment de sa célébration. La jeune demoiselle peut donc finalement se marier en France. Son notaire lui indique cependant qu’elle devrait engager une procédure de divorce aux états unis car son mariage y reste certainement reconnu, mais que n’étant pas un spécialiste du droit interne Américain il ne peut que lui conseiller de consulter un avocat spécialiste du droit de l’état du Nevada.

Accident de voiture en Espagne

Cas 3: Un jeune Français part avec des amis faire la fête à Barcelone. Malheureusement ils ont un accident mettant en cause un automobiliste Allemand. De retour en France, notre jeune ami décide de porter plainte devant un tribunal Français en responsabilité civile.  Il s’aperçoit alors que deux conventions internationales peuvent s’appliquer à son cas. La convention de la Haye du 4 Mai 1971 relatives aux accidents de la route ainsi que le plus récent règlement Européen du 11 juillet 2007 relatifs aux obligations non contractuelles dit ROME II. Lequel des deux doit s’appliquer ? Il s’avère dans ce cas que c’est la convention de La Haye qui sera applicable et que celle-ci désigne, toujours dans ce cas, la loi Espagnole. Le juge français devra donc prendre connaissance de la loi Espagnole pour juger ce cas.

Retraite au Portugal

Cas 4 : Conseiller par un ami, Mr X décide d’aller prendre sa retraite au Portugal car outre le soleil, il y serait exonéré d’impôt les 10 premières années car considéré comme résident fiscal non habituel, s’il y passe plus de 183j par an. Confiant, il part donc s’installer au Portugal tout en percevant sa retraite de source Française. Il a également gardé son appartement en France pour y résider lorsqu’il viendra voir ses enfants (tout en veillant bien, bien sûr, à rester moins de 183j par an en France). Ne connaissant pas bien la législation Portugaise, il a également conservé en France les différents placements financiers qu’il avait fait et qui lui apportent un complément de retraite. Deux an plus tard, il reçoit une notification de redressement fiscal de la part des autorités Françaises. Il s’en offusque, mais a-t-il raison ? Et bien non, il a juste été très mal conseillé par son ami. En effet, au titre de l’article 4 b du code des impôts, en percevant sa retraite de source Française, principale source de ses revenus, Mr X a gardé le centre de ses intérêts économiques en France. Il est donc à la fois fiscalement résident en France et au Portugal. Comme la France et le Portugal ont signé ensemble une convention fiscale, il faut aller vérifier son contenu pour savoir quel état est effectivement en droit de l’imposer. Confiant Mr X se dit que comme il habite au Portugal et que l’article 4 indique comme second critère le lieu d’habitation, il est donc sauvé. Que nenni !  Un foyer d’habitation, n’est pas le domicile de la personne mais un endroit dont il a la jouissance et où il peut demeurer. L’appartement qu’il a conservé en France et dont il s’est gardé la jouissance, est donc un foyer d’habitation au sens de cette convention. Il faut donc passer au 3e critère de la convention.  Celui-ci indique alors le centre de ses intérêts vitaux. Comme Mr X perçoit l’intégralité de ses revenus (sa retraite et ses revenus mobiliers) de source Française, qu’il a conservé sa famille en France et son appartement, on peut dès lors considérer qu’il a le centre de ses intérêts vitaux en France (peu importe le fait qu’il y passe plus ou moins de 183j par ab). L’état Français est donc bien en droit de l’imposer !

Comme on peut s’en apercevoir au travers de ces 4 exemples le droit international privé peut intervenir dans tous les compartiments de la vie.
De plus, il ne faut pas se limiter à la photo au moment présent mais il faut aussi connaitre l’historique de la situation pour vérifier qu’il n’y a pas eu, par le passé, un élément d’extranéité qui pourrait encore produire ses effets aujourd’hui.

Enfin c’est sujet complexe, qui peut faire intervenir plusieurs niveaux de normes : la loi nationale, la jurisprudence nationale, et celle de la cour Européenne de justice ainsi des traités internationaux qui parfois se recouvrent partiellement sur même sujet (c’est souvent le cas entre des règlement Européens d’une part de les convention de La Haye (ou Rome, Washington) d’autres parts. Ces dernières ayant vocation a intégrer plus d’états que les seuls états Européens.

Il ne faut surtout pas se limiter à ce que l’on entend ici où là ou se fier uniquement au sens des mots Français.

Par exemple pour un Anglais, être « domicilié » en Angleterre signifie avoir des liens étroit avec ce pays, comme y être né. Un anglais vivant en France depuis plusieurs année peut donc parfois être encore considéré comme « domicilié » en Angleterre.

Ce présent article n’a pas l’objectif de faire le tour, ne serait-ce que partiel, du DIP (Droit privé International), il ne souhaite qu’ouvrir l’esprit du lecteur afin d’une part qu’il puisse tirer à un moment le signal d’alarme en se disant que sa situation rentre peut-être dans le cadre du DIP et d’autre part pour lui indiquer les principes de base régissant le Droit International Privé.

Nous présenterons dans un prochain article, les principaux traités internationaux applicables au droit international privé ainsi que principales règles de conflit de loi.

Présentons maintenant le Droit International Privé

1 Qu’est-ce que le Droit International Privé (DIP) ?

Comme sont non l’indique, c’est un droit qui concerne les personnes privées qu’elles soient physiques (les individus) ou morales (les entreprises ou les sociétés) dès qu’il y a un élément d’extranéité. C’est-à-dire dés que le sujet de droit concerne plus de deux états. Par exemple une succession avec un défunt dans un pays et des héritiers dans un ou plusieurs autres, une entreprise d’un pays qui envoie en salarié en expatriation, un consommateur qui achète un produits à une entreprise située dans un autre pays, l’imposition de revenus perçus hors de France, etc….

Il se distingue du droit international public qui régit lui les droits et les obligations des états et des organisations internationales entre eux. Dans de rares cas, des individus peuvent également être soumis au droits public international. C’est les cas par exemple des crimes internationaux comme les crimes contre l’humanité.

2 Quelques principes de base du DIP

2.1 Prédominance du civil

Le DIP peut concerner aussi bien des aspects civil que fiscaux, mais le civil a toujours la prédominance.

Par exemple lorsqu’un notaire français va devoir gérer une succession ayant un élément d’extranéité, il va tout d’abord déterminer :

  1. la loi applicable au régime matrimoniale pour déterminer ce qui appartient au défunt (on parle de masse successorale),
  2.  puis la loi applicable au civil à la succession (qui peut ne pas être celle du régime matrimonial) pour déterminer qui à droit à quoi dans la succession (par exemple entre le conjoint survivant et les enfants)
  3. enfin et seulement une fois que les étapes du civil auront été réalisées, il devra déterminer au niveau fiscal quel(s) état(s) est(sont) en mesure d’imposer la succession et selon quel critères et s’il existe des conventions ou des éléments de loi interne permettant d’éviter ou de limiter les doubles impositions.

2.2 Prédominance des conventions internationales.

Selon l’article 55 de la constitution Française, les traités, règlements ou accords internationaux ont une autorité supérieure à celle des lois françaises à condition toutefois qu’ils aient été ratifiés ou approuvés régulièrement en France ET qu’ils soient également applicables dans l’état tiers. Cette hiérarchie est également promue au niveau international par la convention de Vienne de 1969 sur le droit des traités rentrée en vigueur le 27 janvier 1980 et ratifiée par plus d’une centaine de pays (à l’exception notoire de la France)

Attention toutefois, ce n’est pas si simple. Ce n’est pas, parce qu’un état tiers n’a pas ratifié une convention, que celle-ci ne s’imposera pas à un juge français.

Par exemple le règlement européen du 24/06/2016 concernant la loi applicable au régimes matrimoniaux précise dans son article 20 que « La loi désignée comme la loi applicable par le présent règlement s’applique même si cette loi n’est pas celle d’un État membre. ». Ainsi, si le règlement européen désigne comme loi applicable, la loi des USA, le juge français devra appliquer cette loi même si USA n’ont jamais ratifié ce règlement européen et ne l’appliqueront jamais.

Notons enfin que l’article 54 de notre constitution énonce que si le Conseil constitutionnel, constate qu’un traité comporte une disposition contraire à la Constitution, il peut en bloquer la ratification jusqu’à ce qu’une éventuelle révision de la Constitution puisse lever cette contradiction.

2.3 La règle de conflit de loi.

Il s’agit ici de déterminer qu’elle sera la loi applicable à une situation donnée.

Cette loi est déterminée par une règle qui n’indique pas la solution sur le fond mais qui permet de déterminer la loi de l’état qui sera appliquée à la résolution du problème de droit international.

Il peut y avoir des règles de conflit de lois :

  1. en droit interne. Par exemple Article 202-1 du code civil « Les qualités et conditions requises pour pouvoir contracter mariage sont régies, pour chacun des époux, par sa loi personnelle »,
  2. ou au sein de traités internationaux.

Note : Il existe des cas très particuliers, où un texte international ne donne par la direction de la juridiction compétente ou de la loi applicable, mais indique directement un règle matérielle donnant une solution sur le fond. Tel est par exemple la convention de Vienne du 11/04/1980 sur les contrats de ventes internationales de marchandises. Cela reste un exception mais il est important de se rappeler que si deux traités internationaux peuvent s’appliquer à une situation alors celui qui indique directement une loi matérielle internationale sera d’application prioritaire.

Là encore le droit international prévaut. S’il existe à la fois des traités internationaux et des textes internes de désignation de loi applicable (par ex les art 14 et 15 du code civil) qui peuvent être appliquée à la situation en question, alors ces textes internes s’effaceront devant les règles de conflit de loi des traités internationaux (sauf comme nous le verront plus loin pour les lois de polices et pour l’ordre public international)

Notons enfin que la loi applicable peut être déterminé par défaut ou elle peut dans de nombreux cas (divorce, succession, régime matrimonial, etc..) être librement désignée par les parties.

2.4 Les conflits de juridiction

Il s’agit ici de déterminer la juridiction compétente pour trancher une situation internationale litigieuse.

Par exemple : Cas d’un couple Franco-Russe, vivant en équateur. L’époux Français demande le divorce devant une juridiction Française. Est-ce que cette dernière est compétente pour prononcer le divorce ?

IMPORTANT : il faut bien noter l’autonomie entre la résolution du conflit de juridiction et celle du conflit de loi applicable. Le premier peut désigner la juridiction d’un état appelée à se prononcer sur une question de droit mais en utilisant la loi d’un autre état.

Exemple :

  • Prenons pour exemple deux époux français vivant en Angleterre. Après quelques temps le couple se sépare et Mme part vivre en Belgique. Au début le couple ne souhaite pas divorcer pour les enfant mais après un peu plus d’un an, la situation se dégrade et le couple décide alors d’entamer une procédure de divorce.
  • Quels pays est compétent pour juger du divorce ?
  • D’après le règlement Bruxelles II Ter applicable aux procédures intentées à partir du 01/08/2022, la France (état de nationalité des deux époux), la Belgique (état de résidence habituelle de Mme depuis plus d’un an ) et l’Angleterre (ancien pays de résidence du couple et de résidence actuelle Mr) peuvent tous les trois se déclarer compétent.
  • Pour déterminer le pays qui sera amené à se prononcer si Mr demande le divorce en Angleterre et Mme en Belgique, on fait alors appel à l’article 20 de ce même règlement qui indique que c’est la première des deux juridictions saisies qui sera compétente (on parle de litispendance que l’on décrira un peu plus loin dans cet article).
  • Admettons que ce soit Mme qui ait engagé en premier le divorce. Ce sera donc la Belgique qui sera compétente pour prononcer le divorce.
  • Cependant le règlement Bruxelles II ter ne traite que de la compétence. Pour connaitre la loi applicable, il faut dans ce cas se référer au règlement dit ROME III qui indique qu’à défaut de loi entre les parties, c’est (dans ce cas précis ; attention ce n’est pas une généralité) la loi de nationalité commune des époux, donc la loi Française qui s’applique.
  • Mais là encore ROME III ne traite que des seules causes de dissolution (divorce par consentement mutuel ou autres) et du prononcé du divorce.
  • Les effets du divorce comme la liquidation du régime matrimonial, les obligations alimentaires ou la garde des enfants dépendent encore d’autres traités internationaux qui pourront eux aussi déterminer d’autres juridictions compétentes et d’autres loi applicables.

NOTE : La résolution du conflit de juridiction porte également sur l’effet qu’un jugement prononcé dans un pays aura dans un autre pays.

2.5 L’importance de la juridiction saisie

Un juriste français va toujours partie de la loi Française pour caractériser un élément de droit (s’agit-il d’un problème de fond, de forme, de contrat, de droits personnel, de capacité, de filiation, de droit parental, etc…. ?). Il détermine alors la catégorie de la question qui lui est posée.

Il va ensuite rechercher soit en droit interne soit dans des traités internationaux la règle de conflit de loi qui lui permettra de vérifier qu’il a bien la compétence pour répondre à la question (un juge français peut par exemple se démettre en faveur d’un juge étranger si une convention internationale déclare que c’est l’autre état qui à la compétence de juger) puis, s’il est compétent, la loi applicable à la catégorie. Ainsi, si la question est posée en France ou dans un autre pays, la réponse internationale qui y sera apportée peut être différente.

Prenons l’exemple d’un citoyen Portugais vivant en France et possédant des biens en France et au Portugal. Il rédige à la main un testament qu’il date et signe. Il s’agit donc d’un testament Olographe. Pour la France, la validité de ce testament est une question de forme. Il est donc valable en France même s’il a été rédigé par un citoyen Portugais. Pour un juriste Français , c’est le règlement européen du 04/07/2012 « Successions » qui s’applique car le Portugal n’est pas signataire de la convention de La Haye de 1961 sur la reconnaissance des testaments.  Ce règlement indique alors que le Portugal devrait reconnaitre le testament car il est valide en France, état où il a été rédigé.

A l’inverse, si la question est posée à un juriste Portugais, il s’agira pour lui d’une question de capacité des personnes ce qui implique que la loi applicable est la loi de nationalité de la personne qui a conclu le testament. Or la loi portugaise ne reconnait pas les testaments olographes. Le testament sera donc considéré comme nul pour un juriste Portugais. Si la question est posée des deux coté à la fois, il faut alors appliquer le principe de litispendance qui sera développé plus loin dans cet article.

2.6 Les lois de polices

Bien que l’on ait mentionné précédemment que les traités internationaux ratifiés ont une force supérieure aux loi françaises, il existe quelques exceptions à la règle.

La première concerne les lois de police. Il s’agit des lois dont le respect est jugé crucial par un pays pour la sauvegarde de ses intérêts publics, tels que son organisation politique, sociale ou économique, au point d’en exiger l’application à toute situation entrant dans son champ d’application, quelle que soit par ailleurs la loi applicable. (par exemple une loi d’embargo fondées sur des données de santé publique).

La loi de police court-circuite la recherche d’un traité international. Exemple : Supposons que dans un couple entre un Marocain et une Française, le mari soit seul propriétaire de l’appartement où vit le couple. Il demande à un juriste français s’il peut décider seul de vendre l’appartement. Dans ce cas, le juriste Français n’aura pas à rechercher à quelle catégorie juridique appartient la cession d’un immeuble et s’il existe un traité international relatif à cette question. En effet, l’article 215 du code civil est considéré comme une loi de police. Cet article stipulant que « Les époux ne peuvent l’un sans l’autre disposer des droits par lesquels est assuré le logement de la famille, ni des meubles meublants dont il est garni. » il répond directement à la question qui lui est posée. Il n’y a pas en France de code ou d’indication particulière permettant de lister toutes les lois de police. C’est la jurisprudence qui année après années définit le contour de ces lois de police.

2.7 L’ordre public international (OPI)

C’est en fait une notion assez floue qui regroupe un ensemble de valeurs qu’un état considère comme intangibles et supérieures à toutes autres. Cet ensemble mêle des intérêts généraux (ou publics), comme des intérêts politiques, moraux, économiques et sociaux. Il regroupe donc les principes de justice universelle considérés dans l’opinion française comme douée de valeur absolue et qui ne sauraient être remis en cause par une loi étrangères.

Cet ordre public international permet d’écarter les lois étrangères qui heurtent les valeurs essentielles d’un pays car elle y produirait des effets jugés intolérables par son peuple. Par exemple une loi étrangère qui appliquée à un divorce conduirait à une inégalité entre les parents du fait du sexe de chacun d’eux serait rejeté en France car contraire au principe d’égalité entre les hommes et les femmes.

IMPORTANT : Il ne faut pas confondre l’ordre public international dont on vient de parler et l’ordre public interne qui englobe lui les lois auxquels les citoyens français ne peuvent déroger en droit interne. Un exemple célèbre permettant de comprendre cette distinction est le cas d’un célèbre compositeur de musique Jean-Michel J. En droit interne français, on ne peut pas déshériter ses enfants (sauf cas d’indignité) et ceux-ci ont droit une part minimal d’héritage, définie par la loi française. Or dans notre exemple le défunt, Maurice J., vivait aux USA et avait fait un testament dans lequel il ne léguait aucun bien à son fils Jean-Michel. Ce dernier porta l’affaire devant les tribunaux français en arguant que la réserve héréditaire était d’ordre public et qu’il fallait à ce titre écarter l’application de la loi Californienne au profit de la loi Française. Telle ne fut pas l’avis de la court de cassation qui dans son jugement du 27/09/2017 affirma que « une loi étrangère désignée par la règle de conflit qui ignore la réserve héréditaire n’est pas en soi contraire à l’ordre public international français et ne peut être écartée que si son application concrète, au cas d’espèce, conduit à une situation incompatible avec les principes du droit français considérés comme essentiels » comme par exemple à maintenir les héritiers dans une situation de précarité économique ou de besoin. Ce qui n’était manifestement pas le cas en l’espèce.

Il ne faut pas non plus confondre l’OPI avec les lois de police. Les lois de police s’appliquent avant même que l’on recherche une loi applicable, alors que l’OPI rejettera une loi étrangère qui aurait été rendu applicable suite à l’application des règles de conflits de loi.

L’ordre public international peut évoluer dans le temps. Il n’est donc pas si intangible que ça. Ainsi, l’exception d’ordre public naguère opposée contre les lois étrangères qui admettaient la légitimation des enfants adultérins évince dorénavant celles qui l’interdisent. La question de la validité du mariage des personnes de même sexe suit également le même retournement de situation.

C’est la première chambre civile de la Cour de cassation qui est compétente pour définir l’ordre public international Français.

L’OPI peut avoir un effet atténué. L’idée est qu’on ne peut pas s’opposer avec la même force à l’application des lois étrangères, selon qu’il s’agit:

  1. Soit de créer une situation juridique en France (par exemple l’OPI refusera qu’une personne déjà mariée puisse contracter un nouveau mariage en France et devenir ainsi bigame en raison de l’applicabilité d’une loi étrangère désignée par les règles de conflit de lois) ,
  2. Soit de laisser une situation, qui s’est créée à l’étranger, produire des effets en France (cas d’un époux avec deux femmes marié dans un pays autorisant la polygamie et venant s’installer en France avec ces deux épouses) ce qui est constitutif de l’effet atténué de l’OPI.
  3. Afin de bénéficier de l’effet atténué de l’ordre public, la situation considérée doit ainsi être née valablement à l’étranger, et elle pourra produire ces effets en France alors même qu’elle n’aurait pu y être valablement constituée. Les personnes concernées pourront se prévaloir de cette situation afin d’acquérir des droits en France (toujours pour poursuivre notre exemple la seconde épouse de notre époux bigame pourra prétendre en France à une fraction de la pension de réversion qui est ainsi partagée avec la première épouse).

Il est important de se rappeler que l’OPI joue aussi dans d’autres pays pour des décisions prises selon la loi française.

Exemple un juge des USA a refusé de prendre en compte un contrat de mariage en séparation de biens, fait en France par deux français devant notaire qui ont quelques années plus tard déménagé au USA et y ont divorcé. Le contrat aurait dû être considéré comme valide aux USA en vertu des convention internationales car conforme à la loi du pays de signature.

Cependant le juge New-yorkais à fait jouer l’OPI américain car aux USA les contrats prénuptiaux doivent impérativement être passés avec le concours 2 avocats distincts pour défendre les intérêts des deux parties. Le contrat passé en France n’avait été rédigé que par un seul notaire. Le juge US a donc considéré que les droits fondamentaux de l’une des parties n’avaient pas été respectés.

2.8 L’applicabilité des traités

Avant de pouvoir appliquer les règles de désignation de compétence ou de désignation de loi applicable d’un traité, encore faut-il s’assurer que ce dernier peut à juste titre être sollicité par la situation juridique étudiée, et ce à plusieurs titres.

  1. Applicabilité Spatiale : Il s’agit ici de vérifier que le texte de source supranationale est bien applicable dans l’état ayant été saisie de l’affaire. A ce titre il faut vérifier que cet état est bien partie à la convention est que celle-ci y soit rentrée en vigueur. On peut, en effet,  trouver de nombreuses conventions signées par des états mais qui n’y ont jamais été ratifiées. Il y a également le cas du Royaume unis qui n’est plus partie depuis le Brexit aux règlements européens. Il faut également vérifier qu’il y a bien des éléments dans la situation internationale qui permettent son rattachement à l’état saisi.
  2. Applicabilité Temporelle : Les règlements internationaux indiquent leur date d’entrée en vigueur. Il faut donc vérifier que les faits en question ou selon les cas, la date de début de la procédure, soient bien postérieures à l’entrée en vigueur du traités. Par exemple pour la détermination du régime matrimonial il faut se référer aux droits internes des états pour les mariages conclus avant le 1/09/1992, à la convention internationale de la Haye pour ceux consacrés entre le 01/09/1992 et le 29/01/2019 puis au règlement Européen « Régimes matrimoniaux » pour ceux survenus après cette dernière date.
  3. Applicabilité matérielle : Il s’agit cette fois de vérifier les matières couvertes par le texte supranational. Le domaine d’application est généralement décrit dans les tous premiers articles du traité international
  4. Les exclusions : Afin de déterminer plus précisément leur domaine d’applicabilité matériel de nombreuses conventions indiquent explicitement les sujets proches qui ne sont pas concernés
  5. Les réserves : Une réserve est une déclaration unilatérale, faite par un Etat lorsqu’il signe ou ratifie un traité, par laquelle il entend exclure ou modifier l’effet juridique de certaines dispositions du traité à son égard. Il s’agit donc, ici de vérifier que certains états bien qu’ayant signés et ratifié la convention, n’ont pas émis des réserve à son application. Il peut s’agir de réserve territoriales (On peut par exemple citer le cas de nombreux pays musulmans qui indiquent que leur signature de la convention n’implique pas la reconnaissance de l’état d’Israël), de réserve d’équivalence( un état indique ne pas s’acquitter d’une obligation en vertu du traité da la manière imposée par le traité mais d’une manière qui lui est équivalente) , d’exclusion de certains articles du traités ou d’interprétation (un état subordonne son consentement à être lié par ce traité à une interprétation spécifiée du traité ou de certaines de ses dispositions). Note : certains traités rejettent explicitement toutes réserves.
  6. L’outil multilatéral pour les conventions OCDE. De nombreuses conventions bilatérales en matière de fiscalité suivent un format dit « modèle OCDE ». Le droit fiscal évoluant, plutôt que de devoir modifier toutes les conventions bilatérales de ce modèle et devoir les ratifier une nouvelle fois, plusieurs états ont décidé d’une modification commune qui s’appliquerait à l’ensemble des conventions bi latérales les concernant. Bien sur certains états n’ont pas signé cette convention multilatérale et de nombreux y ont mis des réserve. Ainsi lorsque l’on veut appliquer une convention fiscale bilatérale, modèle OCDE, applicable entre deux états, il faut bien vérifier si elle est impactée ou non par cette convention multilatérale car les versions disponibles ne sont pas consolidées avec les éventuelles impacts de cet outils. Le texte de la convention multilatérale et des réserves est disponible sur :  https://www.oecd.org/fr/fiscalite/conventions/convention-multilaterale-pour-la-mise-en-oeuvre-des-mesures-relatives-aux-conventions-fiscales-pour-prevenir-le-beps.htm

2.9 La coordination entre les traités.

Il peut arriver que plusieurs textes supranationaux soient applicables à une même situation. Il faut donc les départager de sorte qu’un seul ne puisse être appliqué.

On a déjà mentionné précédemment que les traités qui contiennent directement des règles matérielles et non pas des règle de désignation de juridictions compétentes ou de lois applicables sont prioritaires.

 En cas de conflit entre deux traités équivalent il faut vérifier s’ils n’indiquent pas déjà en leur seins des règles de coordination. Ce peut être des cas :

  1. D’abrogation de traités précédents comme Bruxelles II Ter qui abroge dans sont Article 104 le règlement Bruxelles II Bis,
  2. Ou des règles d’effacement partiel comme ROME II(art 28 al 2) vis-à-vis de la convention de La Haye de 1961 sur les accidents de la route puisque cette dernière n’est pas signée exclusivement par des états de l’UE),
  3. Ou des règles de prééminence (comme l’art 24 du règlement ROME I qui indique qu’il s’appliquera pour les pays de l’UE en lieu et place de la convention de Rome de 1991 sauf pour le Danemark).
  4. Ou de désignation d’un traité applicable à certaine matières (par exemple le traité « Obligation alimentaire » renvoie à la convention de la Haye de 2007 pour la désignation de la loi applicable.

2.10 La litispendance

C’est une exception de procédure qui demande à une juridiction compétente qu’elle se dessaisisse d’une affaire lorsqu’un même litige portant sur le même objet avec les mêmes causes et opposant les mêmes parties est également de la compétence d’une autre juridiction également saisie de ce litige.

La notion de même objet doit être interprété dans un sens très large. Par exemple il a été estimé que la demande en exécution d’un contrat par une partie devant une juridiction avait le même objet et la même cause qu’une demande en nullité par la seconde devant une seconde juridiction puisque les deux affaires avaient en fait comme objet la force exécutoire du contrat.

Ce n’est pas toujours la première juridiction choisie qui aura gain de cause. Par exemple le règlement européen Bruxelles I Bis prévoit des compétences exclusives pour la juridiction de l’état de situation d’un bien immobilier pour les droits réels et les baux concernant ces immeubles ainsi que pour la juridiction de l’état du siège social des sociétés pour les décisions concernant leur validité, dissolution ou la validité des décisions prises par leurs organes internes. Dans ces cas la première juridiction saisie devrait s’effacer devant celle qui a la compétence exclusive.

2.11 La connexité

C’est un cas légèrement différent de la litispendance. Ici, les deux juridictions sont saisies de deux litiges distincts mais suffisamment proche pour que dans le cadre de la bonne administration de la justice ce soit la même loi qui s’applique.

L’exception de connexité s’applique aux fins d’économie de procédure et de prévention des décisions inconciliables. Elle est admise aux seules conditions que deux juridictions relevant de deux Etats soient également et complètement saisies de deux instances faisant ressortir entre elles un lien de nature à créer une connexité

L’exception de connexité se rapproche « Forum non conveniens » des pays de common Law. La loi de ces pays reconnait un pouvoir discrétionnaire aux juges, de ne pas exercer leur compétence internationale à l’égard d’un litige qui relève pourtant de leur pouvoir juridictionnel, dès lors qu’ils estiment qu’il serait plus opportun que ce litige soit tranché par un for étranger également compétent, mieux placé et plus approprié pour connaître du litige.

2.12 La fraude à la loi

Un droit étranger peut, être écarté lorsque l’une des parties a volontairement manœuvré dans le seul but de faire appliquer la loi de ce pays et de se soustraire ainsi à la loi normalement applicable.

Un exemple célèbre est le cas de la princesse de Beaufremont (à la fin des années 1800) qui voulait divorcer alors que le divorce n’était, à l’époque, pas reconnu en France. Après avoir été séparée de corps selon le droit français, elle s’est installée provisoirement en Allemagne pour y obtenir la nationalité allemande, recouvrer aussitôt sa liberté matrimoniale, par application de la loi allemande qui procédait à la conversion automatique de la séparation de corps en divorce, et pouvoir ainsi se remarier avec un autre prince, roumain cette fois. La Cour a jugé que « la demanderesse avait sollicité et obtenu cette nationalité nouvelle non pas pour exercer les droits et accomplir les devoirs qui en découlent mais dans le seul but d’échapper aux prohibitions de la loi française ». La France a donc refusé de reconnaitre son divorce.

Attention : Il faut qu’il y ait une intention frauduleuse. Il n’est par exemple pas interdit d’apporter les immeubles situés en France à une SCI (ce qui a pour conséquence qu’ils sont alors considérés par la France comme des biens meubles et non plus comme des immeubles). Ce n’est que si l’on peut prouver que cet ameublissement n’a été fait que dans l’intention de rendre inapplicable la loi Française à ces immeubles que l’on pourra écarter une décision rendue par une loi applicable étrangère.

2.13 Le renvoi.

C’est un mécanisme d’après lequel le juge saisi d’un litige et qui doit trancher selon une loi étrangère n’applique pas le droit matériel de ce pays (c’est-à-dire le droit qui règle la question au fond) mais utilisera plutôt les règles de conflit de loi de ce pays (c’est-à-dire les règles qui désignent le droit applicable) qui pourront alors renvoyer à la loi d’un autre pays.

Exemple :

  • Un Français vit depuis de longues années avec sa seconde épouse, native du pays, à Québec où il possède des biens mobiliers et immobiliers. Il vient de décéder en octobre 2022. Il possédait également un immeuble à Toulouse et un à Marrakech. Ses enfant vivants toujours en France saisissent un notaire Français pour régler sa succession.
  •  Le notaire Français établit qu’il est compétent et que le règlement européen « Succession » est temporellement, spatialement et matériellement applicable à cette succession. Ce règlement désigne la loi de dernière résidence habituelle du défunt (donc le Québec) comme loi applicable.
  • La loi Québécoise désigne à son tour la loi de dernier domicile du défunt pour les meubles MAIS la loi de situation des immeubles comme étant applicable en matière de succession. Il s’agira donc de la loi québécoise pour les immeubles situé au Québec, de la loi Française pour l’immeuble de Toulouse et de la loi Marocaine pour celui de Marrakech. Il y a donc ici renvoi à deux autres lois.
  • Le notaire français doit -il accepter ces renvois ?
  • Oui pour l’immeuble Français car l’art 34 du règlement succession prévoit au point 1.a l’acceptation du renvoi vers un état de l’UE.
  • Pour l’immeuble situé à Marrakech, la loi marocaine désigne à son tour une autre loi applicable, cette fois la loi de nationalité du défunt. Il y a donc un renvoi de second niveau à la loi Française. Le notaire doit-il accepter ce renvoi ?
  •  La Cour de cassation a admis un renvoi de Second niveau à la loi Française (arret Riley du 11/02/2009), mais uniquement s’il assure l’unité successorale entre les biens meubles et immeubles. Ce ne sera pas le cas ici puisqu’une partie de la succession restera régit par la loi Québécoise. Le notaire doit donc refuser les renvois pour l’immeuble de Marrakech et lui appliquer la loi québécoise.
  • Note :il ne s’agit là que d’un exemple théorique, car en l’espèce il semble résulter de l’énoncé de cet exemple que le défunt possède des liens manifestement plus étroit avec le Québec qu’avec la France et que dans ce cas l’exception prévu à l’article 21.2 du règlement succession trouverait à s’appliquer et il aurait lieu de retenir l’application de la loi Québécoise pour tous les immeubles afin d’assurer une unité de loi successorale.

Les renvois peuvent être accepté totalement ou partiellement comme dans l’exemple précédent.

Ils sont acceptés pour les successions (renvoi de niveau 1 si pays de l’UE,  renvoi de niveau 2 si e second renvoi permet une unité successorale) ainsi que pour les questions ayant trait au statut personnel.

Ils sont cependant refusés

  • pour les divorces (Art 11 Rome III),
  • pour les régimes matrimoniaux (en général sauf exception)
  • et pour les questions portant sur le fond et forme des contrats.

Enfin lorsque le choix de la loi applicable par les parties est admis, celle ci désigne les lois matérielles du pays choisi, il n’y a donc alors pas de renvoi.

 

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Êtes-vous résident Fiscal Français?

Êtes-vous résident Fiscal Français?

La question peut paraitre saugrenue. Et pourtant…

Notre travail nous amène de plus en plus souvent à réaliser des missions à l’étranger.   Et on entend parfois dire « j’ai passé plus de 183j à l’étranger je ne dois donc plus faire de déclaration en France… »

Ce n’est pas si simple. Pour savoir si le Fisc considère que l’on est résident Français pour le paiement des impôts, il faut se référer à l’article 4B du code général des impôts.

La notion de résidence fiscale est utilisée aussi bien pour le paiement de l’impôt sur les revenus, que pour l’impôt sur la fortune immobilière et les droits de donation ou de succession.

Cet article 4B contient plusieurs critères et il suffit qu’un seul de ces critères soit rempli pour que l’on soit considéré comme un résident fiscal français.

Un fois que l’on est considéré comme résident fiscal Français alors nous sommes imposés sur l’ensemble de nos revenus et patrimoine mondiaux. Même les revenus non rapatriés en France sont ainsi imposables.

Note : A ce titre tous les revenus perçus hors de France (salaires, revenus fonciers, plus-values, dividendes, etc..) doivent être déclaré sur le formulaire 2047 de la déclaration d’impôt du contribuable. Les comptes et actifs détenus à l’étranger doivent eux être indiqué sur le Cerfa 3916 ou 3916bis (également joint à la déclaration d’impôts).

La non-réalisation de cette formalité fait encourir une amende de 1 500€ par année et par compte non déclaré (10 000e si le compte est situé dans un état non coopératif). De plus les sommes figurant sur ces comptes sont présumées êtres issues de revenus occultes (sauf preuve du contraire) et peuvent être soumises à l’impôt sur le revenu avec une pénalité de 80%.

Un non-résident sera lui imposés uniquement sur ses revenus de source Française

Il existe des exceptions à ce principe prévues à l’art 81 du code des impôts. En effet un salarié, résident Français au sens de l’article 4B, peut sous certaines conditions être exonéré totalement ou partiellement des revenus perçus à l’étranger.

  • Attention 1:  Il ne s’agit que des salariés ayant un lien de subordination avec leur employeur (sont donc exclu les personnes qui exercent des activités indépendantes à caractère agricole, commerciale, artisanale, libéral ainsi que les mandataires sociaux tels que les gérants majoritaires, les PDG, etc…).
  • Attention 2 : Les sommes exonérées sont prises en compte pour le calcul du taux effectif
    • Pour rappel le taux effectif consiste à prendre en compte à la fois les revenus imposables et les revenus non imposables en France pour déterminer un taux d’imposition sur l’ensemble de ces revenus puis à appliquer ce taux uniquement sur les revenus imposables en France.
  • L’employeur doit être une société Française, ou de l’espace économique Européenne ou d’un pays qui a conclu avec la France une convention de lutte contre la fraude Fiscale
  • L’activité doit être réalisée hors de France et hors de l’état du siège social de la société (Par exemple un salarié d’une société Espagnole considéré comme résident Français doit être envoyé hors de France et hors d’Espagne)
  • Pour les exonérations totales, le salarié doit être dans l’un des 3 cas suivants :
    • Soit , les rémunérations perçues à l’étranger y ont été soumises à un impôts équivalent à l’impôt français (c’est-à-dire qu’elles ont été soumises à un impôt sur le revenu pour un montant égal au moins au deux tiers de l’impôt qui aurait été exigible en France sur ces mêmes rémunérations)
    • Soit le salarié à réalisé une activité à l’étranger pendant au moins 183j au cours d’une période de 12 mois consécutifs.
      • Les 183j sont décomptés de la date de départ à la date de retour en France (les jours de déplacement pour se rendre dans le pays de la mission sont intégrés dans les 183j), y compris les Weekend, les arrêts maladie et les congés même si le salarié revient passer ses congés en France. Les 183j peuvent être réalisés en plusieurs périodes.
      • Le décompte des jours doit être établi de façon probantes (billet d’avion par exemple). Il a été jugé qu’une simple attestation de l’employeur indiquant que le salarié avait passé plus de 50% de son temps à l’étranger n’était pas un justificatif suffisant.
      • L’activité doit se rapporter limitativement à l’un des domaines suivants
        • Chantiers de construction ou de montage, installation d’ensemble industriel ainsi que leur mise en route, leur exploitation et l’ingénierie y afférente
        • La recherche ou l’extraction de ressource naturelles (il s’agit d’extraire du sous-sol. La pèche n’est pas considéré comme une extraction de ressources naturelle)
        • La navigation sur des navires de commerces immatriculés au registre international français
    • Soit le salarié effectue des activités de prospection commerciale à l’étranger pendant une durée minimale de 120j en vue d’accroitre la présence de l’entreprise ou d’augmenter ses exportations
  • Pour les exonérations partielles :
    • Le salarié doit percevoir un supplément de rémunération pour ses activités à l’étranger. Seul ce supplément de revenu ouvre droit à exonération
    • Ce supplément doit être versé en contrepartie de séjours effectués dans l’intérêt direct et exclusif de l’employeur
    • Le supplément de rémunération doit être fixé préalablement à chaque séjour à l’étranger
    • Le séjour doit être d’une durée minimal de 24h (exit les aller/retour effectué dans la même journée) et doit pouvoir être justifié (billet de transport, note d’hôtel,…)
    • Le supplément de rémunération doit être en rapport avec la durée et l’importance de la mission et ne doit pas dépasser 40% de la rémunération annuelle du salarié). Le versement de rémunérations forfaitaires sans rapport avec la durée de la mission sont donc exclues du dispositifs)

Enfin il existe également une autre exception à cette règle d’imposition des revenus mondiaux pour les salariés qui sont embauchés par une entreprise Française alors qu’ils demeuraient à l’étranger et qui deviennent résident fiscal français. Ce cas est traité dans l’article:  http://www.acacias-patrimoine.fr/2021/05/11/impatries-savez-vous-que-vous-avez-droit-a-de-nombreuses-exonerations-dimpots/

Une personne pourrait donc à partir du droit interne des états avec lesquels elle a des attaches se retrouver résidente de plusieurs de ces états et être, par là même, soumise à l’impôt dans chacun d’eux. Il existe heureusement de très nombreuses conventions internationales permettant d’éviter dans la plupart des cas ces doubles impositions. Ce point sera traité un peu plus loin dans cet article

Attention : Dans un couple la notion de résidence fiscale s’applique indépendamment à chacun des conjoints.

  1. Ainsi dans un couple marié sous un régime de communauté, si un seul des deux est résident fiscal français alors :
    1. Il y aura une imposition commune en France. L’époux non-résident étant imposé uniquement sur ces revenus de source Française s’il en a.
    2. l n’y a pas de prise en compte des revenus de source étrangère du conjoint non-résident pour le calcul du taux effectif (cf définition du taux effectif plus haut dans cet article).
    3. Cependant, le conjoint non-résident est pris en compte pour le calcul du nombre de parts
  2. Si dans un couple marié sous un régime séparatiste un seul des deux est résident fiscal français alors
    1. Il peut y avoir une imposition séparée à la condition que les deux conjoints ne vivent pas sous le même toit ( en France ou à l’étranger) et que cette situation ne soit pas juste temporaire
    2. Important : En raison de la présomption de vie commune des époux, c’est au contribuable de se prévaloir de l’imposition séparée. Ceci n’est pas aisé. Il a par exemple été jugé qu’un époux marié sous le régime de la séparation de bien qui vivait à Ryad pour son travail et revenait en France pour ses congés dans un domicile qu’il possédait avec son épouse en indivision devait être considéré comme vivant sous le même toit que son épouse.

A) Premier critère de l’article 4B du Code général des impôts

Le premier de ces critères indique « qu’il suffit d’avoir son foyer ou son lieu de leur séjour principal en France. »

Ça a l’air simple au premier abord.

Mais qu’elle est la différence entre le « foyer » et le « séjour principal » et qu’est-ce que la « France » au niveau fiscal ?

Étudions tout d’abord la notion de foyer.

La notion de « foyer »

Le foyer au sens fiscal est le lieu où le contribuable habite normalement avec sa famille. La jurisprudence précise que « Le foyer s’entend du lieu où le contribuable habite normalement et a le centre de ses intérêts familiaux. Il n’est pas tenu compte des séjours effectués temporairement ailleurs en raison des nécessités de la profession ou de circonstances exceptionnelles. Le lieu du séjour principal du contribuable ne peut déterminer son domicile fiscal que dans l’hypothèse où celui-ci ne dispose pas de foyer »

 Ainsi, aussi étonnant que cela puisse paraitre un célibataire ou une personne divorcée sans enfant n’a donc pas de foyer au sens fiscal.

A l’inverse, un étranger habitant hors de France mais qui aurait en France, une épouse, un partenaire de PACS et même un ou une concubine (arrêt du conseil d’état du 27 Janvier 2010 n°319897) serait considéré comme ayant un foyer en France.

De la même manière, si cet étranger à un enfant mineur qui vit en France,il sera aussi considéré comme ayant son foyer en France (ce n’est cependant pas le cas si l’enfant est majeur).

On peut donc s’apercevoir que quelques soit le nombre de jours passés en mission à l’étranger, dès qu’un membre de son foyer familial vit en France, le contribuable sera considéré comme résident fiscal Français.

Ce n’est que si l’on n’a pas pu déterminer si le contribuable potentiel avait un foyer en France (cas par exemple d’un célibataire ou d’une personne dont la famille vit dans un autre pays)  que l’on va s’intéresser à la notion de « séjour principal ».

La notion de « séjour principal »

Comme indiqué précédemment, on ne va s’intéresser à cette notion que si le contribuable n’a pas de foyer au sens fiscal en France.

On considère que la France est le lieu de séjour principal d’une personne si cette dernière passe plus de temps en France que dans n’importe quel autre pays.

Il n’y a pas ici de notion de 183j.

Ainsi si la personne passe 150j en France, 130 jours en Espagne, et 85j en Allemagne, elle sera considérée comme ayant son lieu de séjour principale en France même si elle a passé au global plus de jour à l’étranger.

Mais qu’est-ce que le Fisc considère comme la France ?

La notion de « France » au niveau fiscal

Pour l’application de l’impôt sur le revenu, la France s’entend exclusivement

  • De la France continentale, des iles du littoral et de la Corse
  • Des départements d’outre-mer (DOM)  (Guadeloupe, Martinique, Guyane, Mayotte et La Réunion)

Ne sont donc pas considérés comme faisant partie de la France au niveau fiscal les collectivités d’outre-mer (COM) qui ont chacune leurs finances propres. Sont donc exclus :

  • Saint Pierre et Miquelon,
  • Wallis et Futuna
  • La Polynésie Française,
  • La nouvelle Calédonie,
  • Les terres australes et Antarctiques Française
  • Saint Barthélémy
  • La partie française de l’ile de Saint Martin

B) Second critère de l’article 4B

« Les personnes qui exercent en France une activité professionnelle, salariée ou non, à moins qu’elles ne justifient que cette activité y est exercée à titre accessoire. »

On considère que l’activité exercée en France l’est à titre principale si c’est celle à laquelle le contribuable consacre le plus de temps effectif même si ce n’est pas celle qui dégage le plus de revenus.

Ce n’est que si on ne peut pas déterminer précisément le temps passé ou s’il y a égalité de temps entre les activités en France et les activités à l’étranger, que l’on regarde alors celle qui génère le plus de revenu

Cas particulier : pour les dirigeants de grandes entreprises dont le chiffre d’affaire dépasse 250 millions d’Euros (hors président du conseil de surveillance), la loi française considère qu’ils exercent en France leurs activités principale dés que le siège social de l’entreprise est situés en France (C’est une clause qui permet de récupérer les salaires des dirigeants d’entreprises Françaises qui se partagent entre plusieurs pays) . Il ne s’agit toutefois que d’une présomption simple qui peut être combattue en en prouvant que l’activité de dirigeant de la société française ne constitue pas leur activité principale).

C) Troisième critère de l’article 4B

Sont également considéré comme résident fiscal Français les personnes qui ont en France le centre de leurs intérêts économiques.

On considère que la France est le centre des intérêts économiques si c’est le pays où la personne rempli l’un des critères suivants :

  1.  Elle y a constitué ses principaux investissements
  2. Elle y possède le lieu de ses affaires
  3. Elle en tire la majeure partie de ses revenus
    1. Si une personne à un patrimoine important dans un pays, et qu’elle tire ses revenus d’un autre pays, le Conseil d’état a décidé que c’est le pays d’où elle tire le plus de revenus qui sera considéré comme le centre de ses intérêts économiques. Il est a noté que cette comparaison doit être effectuée chaque année d’imposition.
    2. Pour une personne qui ne tire ses revenus que d’une pension de retraite, alors le centre des intérêt économiques est le pays qui verse sa retraite. Par exemple un retraité français qui part s’installer au Portugal sera considéré par la France comme résident fiscal français et pourra être soumis à l’impôt en France sur le montant de ses retraites.

D) Quatrième critère de l’article 4B

Il s’agit plus d’un cas particulier que d’un critère.

En effet sont également considéré comme ayant leur domicile fiscal en France les agents de l’Etat, des collectivités territoriales et de la fonction publique hospitalière qui exercent leurs fonctions ou sont chargés de mission dans un pays étranger et qui ne sont pas soumis dans ce pays à un impôt personnel sur l’ensemble de leurs revenus.

L’évitement des doubles impositions

Si vous répondez à l’un des critères précédents, alors vous êtes fiscalement résidents français.

Il faut maintenant savoir si vous êtes aussi résident fiscal d’un autre pays. Chaque pays possède ces propres critères. Par exemple pour les USA dés que vous avez la nationalité américaine vous êtes considéré comme résident américains et donc êtes imposable aux états unis sur vos revenus mondiaux où que vous viviez dans le monde.

Avant de regarder les conventions internationales, il faut donc déjà vérifier le droit interne de l’autre pays. Il n’est pas ici possible d’exposer l’ensemble des critères car chaque pays à sa propre législation.  La détermination n’est pas toujours aisée. Il peut être nécessaire de demander un « certificat de coutume » dans l’autre pays. (Il s’agit d’un avis donné par un juriste de cet autre pays indiquant si dans son droit interne la personne y est ou non imposable.)

Si vous n’êtes pas considéré comme résident fiscal d’un autre pays alors vous être alors simplement résident fiscal français et imposable en France sur l’ensemble de vos revenus mondiaux sauf exceptions mentionnées au premier paragraphe (art 81 et impatriés).

Ce n’est que si le droit interne de l’autre pays vous considère aussi comme une personne imposable que l’on doit vérifier s’il existe des conventions multilatérales ou bilatérale entre la France et cet autre pays.

S’il n’existe pas de convention entre la France et cet autre pays, alors pour l’impôt sur les revenus et l’impôt sur la fortune immobilière vous allez subir une double imposition. (le résultat de la double imposition peu même dépasser le montant de vos revenus si l’autre état est sur la liste noire des états non coopératifs).

Il n’en va pas de même pour les droits de mutation en cas de donation ou de succession. En effet dans ce cas l’article 784 A du Code général des impôts permet de déduire du montant des droits à payer en France, le montant des droits de mutation payés à l’étranger sur les biens situés hors de France.

S’il existe une convention, celle ci va préciser quel pays a le droit d’imposer chaque type de revenus et lorsque les deux pays peuvent imposer, comment sont alors éviter ou réduit les doubles impositions.

Les conventions définissent le plus souvent des critères cette fois hiérarchisés permettant de déterminer le lieu de résidence du contribuable. « Hiérarchisés » signifie que dès que l’un des critères permet de définir l’état de résidence d’une personne on arrête de regarder les critères suivants.

Nous ne rentrerons pas ici dans le détail de ces critères qui peuvent à eux seuls faire l’objet d’un article complet. Nous attirons juste l’attention du lecteur sur l’importance des mots.

  • En effet la notion de « foyer permanent » des convention modèles OCDE n’est pas identique à la notion de « foyer » au sens de l’article 4B du droit français. Elle recouvre dans la convention toute forme d’habitation permanente (maison , appartement, meublé) que l’intéressé soit propriétaire, locataire ou même qu’il en dispose à titre gratuit. Même une résidence secondaire dans laquelle l’intéressé ne passerait que quelques jours par an sera considéré comme un « foyer permanent » si l’intéressé peut s’y rendre quand il veut.
  • Le lieu de séjour habituel de la convention ne correspond pas non plus à la notion de résidence habituelle de l’article 4B. En effet le séjour habituel se détermine par rapport à la personne du contribuable, de la fréquence, de la durée et de la régularité du séjour du contribuable sans que la durée soit un facteur déterminant

Attention également, la convention s’applique uniquement s’il y a double imposition (CE du 9 novembre 2015 n° 370054 et n° 371132) ( avant on pouvait aussi l’appliquer pour permettre des doubles exonération). Ceci signifie que si l’autre état ne taxe pas le contribuable (certain état peuvent exonérer certains revenu) , la France considère que la convention ne s’applique pas. Il faut donc pouvoir prouver qu’il y a eu taxation dans l’autre pays (attestation fiscale d’une autorité fiscale compétente)

Il faut également lire attentivement le champ d’application de la convention (certaines ne traitent que des revenus et pas des successions par exemple. Quasiment aucune ne traite des donations) et vérifier leur validité (par exemple la convention Franco-Suisse de 1953  sur les succession a été dénoncée par la France le 01/01/2015 et n’est donc plus applicable)

Autre point d’attention : les personnes concernées par la convention. Par exemple la convention entre la France et Monaco ne s’applique qu’aux personnes de nationalité Française ou Monégasque. Elle ne s’applique pas par exemple à un Italien résident en France et travaillant à Monaco.

Enfin, pour les conventions rédigées selon le modèle OCDE on ne doit pas se limiter à la lecture de la convention elle même. Il existe ce qu’on appel un « outil Multilatéral » qui permet aux états d’appliquer ou non certaines options aux conventions bilatérales qui viennent modifier l’application des conventions sans en modifier le texte.

Il n’est donc pas simple de déterminer soit même les règles d’imposition. Nous vous conseillons de vous faire accompagner d’un professionnel spécialisé en droit international privé.

Cas particulier

Comme la loi française n’est jamais simple. Le code monétaire et financier dans son titre V « Relation financières avec l’étranger » modifie la notion de résident et de non-résident et même de « France » dans les cas suivants :

  • Investissements directs ou vente par des étrangers en France (détention ou vente de plus de 10% des parts ou droits de vote)
  • L’acquisition ou la cession d’entreprises non-résidentes par des résidents
  • L’acquisition ou la cession de biens immobiliers à l’étranger par des résidents et en France par des non-résidents

La « France »  est  alors définie comme La France métropolitaine y compris la Corse plus les DOM plus les COM (à l’exception de Wallis et Futuna) et étrangement plus la principauté de Monaco.

Sont considérés comme résidents : les personnes physiques ayant leur principal centre d’intérêt en France, les fonctionnaires et autres agents publics français en poste à l’étranger dès leur prise de fonctions, ainsi que les personnes morales françaises ou étrangères pour leurs établissements en France.

Sont considérés comme non-résidents : les personnes physiques ayant leur principal centre d’intérêt à l’étranger, les fonctionnaires et autres agents publics étrangers en poste en France dès leur prise de fonctions, et les personnes morales françaises ou étrangères pour leurs établissements à l’étranger.

Par centre des intérêts il faut entendre le domicile principal, c’est-à-dire le lieu d’habitation occupé le plus fréquemment. Le critère du domicile doit être prépondérant sur celui du lieu de l’activité professionnelle.

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Faut-il racheter des trimestres de retraite et des points AGIRC/ARRCO ?

Faut-il racheter des trimestres de retraite et des points AGIRC/ARRCO ?

Qu’il vous manque des trimestres de cotisation ou que vous souhaitiez partir plus tôt à la retraite deux grands types de solutions s’offrent à vous.

  • Soit, vous rachetez des trimestres et/ou des points de retraite
  • Soit vous vous constituez une épargne dans laquelle vous pourrez puiser pour vos vieux jours ou qui vous assurera des revenus complémentaires.

Dans cet article traiterons du rachat de trimestres et de points pour la retraite des salariés. Pour les professions libérales, les fonctionnaires, les commerçants et les professions non salariées les règles de calcul de la retraite et de rachat sont spécifiques à chaque branche. Vous pouvez nous contacter pour chaque cas particulier.

Tout d’abord nous ferons un rappel sur le calcul de la retraite des salariés, puis nous aborderons le rachat des trimestres au régime de la sécurité sociale et de points AGIRC/ARRCO.  Nous effectuerons enfin une comparaison d’achat à différents moments de votre carrière.

Dans un prochain prochain article nous effectuerons une comparaison entre ces rachats et d’autres dispositifs de préparation de sa retraite (PER, Assurance vie, immobilier …)

La retraite, comment ça se calcule ?

A)     Il y a d’abord la retraite de base.

Elle se calcule de la manière suivante :

Pension brute = SAM x T x Nb trimestre cotisés / Nb Trimestre à Obtenir

Dans cette formule :

  • SAM représente la moyenne des 25 meilleurs salaires brut annuels que vous avez eux durant votre carrière, réévalués en fonction des années et plafonnés chaque année d’obtention au PASS (Plafond annuel de la sécurité social. A titre d’exemple 26 892 en 2000, 34 620 en 2010, 41 136€ en 2021). Les coefficients de revalorisation des salaires en fonction de l’année de perception sont consultables sur https://www.legislation.cnav.fr/Pages/bareme.aspx?Nom=revalorisation_coefficient_revalorisation_salaire_cotisation_bar
    • Note : Les coefficients de revalorisation ne compensent pas l’évolution du cout de la vie et du PASS. Ainsi un salarié qui prendrait sa retraite aujourd’hui en ayant été ces 25 dernières années au-dessus du PASS aurait aujourd’hui un SAM au maximum de 37 200€ et non de 41 136€. Ceci implique que la pension maximale au taux plein est à ce jour de 37 200 * 50% = 18 600€ brut seulement par an.
  • T représente le Taux de calcul de la pension.
    •  Il correspond à 50% avec une décote ou une surcote
    • Une décote de 1.25% par trimestre manquant lui est appliquée (plafonné à un maximum de 20 trimestre manquant soit 25% max).
    •  A l’inverse, une surcote de 1.25% par trimestre peut être appliqué pour chaque trimestre travaillé au-delà de la durée de cotisation requise. Sans plafonnement. Mais attention, seuls les trimestres cotisés au-delà de la durée requise donnent droit à surcote. Les trimestres « assimilés » (chômage, maladie, etc.) n’y ouvrent pas droit.
  • Nb trimestre cotisés : Correspond au nombre de trimestres acquis durant votre carrière.
    • Attention ce n’est pas le nombre de trimestres travaillés car vous pouvez obtenir des trimestres pour maternité, pour éducation, pour des périodes de maladie, et également parce que le nombre de trimestres acquis sur une année dépend d’un montant de cotisation et pas d’une durée.
    • Ainsi si vous travaillez à temps partiel sur une année vous pouvez très bien n’acquérir qu’un trimestre et à contrario si vous avez un salaire important, vous pourriez acquérir 4 trimestres en ne travaillant qu’un seul mois. En 2021 un revenu annuel de 1 554,5 €  brut (150h de SMIC) permet d’acquérir un trimestre.
    • Il n’est toutefois pas possible d’acquérir plus de 4 trimestres par an quelques soit votre salaire.
    • Le nombre de trimestres que vous avez déjà acquis peut être récupéré sur le site : https://www.lassuranceretraite.fr  (il est possible de se connecter via FranceConnect si vous n’avez pas déjà un compte)
  • Nb Trimestre à Obtenir :  Correspond au nombre de trimestres que vous devez acquérir pour obtenir le taux plein. Ce nombre de trimestre est fonction de votre année de naissance (https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F35063 pour le détail par année)

On s’aperçoit donc de 2 points importants :

  1. La base de calcul est plafonnée au Plafond annuel de la sécurité social. Même avec la totalité des trimestres nécessaires acquis on ne peut pas avoir en théorie plus de 20 568€ brut par an de retraite de base et comme indiqué plus haut avec les coefficients de revalorisation on ne peut pas espérer en pratique avoir un SAM de plus de 37 200€ soit une pension de 18 600€. (Heureusement il y a les complémentaires AGIRC/ARRCO pour compléter, cf plus loin)
  2. Lorsque qu’il manque des trimestres, on subit une double peine. D’une part le mécanisme de la décote qui baisse de 1.25% le taux de calcul par trimestre manquant et d’autre part on a un ratio inférieur à 1 pour le ratio « nb de trimestres cotisés/Nb de trimestre à obtenir »

Comme on le verra plus loin, le mécanisme de rachat de trimestres permet soit de jouer uniquement sur T en supprimant des pénalités de 1.25% par trimestre manquant, soit de jouer à la fois sur T et sur le ratio des trimestres (mais dans ce second cas ça coute plus cher)

Note 1 : Il est rappelé qu’une majoration de durée d’assurance de quatre trimestres est attribuée aux femmes assurées sociales, pour chacun de leurs enfants.

Note 2 : Il est également attribué une majoration de 4 trimestres au bénéfice de l’un ou l’autre des deux parents assurés sociaux pour chaque enfant mineur au titre de son éducation pendant les quatre années suivant sa naissance ou son adoption. Les parents doivent définir d’un commun accord la répartition entre eux de cette majoration avant les quatre ans et demi de l’enfant faute de quoi les 4 trimestres sons attribués par défaut à la mère.

Note 3 : La pension est majorée de 10% pour les parents ayant eu au moins 3 enfants

B) Il y a ensuite les points AGIRC/ARRCO correspondant à la retraite complémentaire

Lorsque l’on travaille on acquière des points à l’AGIRC/ARRCO.

Pour cela on distingue 2 tranches. La première pour la partie de votre salaire brut qui est inférieur au PASS (pour rappel 41 136€ en 2021), la seconde pour ce qui est au-dessus.

Le taux de cotisation en 2021 pour la tranche 1 est de 6.2% et il est de 17% pour la tranche 2

Ces cotisations vous permettent d’acheter des points. Le cout d’achat d’un point en 2021 est de 17,3982€.

Ainsi par exemple pour un salaire brut de 48 000€ , le salarié cotise pour l’acquisition des points :

       41 136 * 6.2% +  (48 000 – 41 136)*17% = 3 717.312€.

       Il va donc acquérir 3 717.312 / 17.3982 = 213.66 point Agirc Arrco

Note 1 : Le nombre de points au moment de la retraite est majoré de 10% pour les parents ayant eu au moins 3 enfants.

Mais comment se fait-il que lorsque vous regardez votre feuille de paye vous ne retrouviez pas ces taux de 6.2% et 17% ?

Pour 2 raisons.

  1. La première c’est que les cotisations sont à 40% à charge du salarié et à 60% à charge de l’employeur.
  2. La seconde c’est que pour équilibrer les systèmes de retraite tout ce que vous cotisez ne sert pas à acquérir des points. 

En effet :

  • Il y a tout d’abord le taux d’appel à 27% qui s’ajoute aux cotisations et qui ne génère pas de points.
  • Ensuite s’ajoute une contribution d’équilibre générale de 2.15% sur la tranche 1 et de 2.7% sur la tranche 2.
  • Enfin une contribution d’équilibre technique de 0.35% sur les tranches 1 et 2.
  • Vous cotisez en fait à 10.37% sur la tranche 1 et à 24.64% sur la tranche 2 répartis à 60/40 entre l’employeur et le salarié mais uniquement 6.2%(tranche 1) et 17%(tranche 2) permettent d’acquérir des points retraites.

Là encore le site https://www.lassuranceretraite.fr   vous permet de savoir combien de points vous avez déjà obtenus.

C’est bien j’ai acquis des points mais qu’est-ce que j’en fait maintenant ?

Si vous partez en ayant le nombre de trimestres requis pour le taux plein, c’est presque simple.

Il suffit de multiplier le nombre de point acquis par la valeur de service (1.2714€ en 2021). Par exemple si vous avez cumulé 12 000 points AGIRC/ARRCO au cours de votre carrière vous percevrez une complémentaire de 12 000 x 1.2714 = 15 256.8€ brut par an.

Cependant afin de vous inciter à travailler plus longtemps, si vous partez l’année du taux plein, vous avez une décote de 10% pendant 3 ans sur le montant versé par la complémentaire.

Si vous travaillez un an de plus vous la percevez à 100% dés la première année.

Et au-delà vous obtenez 10% de majoration par année supplémentaires jusqu’à 66 ans.  Cette majoration ne s’applique toutefois que sur la première année de votre retraite et pas de manière viagère. Exemple si vous aviez le taux plein à 62 ans et que vous décidiez de partir en retraite qu’à 65 ans non seulement vous aurez acquis des points supplémentaires pendant ces 3 années supplémentaires, mais l’année suivant votre départ vous percevrez 2 x 10% = 20% de majoration sur votre retraite complémentaire.

Que se passe-t-il pour ma complémentaire si je pars en retraite avant d’avoir obtenu le nombre de trimestres nécessaires pour le taux plein ?

Et bien comme pour la retraite de base vous allez subir une décote

Si vous avez plus de 62 ans et s’il vous manque moins de 20 trimestres par rapport au nombre exigé pour l’obtention d’une retraite au taux plein, votre retraite complémentaire sera minorée soit en fonction de votre âge soit du nombre de trimestres manquants. C’est la solution la plus favorable qui est retenue.

Lorsque le nombre de trimestres manquants est supérieur à 20 trimestres, seul le coefficient correspondant à votre âge s’applique.

Le tableau de calcul des coefficients de minoration est disponible sur : https://www.agirc-arrco.fr/fileadmin/agircarrco/documents/instructions/Coefficients-de-minoration.pdf

IL est également possible de partir en retraite à partir de 57 ans sans avoir acquis tous ses trimestres. Un autre tableau, également accessible via le lien précédent, vous permet de déterminer le coefficient de minoration qui vous sera alors appliqué.

Par exemple vous êtes nés en 1966, et vous souhaitez partir à 62 ans en ayant obtenus 160 trimestres au lieu des 169 requis pour votre année de naissance. Le coefficient de minoration pour trimestres manquant est de 0.91. Celui en fonction de l’âge de départ est de 0.78. On retient donc 0.91. La pension complémentaire sera donc (en prenant le nombre de point acquis de l’exemple précédent) :

12 000 x 1.2714 x 0.91 = 13 883€ brut par an.

Comment fonctionne le rachat de trimestres ?

Etape 1 : Tout d’abord il faut que vous calculiez la moyenne des vos trois dernières années de revenus brut (pour être plus précis en langage administratif « les trois années civiles qui précèdent la période du 1er juillet au 30 juin comprenant la date de la demande de rachat ». Si par exemple vous faites votre demande de rachat le 2 février 2021, il faut faire le calcul sur les années 2017,2018 et 2019 car il faut prendre les années civiles précédant la période du 01/07/2020 au 30/06/2021).  

Les salaires doivent être revalorisés comme pour le calcul du SAM (cf plus haut dans cet article pour le lien sur le tableau des taux de revalorisation).

Etape 2 : Vous devez ensuite décider si votre rachat agira uniquement sur le Taux T (c’est-à-dire diminuera uniquement les pénalités de 1.25% par trimestre racheté) ou s’il agira à la fois sur le taux et la durée de cotisation pour supprimer les deux facteurs de la double peine évoquée précédemment. La seconde option est environ 48% plus chère que la première.

NOTE IMPORTANTE : Le rachat « taux + durée » a également un effet positif sur la retraite complémentaire car les trimestres rachetés sont aussi pris en compte par l’AGIRC/ARRCO et ont donc un impact sur les coefficients de minoration.

Etape 3 : Il vaut ensuite déterminer le cout de rachat d’un trimestre en fonction de votre âge et du salaire moyen que vous venez de calculer(Pour 2021 le tableau est disponible sur  Circulaire Cnav 2021/13 du 30/03/2021)

Par exemple pour une personne née en 55 ans avec un SAM de 40 000€ rachetant au régime « Taux + durée », le prix de rachat sera de 15.90% x 40 000 = 6 360€ (à noter qu’il vaut mieux avoir dans ce cas un revenu supérieur au PASS car  le cout de rachat ne serait alors que de 5 888€. 😉 il y a des aberrations des fois ….).

A titre de comparaison une personne âgée de 40 ans ne paierait que 11.02% x 40 000 = 4 408€ et une personne de 30 ans 7.93%x40 000 = 3 172€. L’impact de l’age auquel ont fait le rachat est donc important.

En résumé, plus vous effectuez des rachats de trimestres en étant jeune moins cela vous coute cher mais plus vous prenez de risque sur un changement législatif avant la liquidation de votre retraite

Etape 4 : Vous devez décider du nombre de trimestres à racheter

Vous pouvez racheter un maximum de 12 trimestres.

Les trimestres rachetables sont :

  • Les trimestres d’études supérieures à condition d’avoir été affilié au régime général dès la fin de vos études (diplôme obtenu en France, en suisse, dans un pays de l’espace économique Européen et dans les pays liés à la France par une convention internationale de sécurité sociale)
  • Les années au cours desquelles vous étiez affiliés au régime de la sécurité sociale mais pour lesquelles vous n’avez pas pu valider 4 trimestres,
  • Les années d’apprentissage (dans la limite de 4 trimestres et à condition que l’apprentissage est eu lieu entre le 1er juillet 1972 et le 31 décembre 2013) 

Remarque 1 : Les trimestres sont comptés par tranche de 90 jours.

Exemple :

  • Vous souhaitez racheter une année d’étude courant du 15/10/1989 au 30/06/1990. Soit une durée de 259 jours. Cela correspond à 259/90 = 2.87 trimestres. Vous ne pourrez donc racheter que 2 trimestres (il n’y a pas d’arrondi au plus proche)

Remarque 2 : Les trimestres rachetés ne peuvent pas conduire à obtenir plus de 4 trimestres pour une année civile.

Exemple :

  • Vous souhaitez rachetez la période du 01 Janvier 1990 au 30 juin 1990 correspondant à votre dernière année d’étude et vous avez travaillé de septembre à décembre 1990 ce qui vous a permis de cotiser pour l’équivalent de 3 trimestres.
  • Du 01/01/1990 au 30/06/1990 il s’est écoulé 181 jours soit 2 trimestres (181/90).
  • Comme vous avez déjà cotisé pour l’équivalent de 3 trimestre en 1990, vous ne pourrez racheter qu’un trimestre.

Remarque 3 : Les trimestres rachetés ne peuvent pas conduire à dépasser le nombre de trimestres nécessaires pour l’obtention du taux plein.

Bon à savoir :

Si vous faites une demande de rachat avant le 31 décembre de la dixième année suivant vos études supérieures vous bénéficiez d’un abattement de 670€ par trimestre pour un rachat au taux seul et de 1 000€ par trimestre pour un rachat taux + durée. L’abattement s’applique sur au plus 4 trimestres. Particularité supplémentaire, vous pouvez dans ce cas demander un échelonnement mensuel de votre paiement sur 1, 3 ou 5 ans quelques soit le nombre de trimestres rachetés.

Enfin rien n’oblige à racheter tous les trimestres possibles en une seule fois. Vous pouvez effectuer plusieurs demandes tout au long de votre carrière.

Remarque 4 : Le paiement peut être effectué en une seule fois ou être échelonné mensuellement sur une durée fonction du nombre de trimestres rachetés.

  • 1 trimestre => Paiement en une fois
  • de 2 à 8 trimestres => Paiement possible en 12 ou 36 mensualités
  • de 9 à 12 trimestres => Paiement possible en 12 , 36 ou 60 mensualités

Note : En cas d’échelonnement sur une période de plus d’un an, les sommes restantes dues à l’issue de chaque période de 12 mois sont majorées par l’indice d’évolution des prix à la consommation hors tabac.

Etape 5 :  En fonction de votre imposition vous décidez de la durée d’échelonnement optimale en maximisant votre baisse d’impôt tout en restant dans la tranche la plus élevée possible.

Est-ce que l’on peut aussi racheter des points AGIRC/ARCCO ?

Bien sur !!!

Le prix de rachat est déterminé par la formule suivante :

Coût = Nb de points à racheter x Valeur du point Agirc-Arrco x Coefficient d’âge

La valeur du point AGIRC/ARRCO au 31/08/2021 est de 1.2714.

Son évolution peut être obtenu sur https://www.insee.fr/fr/statistiques/serie/010593202 .

Le coefficient d’âge est donné par le tableau disponible sur le lien suivant :  https://www.agirc-arrco.fr/fileadmin/agircarrco/documents/Doc_specif_page/rachat_points.pdf

Par exemple à 55 ans, le coefficient à appliquer est de 25.7. Le rachat d’un point retraite coutera donc 1.2714*25.7 = 32.675€

Vous êtes limité à un rachat de 140 points point par année et sur une durée maximale de 3 ans. Les points rachetés doivent correspondre aux trimestres rachetés au régime de la sécurité sociale. Si la période rachetée ne correspond qu’à une fraction d’année, les 140 points sont proratisés pour correspondre à un nombre entier de trimestre.

NOTE : Contrairement au régime de la sécurité sociale, le rachat de points ne peut se faire qu’une seule fois pendant votre carrière et doit également être réglé en une seule fois.  Donc si vous envisagez de rachetez en plusieurs fois vos trimestres retraite auprès de la sécurité sociale, il faut attendre le dernier rachat de trimestres pour lancer le rachat de points AGIRC/ARRCOsi vous voulez couvrir l’ensemble de la période

Ainsi, une personne de 55 ans qui aurait racheté 12 trimestres de sécurité sociale soit 3 ans devrait payer 3*140*1.2714*25.7 = 13 723.49€ en une fois.

Bien sûr vous n’êtes pas obligé de racheter à l’AGIRC/ARRCO la totalité des périodes rachetées au régime de la sécurité sociale.

Exemples de rachats

Nous allons comparer ici le rachat fait à différent moment de leur carrière par trois personnes différentes toutes ayant effectuées des études supérieures et prenant leur retraite dans les mêmes conditions.

On suppose que

  • Tous les trois auront acquis 12 000 points AGIRC/ARRCO au moment du départ à la retraite.
  • Il leur manquera à chacun 12 trimestres pour partir à la retraite à 62 ans.
  • Qu’ils font un rachat de 12 trimestres au barèmes « taux + durée » de la sécurité sociale
  • Qu’ils décident de racheter les points correspondant à ces mêmes périodes à l’AGIRC/ARRCO soit 3 x 140 = 420 points
  • Ils ont un SAM estimé sur les 25 meilleures années de leur carrière au moment du départ de 37 200€. ( Pour rappel le salaire de chaque année est plafonné au PASS de l’année où il a été acquis. Il est revalorisé par des coefficients fournis par la CNAV qui ne permettent pas de dépasser en 2021 un SAM de 37 200€)

Premier cas : Le rachat est effectué à l’âge de 28 ans,. Par hypothèse le SAM sur les 3 dernières années est de 28 000€ brut. Mr est dans la tranche marginale d’imposition (TMI) de 11% pour un fraction de son salaire de de 3 000€. Au vu de sa date de naissance (1973), il lui faut 172 Trimestre pour obtenir le taux plein.

Second cas : Rachat à l’âge de 40 ans . SAM sur les 3 dernières années 41 000€ brut. TMI 30% pour 4 500€. Il lui faut 172 Trimestre pour obtenir le taux plein.

Troisième cas : Rachat à l’âge de 55 ans, SAM sur les 3 dernières années : 55 000€ brut. TMI 30% pour 16 000€. Il lui faut 169 Trimestre pour obtenir le taux plein

Dans un premier temps, nous allons calculer le montant de pension globale retraite s’ils n’effectuent aucun rachat. Dans notre exemple, le calcul est identique pour les 3 cas :

                Retraite de base

                               P =  37 200 * (50% – 12 x 1.25%) * (172 -12)/172 = 12 111€ par an

                Retraite complémentaire

                               Coefficient de minoration pour 12 trimestres manquant : 0.88

                               Coefficient de minoration pour un départ à 62 ans : 0.78

                               On prend le plus avantageux des deux soit 0.88.

                               P =  12 000 x 1.2714 x 0.88 = 13 425€

                Pension globale sans rachat =  12 111 + 13 425  = 25 536 € (soit 2 128€ brut par mois)

Seconde étape : calcul des couts de rachat

Cas 1 :  Rachat à 28 ans

  • a) Cout du rachat des trimestres

Pour un revenu moyen des 3 années précédentes de 28 000€ et un âge de 28 ans le tableau de la CNAV indique pour 2021 un prix forfaitaire de 2 041€ par trimestre pour le barème « Taux + durée ».      

Comme le rachat à lieu moins de 10 ans après la fin des études, Mr à droit à une minoration de 1 000e pour un maximum de 4 trimestres.

Le cout de rachat des trimestres est donc de

        (2 041 – 1000) x 4 + 2 041 x (12 -4) = 20 492€

  • b) Cout des rachats AGIRC/ARRCO

Le tableau des coefficients de rachat 2021 pour une personne de 28 ans nous indique une valeur de 22.9. On a donc un cout de rachat de

        420 * 1.2714 * 22.9 = 12 228€

  • c) Cout global

Cout total : 20 492 + 12 228 =  32 720€

Comme Mr X est dans une tranche à 11% pour seulement 3 000€, il ne pourra pas bénéficier d’une déduction d’impôt sur la totalité de ses rachats et il a de plus intérêt à ne pas faire les rachats de trimestres et de points les mêmes années.

Comme il rachète 12 trimestres il peut opter pour un étalement des paiements sur 5 ans. Cependant les rachats de points doivent se faire en une seule fois.

En décalant d’une année ces deux rachats il pourra donc bénéficier de 6 (1 année rachat point + 5 années étalement rachat trimestres) x 3 000€ x 11% (TMI) = 1 980e de baisse d’impôt.

Le rachat des trimestres et des points lui aura donc effectivement couté 32 720e – 1 980e = 30 740€

Note : Nous avons négligé dans ce calcul le fait qu’en décalant d’un an son rachat de trimestres il devra les payer plus cher et qu’en étalant le paiement sur 5 ans il aura chaque année une revalorisation des sommes restant à payer correspondant à l’inflation.  Mais on voit tout de suite qu’avec une TMI faible le gain fiscal

  • d) Calcul de la pension de retraite après rachat

Retraite de base

                                P =  37 200 * 50%  * 172 /172 = 18 600€ brut par an

Retraite complémentaire

                                Coefficient de minoration pour trimestre manquant : 1

                                Coefficient de minoration pour un départ à 62 ans : 0.78

                                On prend le plus avantageux des deux soit 1.

                                P =  12 000 x 1.2714  = 15 256€

 Pension globale

Pendant les 3 première année, minoration de la complémentaire car départ l’année du taux plein

P =  18 600 + 15 256 * 0.9   = 32 320 € (soit 2 694€ brut par mois)

Puis les années suivantes

P = 18 600 + 15 256 = 33 856 € (soit 2 8 21€ brut par mois)

 soit un gain de

  • 32 320 – 25 536 (pension sans rachat) = 6 794€ brut par an sur les 3 premières années après la retraite
  • puis de 33 856 – 25 536 (pension sans rachat) = 8 320€ brut par an à partir de la quatrième année

e) Conclusion

  1. Le gain fiscal avec une TMI à 11% est faible
  2. Le prix d’acquisition net fiscal (30 740€) est récupéré en seulement  4.25 ans après la retraite avec un supplément de retraite à vie de plus de 690e/mois
  3. Il faut tout en étant jeune avoir suffisamment de disponibilités pour pouvoir sortir 12 228€ en une fois pour les points AGIRC/ARRCO puis 341.5€ par mois pendant 5 ans ensuite.

Cas 2 :  Rachat à 40 ans

  • a) Cout de rachat des trimestres

Pour un revenu moyen des 3 années précédentes de 41 000€ et un âge de 40 ans le tableau de la CNAV indique un coefficient à appliquer 11.02% soit un prix de7.43%x 41 000 = 4 518.2€  par trimestre pour le barème Taux + durée.       

Comme le rachat à lieu plus de 10 ans après la fin des études il n’y a pas d’abattement

Le cout de rachat des trimestres est donc de

        4 518.2* 12 = 54 218€

  • b) Cout des rachats AGIRC/ARRCO

Le tableau des coefficients de rachat 2021 pour une personne de 40 ans nous indique une valeur de 24.0. on a donc un cout de rachat de

        420 * 1.2714 * 24 = 12 815€

  • c) Cout global

Cout total : 54 218 + 12 815 =  67 033€

Comme Mr X est dans une tranche à 30% pour 4 500€, il est également dans la tranche à 11% pour 15 625€ (barème fiscal 2021). Il pourra donc bénéficier d’une déduction d’impôt sur la totalité de ces rachats. Mais il aura tout de même intérêt à les étaler pour bénéficier au maximum de la tranche à 30% également sur 6 ans (puisque 6 x 4 500 (dans la tranche à 30%) = 27 000€ est inférieur au 67 033€)

L’année du rachat des points AGIRC/ARRCO :

                Gain fiscal = 4 500*30% + (12 815 – 4500)*11% = 2 265€

Les 5 années d’étalements

                4 500*30%  + (min((54 218/5) ;15625) – 4500)*11% = 2 048€

Soit un gain fiscal global de 2 265 + 5* 2 048 = 12 505€

Le rachat des trimestres et des points lui aura donc effectivement couté

67 033  – 12 505 = 54 528

soit 23 788€ de plus que s’il les avait rachetés à 28 ans.

  • d) Calcul de la pension de retraite après rachat

Le calcul de la pension après rachat est la même que dans le cas précédent puisqu’il ne manque plus de trimestres au moment de la retraite et que le SAM dépasse les 37 200€ maximum. Soit une pension globale de 32 320€ les 3 premières années et de 38 856e les années suivantes

Soit un gain toujours de 6 794€/an sur les 3 premières années puis de 8 320€ les années suivantes

  • e) Conclusions
    • Le surcout du prix de rachat est dans cet exemple partiellement mais pas complètement compensé par le basculement dans des tranches plus élevées.
    • Attention, cet exemple n’a pas de portée générale. Les calculs dépendent grandement de la tranche marginale d’imposition et également de la part de vos revenus taxés à cette tranche. C’est ce que l’on va voir dans l’exemple suivant.
    • Le prix d’acquisition net fiscal (54 528€) est cette fois récupéré en 7.1 ans après la retraite toujours avec un supplément de retraite à vie de plus de 690e/mois

Cas 3 :  Rachat à 55 ans

  • a) Cout de rachat des trimestres

Pour un revenu moyen des 3 années précédentes de 55 000€ et un âge de 55 ans le tableau de la CNAV indique un prix forfaitaire de 5 888€ par trimestre pour le barème Taux + durée.

Le cout de rachat des trimestres est donc de

        5  888 * 12 = 70 656€

  • b) Cout des rachats AGIRC/ARRCO

Le tableau des coefficients de rachat 2021 pour une personne de 55 ans nous indique une valeur de 25.7. on a donc un cout de rachat de:

        420 * 1.2714 * 25.7 = 13 723€

  • c) Cout global

Cout total : 70 656 + 13 723 =  84 379€

Comme dans notre exemple Mr X est dans une tranche à 30% pour 16 000€. Il peut effacer le cout de rachat des points AGIRC/ARRCO sur une année en restant dans la tranche à 30%.

Pour profiter au maximum de sa tranche à 30% il a tout de même intérêt à décaler le rachat des trimestres et à les étaler sur 5 ans (70 656/5 = 14 131€)

L’année du rachat des points AGIRC/ARRCO :

                Gain fiscal = 13 723*30% = 4 117€

Les 5 années d’étalements

                14 131 * 30% = 4 239€

Soit un gain fiscal global de 4 117 + 5* 4 239 = 25 312€

Le rachat des trimestres et des points lui aura donc effectivement couté 84 379 – 25 312 = 59 067€ soit environ 28 327€ de plus que s’il les avait rachetés à 28 ans.

  • d) Gain en terme de retraite

Le calcul de la pension après rachat est la même que dans le cas précédent puisqu’il ne manque plus de trimestres au moment de la retraite et que le SAM dépasse les 37 200€ maximum.

Soit une pension globale de 32 320€ les 3 premières années et de 38 856e les années suivantes soit un gain toujours de 6 794€/an sur les 3 premières années puis de 8 320€ les années suivantes.

  • e) Conclusions
    • Le gain fiscal est bien plus important dans ce dernier exemple mais ne parvient tout de même pas à effacer la différence avec des rachats de trimestres très tôt dans sa carrière.
    • Le prix d’acquisition net fiscal (59 067) est cette fois récupéré en 7.65 ans après la retraite avec un supplément de retraite à vie de plus de 690e/mois

Pour conclure cet article

Comme l’ont montré les exemples précédents, il peut être très intéressant de racheter des trimestres de retraite et ces rachats sont relativement vite amortis après le départ en retraite.

L’impact d’un rachat tardif des points de complémentaires est faible comparativement à celui du rachat de trimestres.

Une stratégie peut donc être de racheter les trimestres dès que l’on est suffisamment installé dans la tranche d’imposition à 30% quitte à le faire en plusieurs fois puis de racheter en fin de carrière les points AGIRC/ARRCO.

Cependant il ne faut pas oublier que 2 risques planent sur ces rachats.

  1. Si vous venez à disparaitre avant votre retraite, les sommes auront été investies à perte (sauf pour la réversion éventuelle pour le conjoint s’il y a droit) alors que les solutions basées sur l’épargne peuvent coupler préparation de la retraite et protection des proches.
  2. Le deuxième risque porte sur les changements fréquents de la législation française sur les retraites (par exemple une augmentation de l’âge légal de la retraite sans augmentation du nombre de trimestres à cotiser rendrait partiellement caduque le rachat de trimestres puisque ceux-ci seront acquis en travaillant obligatoirement plus longtemps). D’autre part, le sort des trimestres rachetés dans le cadre de la future retraite à points est encore relativement flou. Pour les personnes assez proches de la retraite (disons 10 à 15 ans) ce ne semble pas être un sujet. Pour les autres des interrogations demeurent…
Publié par Pierre-Yves GENET dans Fiscalité, Juridique, Retraite, Solution d'investissement, 0 commentaire